Il est minuit passé quand les dernières notes du spectacle Ziara résonnent à l'amphithéâtre de Carthage. Le public, en transe, redescend petit à petit sur terre après avoir voyagé dans l'espace et dans le temps grâce aux différents tableaux de ce spectacle de chants soufis qui s'impose désormais comme une référence tant sur le plan artistique que technique. Le 25 juillet dernier, commémorant la Fête de la République, le public est venu nombreux, très nombreux même à Carthage, assister au spectacle Ziara de Sami Lajmi. Durant plus de deux heures, les spectateurs de tous âges ont vibré au son des chants soufis régionaux et des instruments de musique, notamment les tambours. Durant plus de deux heures, musiciens, danseurs et chanteurs ont transporté le public en liesse de ville en ville, revisitant un patrimoine musical aussi riche que varié. Mais il ne suffit pas de reprendre une chanson d'époque à succès pour s'attirer les faveurs du public et cela, Sami Lajmi l'a bien compris. Après des débuts trébuchants en 2013, maintes moutures du spectacle Ziara ont été proposées pour atteindre enfin, au bout d'une cinquantaine de représentations, l'âge de la maturité. Dans sa dernière version, Ziara convainc, enchante et transporte. C'est désormais un un show artistique complet où chant, danse et théâtre s'entremêlent subtilement pour donner lieu à un spectacle qui se distingue de tous les autres et qui ne rappelle aucun autre. Sur scène, en permanence, une bonne cinquantaine d'hommes, entre chanteurs et percussionnistes, vêtus d'habits traditionnels. Les couleurs dominantes sont le blanc et le rouge, les couleurs d'une Tunisie ouverte, joyeuse, festive mais ce n'est pas tout ! Car à chaque tableau, c'est une explosion de couleurs qui s'invite sur scène avec les danseuses et les danseurs. Du rouge, du jaune, du vert, du bleu, de l'orange et bien d'autres encore... Du jasmin, de l'encens, des bougies, des sefsaris, des youyous et bien plus encore... Le temps d'une soirée, Sami Lajmi et ses acolytes arrêtent le temps, sèment la joie et cueillent du bonheur à l'état pur. En témoignent les visages illuminés, les regards souriants et les mines décontractées de plus de 8000 personnes ce soir-là à Carthage qui se sont laissés emporter par le rythme crescendo du spectacle. Petits et grands, hommes et femmes, se sont laissés entraîner par la folie Ziara, se déhanchant sur les rythmes endiablés, laissant libre cours à leur instinct festif, s'affranchissant progressivement de leur timidité et cassant une à une des barrières du qu'en dira-t-on. Le sens du détail Musique tunisienne d'époque, musique douce, un soupçon de stambéli, du groove, un tempo africain, une once de flamenco... Ziara revisite le patrimoine tunisien en repoussant les limites de la musique, du temps et de l'espace. Un pari réussi avec un public qui en redemande encore et toujours. Mais Sami Lajmi ne s'est pas contenté de ravir les oreilles de ses spectateurs. Il a aussi gâté leurs yeux à travers des chorégraphies savamment orchestrées, un jeu de lumière époustouflant mais aussi des costumes et des accessoires originaux qui font toute la beauté du spectacle. Ziara a tout pour plaire et cela se voit, s'entend et se sent. Le spectacle a fait ses preuves et continue à se produire à Tunis et dans les régions à guichets fermés. A quand la conquête des scènes internationales ? Reflétant une flamboyante image de la Tunisie moderne, réconciliée avec son passé et tournée vers son futur, le spectacle Ziara serait un excellent ambassadeur auprès du public étranger pour transmettre un message d'art, de paix, et d'ouverture. Les ministères des Affaires culturelles et celui du Tourisme sauront-ils saisir cette opportunité ?