Après le lancement officiel de la campagne électorale pour les élections municipales du 6 mai, les partis politiques et les listes indépendantes engagés dans la course, peinent à mobiliser la population. Signe du peu d'engouement des électeurs, la campagne peine à enflammer les foules et à susciter l'intérêt des citoyens-électeurs. Des élections sans électeurs: voilà comment pourrait être présentées les élections municipales qui pourront marquer un nouveau record d'abstention qui avoisinerait les 60%, selon la députée Myriam Boujbel. Quelles sont les causes de l'abstention et quel est son impact sur le paysage politique du pays ? Il y a tout d'abord l'abstention involontaire qui constitue la première cause d'abstention Celle-ci recouvre les non-inscrits et les mal-inscrits. La non-inscription et la mal-inscription ne correspondent généralement pas à un choix politique ou idéologique de refus de voter mais résultent d'un faible niveau d'information. L'abstention involontaire inclut, également, les personnes malades et absentes au moment du vote. Il y a ensuite l'abstention volontaire liée à des raisons diverses et variées. La première est politique. Il convient, toutefois, de distinguer l'abstention politique structurelle de l'abstention politique conjoncturelle. La première tendance recouvre les électeurs qui choisissent de s'abstenir par principe: il s'agit, notamment des personnes qui considèrent que la représentation politique correspond à une confiscation de la parole de l'individu. La seconde tendance recouvre les électeurs qui choisissent de s'abstenir faute de choix politique satisfaisant lors d'une élection. La seconde de ces raisons est sociétale. De nombreux électeurs ne vont par voter en raison d'un manque d'intégration sociale: il s'agit des électeurs les plus jeunes ou les plus âgés, des chômeurs et, de façon générale, des électeurs les plus démunis et isolés. Cette abstention guette les municipales. «C'est une façon de signifier sa défiance à l'égard de la classe politique dans son ensemble, voire du jeu démocratique dans son principe», explique un jeune universitaire. Des avis partagés Les derniers sondages font état d'un taux d'abstention qui pourrait atteindre ou dépasser 70%. L'abstention, qui constituait auparavant un acte isolé et individuel, tend à devenir un phénomène de plus en plus revendicatif et collectif. Les avis sont partagés. Mohamed Ali indique que «beaucoup de citoyens n'ont pas saisi l'importance de l'enjeu. Le problème ne réside pas dans le choix entre droite-gauche, entre bon et mauvais. C'est carrément notre façon de vivre qui risque de changer avec toutes les conséquences politiques, économiques, financières et sociétales que cela implique. Monia estime que l'abstention est le plus mauvais choix et qu'il «faut sensibiliser les gens pour aller voter d'ici le 6 mai » dit –elle ! Mohamed partage son avis : «Ne laissez à personne le soin de parler pour vous, de crier pour vous, d'être citoyens pour vous et finalement de choisir pour vous le visage de votre commune que vous ne reconnaîtriez plus. En allant voter, peut-être vous n'élirez pas le meilleur, mais vous arriverez à éliminer le pire. Malheureusement, l'éparpillement des voix modernistes ne présage rien de bon, et il faut espérer une participation massive de leur part pour limiter les dégâts». Fathi affirme que l'abstention pourrait aussi profiter, à un degré moindre, à certaines sensibilités politiques comme on l'a vu en Allemagne et aux courants «antisystèmes» qui affutent leurs armes. Pour Nadia «l'indifférence des citoyens vis-à-vis des législatives de 2017 et leur préoccupation par la cherté de la vie font planer le spectre de l'abstention». L'appel au vote La députée Myriam Boujbel appelle les citoyens à voter quelque soit les raisons «Le 06 mai se joue l'avenir de la Tunisie pour cinq ans et probablement pour plus que ça. Par les bulletins de vote vous est donnée la possibilité de faire entendre vos voix. Une campagne de sensibilisation sur le vote et contre l'abstention sera justement, lancée par l'Instance supérieure indépendante des élections (ISIE) à partir d'aujourd'hui .Des affiches seront omniprésentes dans tous les quartiers. Les spots publicitaires de sensibilisation passeront en boucle sur les télévisions et radios publiques et privées. Pour inciter les jeunes à se rendre dans les bureaux de vote, l'ISIE a mis en place un jeu sur mobile: Run2vote. Téléchargeable gratuitement sur Android, il retrace tout le processus du vote. L'application permet de choisir un avatar et de collecter dans différentes villes de Tunisie des drapeaux tunisiens et ainsi de pouvoir reconstituer la carte d'identité, le bulletin de vote, l'isoloir et l'urne indispensable pour pouvoir voter.