La participation, pour la première fois, des membres de l'Armée et de la sécurité aux élections municipales divise les syndicats sécuritaires. Alors que les uns parlent d'un droit garanti par la Constitution, les autres déplorent une participation factice décidée dans le seul but de collecter un maximum de voix. Le Syndicat national des forces de sécurité intérieure a réaffirmé son refus de voir les membres des institutions sécuritaire et militaire participer à ces échéances. Son secrétaire général, Chokri Hamada, a déclaré à la TAP que la loi n'accorde pas aux militaires et sécuritaires le vote en tant que droit constitutionnel mais uniquement pour l'obtention d'un maximum de voix lors des élections municipales. Le syndicat regrette la privation des militaires et sécuritaires des différentes étapes du processus électoral sous prétexte de préserver la neutralité de l'appareil sécuritaire, en référence à l'article du code électoral interdisant à cette catégorie d'électeurs de participer aux campagnes électorales et d'assister aux meetings et différentes activités électorales. Imed Belhadj Khalifa, secrétaire général de l'Union nationale des syndicats des forces de sécurité tunisienne, qui avait qualifié, non sans enthousiasme, l'évènement d'«historique», n‘est pas de cet avis. Lors d'une conférence de presse organisée mercredi pour rappeler les mesures spéciales du vote de cette nouvelle catégorie d'électeurs, il a affirmé l'entière adhésion des syndicats sécuritaires au processus et leur détermination à faire réussir ces échéances. Plus de 36 mille agents sécuritaires et militaires vont pouvoir voter dimanche 29 avril pour les premières élections municipales organisées après 2011. Les dernières municipales en date ont eu lieu en 2010. Pour le président de l'Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie), Mohamed Tlili Mnasri, cet évènement historique revêt une double importance. Il s'agit du premier scrutin municipal depuis la révolution et auquel participent les sécuritaires et les militaires pour la première fois dans l'histoire du pays, a-t-il expliqué. Au cours des trois derniers jours, l'instance électorale a parachevé la mise en place de la logistique électorale, en acheminant vers les 27 instances régionales le matériel nécessaire (bulletins de vote, registres électoraux, urnes...), a-t-il assuré. Selon le président de l'Isie, le vote des sécuritaires et des militaires a été placé sous le signe des «trois nons», à savoir «non à l'affichage du registre des électeurs dans les bureaux de vote», «non à l'utilisation de l'encre électorale pour des raisons de sécurité» et «non au dépouillement le jour du vote». Un évènement historique Pour la première fois en Tunisie, les membres des corps militaire et sécuritaire se rendront demain dimanche aux urnes pour voter. Environ 36.050 membres des deux institutions choisiront leurs représentants aux conseils municipaux. Le scrutin se déroulera au moment où la campagne se poursuit pour le public large jusqu'au 4 mai prochain. A l'exception des campagnes de sensibilisation organisées par l'instance électorale, aucune action dans ce sens n'a réellement eu d'écho dans les médias. Trois cent cinquante neuf bureaux seront ouverts pour le vote qui aura lieu à une semaine d'intervalle avec celui de l'ensemble du corps électoral, le 6 mai prochain. Lors d'une conférence de presse organisée mercredi pour rappeler les mesures spéciales du vote de cette nouvelle catégorie d'électeurs, le secrétaire général de l'Union nationale des syndicats des forces de sécurité, Imed Belhadj Khalifa, a qualifié l'évènement d'«historique». Il a souligné l'entière adhésion des syndicats sécuritaires à ce processus et leur détermination à faire réussir ces échéances. La Loi organique n° 2017-7 du 14 février 2017, modifiant et complétant la loi organique n° 2014-16 du 26 mai 2014 relative aux élections et référendums fixe une série de mesures qui différencient les militaires et sécuritaires du reste du corps électoral. La loi, adoptée à une majorité de 139 voix, contre 22 abstentions, accorde aux militaires et agents des forces de sécurité intérieure le droit de vote mais seulement pour les élections municipales et régionales. La loi précise aussi, que ces derniers ne peuvent se porter candidats aux élections municipales et régionales, ni participer aux campagnes électorales et aux réunions partisanes et toute activité ayant trait aux élections. Les urnes des sécuritaires et militaires ne seront pas ouvertes après la clôture de l'opération du vote. Elles seront maintenues scellées jusqu'au 6 mai, date du vote du grand public. Leurs bulletins de vote seront mélangés avec ceux des civils pour éviter de révéler leurs choix et tendances politiques. La loi interdit l'affichage des listes des électeurs à l'entrée du centre ou du bureau de vote réservé aux électeurs parmi les agents de sécurité intérieure et des militaires. De plus, l'instance électorale informe public et instituts de sondage qu'il est interdit de prendre les sécuritaires et militaires en photo dans les bureaux de vote ou de les interroger sur leur choix. Les députés ont pris beaucoup de retard dans l'adoption de cet amendement en raison, justement, de désaccords au sujet de la participation de ces corps aux élections présidentielle, législatives et municipales. En effet, les avis étaient partagés entre les groupes parlementaires sur la participation de ces deux corps de la sécurité nationale. Alors que Nida Tounès était favorable à leur participation, mais uniquement aux élections municipales, Ennahdha avait marqué quelques réticences arguant que l'expérience tunisienne en matière de démocratie est encore récente et fragile. La position de Nida Tounès était proche de celle du groupe Machrou Tounès Al-Horra qui avaient défendu le droit des sécuritaires et militaires à la participation aux élections municipales dès lors que ces élections diffèrent des législatives et de la présidentielle. Ce groupe considérait que les détenteurs d'armes de service sont pleinement concernés par les problèmes des régions. Pour le Front populaire la participation des détenteurs d'armes de service aux élections municipales est un droit constitutionnel. « Le Front s'attache à la participation des militaires et sécuritaires aux élections dans la mesure où leur participation ne signifie pas leur engagement dans la vie politique», avait soutenu un des dirigeants du Front, Zied Lakhdhar. Pour certains observateurs, ce droit de vote fraîchement acquis ne doit pas porter atteinte à la sûreté nationale et au système sécuritaire en général.