Des membres fondateurs du mouvement Nidaâ Tounes, qui avaient quitté le navire en raison de l'alliance nouée avec le mouvement islamiste Ennahdha et les querelles de leadership, s'activement depuis quelques semaines pour recoller les morceaux de cette formation partie en lambeaux. L'annonce a été faite par l'avocat Abdessattar Messaoudi qui a fait état de «contacts intensifs » entre des anciens dirigeants et militants de la première heure du parti vainqueur des législatives de la présidentielle de 2014. «L'objectif de ces contacts qui s'intensifient entre des anciens dirigeants du parti qui ont faussé compagnie à l'actuel directeur exécutif et des coordinateurs régionaux ayant été mis à l'écart de la manière la plus ignoble est de tenir un grand rassemblement national pour débattre des moyens de faire revivifier l›âme de Nidâa Tounes», a souligné Me Messaoudi. « L'idée est de tenir un congrès électoral auquel ne participeraient que les détenteurs des cartes d'adhésion relatives à l'année 2012. Les figures qui ont intégré le parti après le congrès tenu à Sousse en 2016, comme Borhen Bsaiess et Samir Laâbidi, ne seraient pas autorisés à ce processus de reconstruction», a-t-il ajouté. Me Messaoudi a également fait savoir que ce congrès sera ouvert à l'ensemble des membres fondateurs de Nidaâ Tounes, y compris ceux qui ont fondé de nouveaux partis comme Mohsen Marzouk, Ridha Belhadj et Saïd Aïdi. De son côté, Lazher Akremi, membre fondateur du parti créé par Béji Caïd Essebsi en 2012, a révélé l'existence de contacts entre les dissidents de Nidâa Tounes pour récupérer l'âme du parti qui a été vendue au diable par l'actuel directeur exécutif, Hafedh Caïd Essbesi. « Ces contacts visent à amener le parti à renouer avec ses principes fondateurs et à récupérer son électorat potentiel », a-t-il indiqué. Nidaâ Tounes, qui fut une superbe machine électorale conçue sur mesure pour Béji Caïd Essebsi, est aujourd'hui un parti en lambeaux. La formation dont sont issus le président de la République, le président de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) et le président du gouvernement, avait remporté 86 sièges à l'assemblée sur un total de 217. Mais l'alliance contre-nature nouée avec le mouvement Ennahdha et les dissensions nourries par l'ambition dévorante de Hafedh Caïd Essebsi de faire main basse sur les divers rouages du parti lui ont valu la défection d'une trentaine de députés. Le parti ne compte aujourd'hui que 56 députés. Conséquence: à l'ARP, les islamistes d'Ennahdha ont pris le leadership avec 69 députés. Le fils de Béji Caïd Essebsi, qui a pris la direction de Nidaa de façon cavalière, a provoqué des scissions multiples au sein du parti. Une constellation de petites formations fondées par d'anciens membres fondateurs du parti présidentiel, dont Machrou Tounes (Mohsen Marzouk), Tounes Awalan (Rdiha Belhaj) et Bani Watani (Saïd Aïdi) s'est ainsi constituée, accentuant l'émiettement du camp progressiste. Les récentes élections municipales ont en effet prouvé que Nidaâ Tounes a perdu plus des deux tiers de ses électeurs. Le parti, qui ne cesse de reporter la tenue de son congrès électif depuis sa création en 2012, a d'autre part adopté des positions aussi étranges que versatiles, dont l'appel lancé récemment au limogeage de Youssef Chahed. Ce dernier a d'ailleurs vertement attaqué, mardi dernier, le directeur exécutif du parti présidentiel, lors d'un discours retransmis en direct à la télévision publique dans lequel il s'est évertué à défendre son bilan. «Les dirigeants de Nidaa Tounes, et à leur tête Hafedh Caid Essebsi, ont détruit le parti. Cela est même devenu une menace pour les institutions publiques », a notamment lancé le locataire du Palais de la Kasbah. Reste désormais quelle position va adopter Béji Caïd Essebsi. Le président du pays, qui était en déplacement en France au moment du discours télévisé du président du gouvernement, pourrait-il écarter son fils pour sauver son parti ?