Ils sont américains, australiens, jamaïcains, français, allemands, belges… Nés de parents chrétiens, juifs ou athées… Fraîchement convertis à l'islam le plus rigoriste par des imams extrémistes, ils ont gagné les camps d'entraînement de Bosnie et d'Afghanistan, où ils ont acquis une solide formation militaire, avant de devenir des «petits soldats du jihad» contre l'Occident mécréant. Certains sont morts dans les montagnes de Tora Bora ou en Irak. D'autres ont été arrêtés dans le cadre de la campagne internationale de lutte contre le terrorisme, jugés et écroués. Leurs parcours, qui se ressemblent en plusieurs points, peuvent être résumés en deux formules: quête désespérée de soi et folie destructrice. Dans ce troisième article de la série, nous présentons le Français Christophe Caze, ancien étudiant en médecine qui a viré de bord, passant de l'action humanitaire au jihad en Bosnie, avant d'échouer dans le grand banditisme. Christophe Caze, Français de souche, a 26 ans quand il achève sa cinquième année de médecine. Originaire de Roubaix, dans le nord de la France, il se rend d'abord en Bosnie pour des raisons humanitaires, puis il se convertit à l'islam, dans sa version complètement fanatique. Quand il est à Zenica, il s'amuse à jouer au football avec les têtes de prisonniers serbes qu'il a lui-même mis à mort après les avoir torturés. Lorsqu'il séjourne en France, il n'a de cesse de convaincre ses amis de partir faire le jihad en Bosnie. Il a comme guide religieux le célèbre Abou Hamza, l'imam de la mosquée de Finsbury Park, à Londres, aujourd'hui incarcéré en Grande-Bretagne. De nationalité égyptienne, l'imam dirigeait le journal du Groupe islamique armé algérien (GIA), El-Ansar, dans la capitale britannique. Il est affublé de plusieurs surnoms: le Serpent de la Tamise, mais surtout le Manchot. Il a perdu un bras en manipulant des explosifs dans un camp en Afghanistan. Ce qui, pendant les troubles en Bosnie, ne l'empêchait pas de se rendre à Zenica, où il a pris part à l'embrigadement de nombreux jeunes islamistes. Caze compte aussi dans ses relations à Zenica un autre Français converti à l'Islam, Lionel Dumont, qui sera arrêté des années plus tard et condamné à trente ans de réclusion criminelle. Après la fin de la guerre de Bosnie, l'ex-travailleur humanitaire converti au jihad forme, avec Dumont et des camarades d'origine nord-africaine, une bande extrêmement violente: le gang de Roubaix. Début 1996, l'imam Abou Hamza, depuis Londres, envoie plusieurs centaines de livres sterling à Caze. Ce dernier, avec Dumont, va chercher des armes lourdes en Bosnie et les rapporte en France. En cas de pépin, ils savent qu'ils pourront compter sur le réseau d'un certain Fatah Kamel, premier Montréalais – originaire d'Alégréie – à profiter d'un entraînement militaire dans les camps d'Oussama ben Laden, en Afghanistan, au début des années 1990. Au début de l'hiver, le groupe de Roubaix passe à l'attaque. Ses membres entreprennent de réunir des fonds pour la «cause», les armes de guerre à la main. Le matin du 27 janvier 1996, deux ou trois d'entre eux dérobent une voiture Audi à Roubaix sous la menace d'une arme. Au début de la soirée, ils sont repérés par deux policiers. Les gendarmes pensaient intercepter des petits voleurs. «Le plus grand des bandits s'est immédiatement retourné et il a fait feu, en rafales, au pistolet-mitrailleur», a rappelé l'un d'eux à la Cour d'assises de Roubaix, en octobre dernier. Son collègue, Didier Cardon, reçoit une balle dans le pied et une autre dans le dos, à deux centimètres de la colonne vertébrale. Le même groupe repasse à l'attaque une semaine plus tard. Les comparses dévalisent des caisses de magasins. Le 8 février 1996, ils braquent le magasin Aldi de Croix, près de Roubaix. Ils tirent plusieurs coups de feu dans l'intention de tuer le boucher. Puis quittent les lieux avec leur butin: près de 4 000 dollars. Pris en chasse par la police, Caze et Dumont se cachent pendant quelques semaines, le temps d'aller chercher des armes lourdes en Bosnie. À leur retour, Caze planifie un attentat contre la réunion des ministres des Finances du G-7, qui doit se tenir à Lille, une grande ville du nord de la France. Mais auparavant, un groupe de huit hommes cagoulés attaquent, sur le parking d'un centre commercial, un fourgon de Brink's, une société de transport de fonds, à l'arme automatique, au lance-roquettes et à la grenade. Caze s'avance avec son lance-roquettes et tire un coup. Le fourgon fait un bond et retombe sur place. Ne réussissant pas à s'emparer de l'argent, les malfaiteurs s'enfuient les mains vides. Caze décide de porter le grand coup trois jours avant la réunion du G-7. Le groupe stationne une Peugeot 205 face au commissariat central de Lille. Trois bonbonnes de gaz reliées à un détonateur sont placées dans le coffre du véhicule volé. Normalement, le quartier devrait être détruit dans un périmètre de 200 mètres. L'explosion est prévue pour 20h30. À l'heure dite, une petite explosion secoue le véhicule, sans dégâts. Les membres du groupe de Roubaix prennent alors la fuite. Alertés, les gendarmes belges procèdent à un contrôle routier. Le 29 mars 1996, vers 11h40, ils arrêtent une Peugeot 305. Les deux occupants ouvrent le feu. Les policiers ripostent. L'un des passagers n'est autre que Caze. L'autre, Omar Zemmiri, seulement blessé, parvient à s'extraire de la voiture, à fuir vers une maison proche où il prend deux femmes en otages, avant de se rendre dans la soirée. Dans la Peugeot 305, la police découvre un impressionnant arsenal, composé en partie d'armes yougoslaves, et même d'armes antichars.
Demain 4: Stephan Josef Smyrek: l'Allemand du Hezbollah