Présentant un panorama subjectif de plusieurs villages tunisiens, l'exposition de Marwan Trabelsi se déploie entre photo et vidéo. Le vernissage aura lieu aujourd'hui, mardi 25 octobre, au Musée du Bardo Le discours de Marwan Trabelsi est clairement métaphorique. En effet, tout en donnant à voir des œuvres, l'artiste suggère des approches, induit des lectures et donne une dimension mythique à ce qu'il retranscrit. C'est ce qui ressort de prime abord de sa nouvelle création, visible à partir d'aujourd'hui, mardi 25 décembre au Musée du Bardo. Dans la dynamique des ombres/reflets Intitulée "Les villages du vent", cette collection est bien plus qu'une série d'œuvres qu'on réunirait. Il s'agit plutôt d'un exercice esthétique et spirituel. Esthétique car l'artiste tente de tirer une substance du vide, du vent ou de la lumière. Spirituel parce que l'églogue auquel il se livre invite à admirer les forces de la nature dans leur puissance et leur immanence. Quoi de plus éloquent qu'un ciel étoilé qui semble fuir les lumières de la ville? Quoi de plus troublant que des paysages dont l'humain est évacué au profit d'un vide virginal? Dans l'esprit d'un Lorand Gaspar, Trabelsi va à la rencontre de la lumière dans toute sa crudité. Dans ses photographies, il semble parvenir à abstraire la lumière du temps, à la décliner alors qu'elle décline au fil des heures. Ces nuances de lumière instaurent un jeu de tonalités qui va de l'éblouissement à la douceur, de l'éclat inexorable à la plénitude du zénith, du jour conquérant à la nuit qui absorbe toute lueur et scintille au loin. Marwan Trabelsi développe ainsi un nuancier qui a le mérite de souligner la relativité du lumineux, sa quête de points d'appuis puis sa dilution dans le sombre. L'exercice invite à une métaphysique bâtie sur la succession de cycles, une véritable dialectique du clair et de l'obscur. L'artiste va plus loin. Il se fait en effet élégiaque et salue la nuit dans une série saisissante. On se laisse aller à songer à la Nuit étoilée de Van Gogh ou aux constellations des photographes. On s'immerge dans cet élément impalpable, insondable, à la limite de l'indicible. Lueurs d'étoiles ou contrepoints d'une blancheur blafarde viennent troubler le sombre souverain. Nous sommes en pleine métaphore et s'il fallait un cryptogramme, il prendra la forme d'images vidéo qui viennent à point pour donner quelques ancrages au regard confronté à des ciels vagabonds et un photographe errant. Mais où sont donc passés les villages du vent? Mais où sont donc passés les villages du vent? Pourquoi se perdent-ils dans l'imprécision et l'absence de repères autres que les dynamiques de la lumière? Au lieu d'une image conventionnelle, c'est un bestiaire baignant dans le flou que Marwan Trabelsi dégage de ce qu'il photographie. Entre panoramiques et gros plans, l'artiste restitue ce qui fait la substance de son conte qui est qualifié de photographique mais appartient aussi au registre philosophique. Car au bout de 28 photos et une vidéo, l'on finit par s'interroger sur ce qui fonde aujourd'hui notre rapport aux forces de la nature et aussi à la beauté. Comment photographier philosophiquement un village assoupi et désert? Comment jouer de la lumière à l'infini en imposant des dimensions allégoriques? Et au fond, qu'est-ce qui est visuel dans ce labyrinthe obscur balisé de fulgurances de lumière? La réponse à ces questions se trouve dans les œuvres de Marwan Trabelsi et aussi dans leur ombre/reflet. Car, dans ces emboîtements de ciels, on se dirait dans la caverne de Platon, ne sachant plus distinguer le réel du virtuel, l'espace du temps et le clair de l'obscur. Par leur force de suggestion, les photos de Trabelsi parviennent à tous ces décalages et nous ramènent inexorablement à la même question: mais où sont donc passés les villages du vent? Du grand art! L'exposition se poursuit jusqu'au 14 octobre dans la salle des expositions temporaires du Musée du Bardo.