Alors que le compte à rebours pour la grève générale prévue le 24 octobre dans les entreprises publiques a commencé, le secrétaire général de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), Noureddine Taboubi, continue à manier le bâton, mais aussi la carotte. Lors d'un rassemblement des employés du secteur du transport, tenu hier à la Charguia, le responsable syndical a réitéré le rejet total de la privatisation des entreprises publiques. «Il y a 70 000 lignes rouges devant la privatisation des établissements et entreprises publiques», a-t-il souligné. Et d'ajouter : «Nous ne sommes pas contre l'amélioration de la situation des entreprises publiques. Or, certains veulent les vendre uniquement pour couvrir le déficit budgétaire. Nous ne le permettrons pas». Taboubi a également indiqué que la centrale syndicale demeure attachée à des majorations salariales conséquentes au profit des salariés des entreprises publiques et des fonctionnaires, révélant que le pouvoir d'achat des citoyens a chuté de 45%. Il a également fait savoir que 75% de l'impôt direct provient des salaires, tout en appelant le gouvernement à mobiliser des ressources financières en s'attaquant à la contrebande et à l'économie parallèle. «Allez chercher de l'argent auprès des contrebandiers et des acteurs du secteur parallèle qui financent vos campagnes électorales », a-t-il lancé. Estimant que la rencontre qu'il tiendra aujourd'hui avec le chef du gouvernement sera déterminante quant au maintien ou l'annulation de l grève prévue le 24 octobre dans les entreprises publiques et de la grève générale prévue le 22 novembre dans la fonction publique, l'homme fort de l'UGTT a estimé que ces débrayages ne sont pas une fin en soi. «Ce sont les résultats qui importent, bien plus que les rencontres. Nous voulons des solutions. S'il n'y en a pas, nous défendrons les droits de nos syndiqués de toutes nos forces », a-t-il martelé. Le secrétaire général de l'UGTT a par ailleurs appelé le chef du gouvernement, Youssef Chahed, à mettre en place une commission d'enquête indépendante, pour déterminer les responsabilités dans l'affaire de la collision, du 7 octobre courant, entre le navire roulier l'Ulysse de la Compagnie Tunisienne de Navigation (CTN) et le navire chypriote Virginia. «Si l'enquête révèle la responsabilité de certains membres de l'équipage dans la collision, ceux-ci ne bénéficieront d'aucune couverture politique ou syndicale», a-t-il dit, faisant état de l'existence de «tentatives de diabolisation de la Compagnie tunisienne de navigation (CTN) et de la compagnie aérienne Tunisair», dans le cadre de la campagne de dénigrement visant les entreprises publiques. L'UGTT avait décrété des grèves générales dans le secteur public et la fonction publique, en signe de protestation contre le blocage des négociations sociales et l'orientation du gouvernement vers la privatisation des entreprises publiques. Les négociations sociales dans le secteur public sont au point mort depuis plusieurs semaines en raison d'un désaccord entre le gouvernement et l'UGTT sur le taux des augmentations salariales au titre des années 2017, 2018 et 2019. L'UGTT propose dans ce cadre la prise en considération de plusieurs paramètres, dont le taux d'inflation, les taux de croissances prévues au cours des prochaines années et le glissement du dinar par rapport aux devises fortes (l'euro et le dollar essentiellement), qui a causé un renchérissement de produits importés. L'inflation tourne autour de 8%, soit presque le double du taux enregistré en 2015, et le dollar s'est déprécié d'environ 40% par rapport à l'euro, tandis que le taux de croissance du produit intérieur brut est sur une courbe ascendante. Compte tenu de ces indicateurs économiques, la centrale syndicale réclame des augmentations identiques à celles convenues avec l'Union Tunisienne de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat (UTICA). L'accord conclu le 19 septembre entre l'UGTT et l'UTICA prévoit des augmentations de 6,5% par an du salaire de base et des primes fixes au titre des années 2018 et 2019. Le gouvernement a, quant à lui, jusqu'ici évoqué les fortes pressions qui subissent les finances publiques en raison des coûts liés aux subventions des produits de base et des hydrocarbures et e la masse salariale qui dépassé 14 % du PIB, soit l'une des plus élevées au monde. Pour ce qui est de la privatisation des entreprises publiques, l'UGTT refuse la cession des fleurons du secteur public au secteur privé. L'organisation propose en contrepartie la restructuration des entreprises publiques en difficulté et l'amélioration de leur gouvernance.