La stabilité financière en Tunisie se heurte aujourd'hui à de considérables difficultés en raison de la faiblesse de l'économie nationale et des conséquences redoutables de la crise sanitaire. La hausse du ratio de la dette publique qui a atteint 74% du PIB fin 2019, contre 70,4% en 2017, explique la fragilité financière du pays. Le choc du COVID-19 vient jeter de l'huile sur le feu. Plusieurs économistes prévoient que l'impact sera d'une grande ampleur. Ils tablent sur une perte de 5 à 7% sur la croissance du PIB. Mais cela dépendra, bien évidemment, de la maîtrise de la pandémie et de la reprise de l'activité économique. Le dérapage du cadre macro-économique tunisien est aussi fort que prévu En effet, la Tunisie vient d'être classée, en matière de solidité financière 60ème sur 65 pays émergents, loin derrière le Maroc (26ème) et l'Egypte (37ème). A ce propos, Taoufik Baccar, ancien gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie vient de publier dans un récent Post sur sa page , que le recul dans le classement est attendu : « ce recul est loin de m'étonner, car J'étais depuis 2012/2013, parmi les premiers à alerter sur les risques de dérapage du cadre macroéconomique et mes statuts sont là pour le prouver, mais je n'ai jamais pensé que la dégringolade sera aussi forte pour un pays qui était en 2008 classé par le rapport de Davos, deuxième au monde en matière de maîtrise de sa situation budgétaire et qui était également considéré en 2010 parmi les pays à balance de paiements extérieurs solide ». La prochaine période devrait être celle de la refondation de l'économie M.Baccar a souligné que la conjoncture économique est très délicate tout en indiquant que l'heure est grave. Et d'ajouter : « elle n'est ni à la critique ni à la lamentation, j'appelle à la mobilisation générale pour que la prochaine période soit non seulement celle de la gestion de la crise liée à la pandémie du coronavirus, mais également celle de la refondation de notre économie et nos fondamentaux. Cette crise a certes de mauvaises retombées sur notre économie et nos finances, mais elle ouvre également de nouvelles perspectives. Beaucoup d'idées sont avancées ici et là, en particulier le digital, l'agro- industrie et les industries pharmaceutiques ». Les erreurs de gestion macro-économique du pays nous ont coûté cher En ce qui concerne la situation économique et financière du pays, M.Baccar a indiqué que les erreurs de gestion macro-économique du pays notamment au niveau des politiques budgétaires, monétaires et de change ainsi que les politiques publiques désadaptées, empruntées depuis 2011, ont beaucoup plus pesé sur la détérioration des indicateurs. Et d'indiquer encore : « à titre d'exemple, la politique de recrutement sauvage menée les premières années après 2011 sont en grande partie à l'origine des déboires budgétaires du pays avec un budget qui est passé de 27,5% du PIB en 2010 à plus de 35% aujourd'hui. La politique de change menée et la dépréciation du dinar ont eu quant à elles pour conséquences, d'abord une augmentation du taux de la dette publique de plus de 15 points entre 2010 et 2019 (soit 12 milliards de dinars environ) et en second lieu une augmentation du niveau de l'inflation ». Ces politiques publiques et d'autres, précise-t-il, malgré leurs conséquences néfastes, n'ont fait l'objet d'aucune investigation alors que le principe de la redevabilité est devenu partout dans le monde un principe essentiel de la gestion des affaires publiques.