En la soirée du 11 juin, soit entre vingt deux heures et minuit, le producteur et animateur Habib Jegham a invité par téléphone interposé dans le cadre de son émission hebdomadaire : « Ayyem la tounsa, achya la tounsa » (Des jours et des choses inoubliables) sur la chaîne nationale de Radio Tunis, le grand et célèbre chanteur et non moins compositeur tunisien Ezzeddine Idir. Une belle occasion pour s'enquérir de la santé de l'un des séniors de notre chanson qui ont aujourd'hui plus de soixante années de carrière artistique. Certes, Ezzeddine Idir et tant d'autres voix éternelles de notre chanson, ne veulent malheureusement pas dire grand-chose pour les générations d'aujourd'hui qui considèrent que les anciennes générations d'artistes appartiennent à l' « ancien. » De ce fait, elles ne peuvent plus être écoutées ! Alors que leurs chansons pourraient être considérées comme toujours nouvelles ! Le goût pour la chanson tunisienne s'est estompé et rares sont ceux de nos jours qui y accordent une attention. L'éducation musicale en est la cause. Car, comment écouter presque toutes les musiques, à l'exception de celle tunisienne ! Une grande lacune à combler et un malentendu, voire un conflit de générations qui perdure depuis des décades. Tout heureux de retrouver la radio, Ezzeddine Idir a parlé à cœur ouvert pour évoquer moult souvenirs parmi ceux qui ont marqué son parcours ici et ailleurs. Ce rendez-vous a démarré avec la chanson : « Tâala », un succès de tous les temps qui date également de plus de soixante ans. Composée par le même chanteur, il n'a pas été indiqué que les paroles sont dues à Ali Ameur, qui, pour la petite histoire, est l'époux de Choubeila Rached, la progéniture de la célébrissime Saliha. Notre chanteur est revenu sur le détail du roulement et du « Tek » de la Darbouka qui caractérise cette chanson. Ezzeddine Idir n'a pas caché, d'un autre côté, sa déception devant le niveau caractérisé par une rare bassesse des programmes des chaînes tunisiennes radiophoniques et télévisées privées. Pourtant, de belles prémisses apparaissent parfois, comme l'a décrit l'invité d'Habib Jegham. Mais la musique ou la voix ne tarderont pas à tomber si bas ! Alors, autant écouter les œuvres anciennes qu'on peut considérer aujourd'hui comme des chefs-d'œuvre devant le raz-de marée la nullité du produit proposé et essentiellement venu du Machreq. Une panoplie de pseudo-chansons. On avait demandé au grand Mohamed Abdelwahab, quelques années avant sa mort ce qu'il pensait des nouvelles générations de musiciens et de chanteurs. Il avait répondu qu'il s'agissait d'une plaisanterie, d'une « Tfadlika » dans notre dialecte tunisien. Ou quand la « création » ne rime pas avec créativité, pour ne pas dire pire. Une autre chanson d'Ezzeddine Idir était diffusée. Il s'agissait de : « Tinfaraj », celle-là même qui rime avec l'actualité d'aujourd'hui du côté de la santé et de la politique. Autant de chansons qui atteindraient les cinq cent. Quant à la troisième chanson, il s'agit de « Ach ingoul ach ingoullak » qui avait été également chantée et enregistrée par Warda. Elle avait été composée par Hédi Jouini. D'ailleurs et dans ce même ordre d'idées, « Al Anissa Warda », comme appelée à l'époque des années cinquante du siècle dernier, et comme l'indiquent les couvertures de ses disques 45 Tours, où elle résidait à Paris, a été formée par les artistes tunisiens comme : Hédi Jouini, Sadok Thraya et Mohamed Jammoussi. Mais le meilleur des souvenirs d'Ezzeddine Idir fut celui d'avoir chanté devant la diva Oum Kalthoum au Palais de Carthage dans un concert privé lors de sa visite en Tunisie en mai-juin 1968 invitée par Wassila Bourguiba. Ce mini-spectacle était animé par des membres de la troupe musicale de la Radio Nationale. Une grande chance où il avait été félicité par « Esset »pour ses chansons et son interprétation. Oum Kalthoum lui avait proposé d'opter pour le nom artistique d'« Oustaz Izzat », étant donné la longueur de son nom !