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Shilpa Gupta et la chanson de Lennon
Publié dans Le Temps le 23 - 02 - 2021

Artiste indienne, Shilpa Gupta est l'une des cinq participantes à l'exposition "Seen/Unseen". Entre poésie et universalité, elle présente une installation qui oscille entre la rêverie et le message politique.
Comment ne pas immédiatement songer à l'hymne de John Lennon et à toutes les incantations pacifistes qui ont rythmé les années du Flower Power ? La vue seulement du drapeau dessiné par Shilpa Gupta fait revenir à la mémoire des chansons : "Imagine" bien sûr mais aussi "We shall overcome " ou "Give Peace a chance. La nature pacifiste du propos ne fait pas l'ombre d'un doute et l'oeuvre exposée nous dit beaucoup plus que cela.
C'est dans le cadre de l'exposition "Seen/Unseen" que "There is no border here" figure parmi les travaux de cinq artistes internationaux. Ces cinq femmes sont actuellement réunies au sein de la station d'art B7L9 à Bhar Lazreg. Leurs différences et leurs proximités font tout l'intérêt d'un événement artistique qui se poursuit jusqu'au 7 mars. Aux côtés de l'Indienne Shilpa Gupta, le public peut ainsi découvrir des tissages de Amina Saoudi Aït Khay, une vidéo d'art de Hajra Waheed, des tableaux de Hana Malallah et trois installations de Stéphanie Saadé.
Le sens latent
d'un drapeau-poème
Pour le commissaire d'expositions et chercheur Karim Sultan, "There is no Border here" de Shilpa Gupta exprime une approche de la frontière. Il écrit que cette oeuvre "utilise les mots d'une manière à la fois expressive et intime qui brouille les écarts entre les récits encore indéterminés du géopolitique et l'anxiété liée aux relations interpersonnelles. Portée par un processus circulaire, cette expression d'inquiétude quant à un espace qui serait fracturé, fait surgir une tension palpable née à son tour, de la rigidité cartographiée de toute frontière".
Sultan ne se trompe guère dans son estimation. De fait, il pénètre directement dans le sens latent de l'installation de Shilpa Gupta. Ce qui n'est que visible, Karim Sultan le cède à nos yeux qui voient se déployer un vaste étendard de couleur jaune, traversé de blancheur et griffé de noir. L'installation prend en effet la forme d'un drapeau-poème dont il s'agit de saisir le fond et le sens profond.
Composé de multiples pièces de ruban adhésif, le drapeau porte sur chacun des éléments qui le constituent, la mention "There is no Border here" qui est aussi le titre de l'oeuvre.
Il n'y a donc pas de frontière et Shilpa Gupta nous l'écrit comme une litanie qu'on psalmodierait comme un credo ou qu'on ressasserait comme pour se convaincre de cet impératif. En même temps, l'assemblage qui de loin ressemble à un drapeau, s'avère porteur d'un message qui n'est pas visible à première vue. Un poème se profile entre les bandes et installe un second champ sémantique, une signification narrative et une restructuration de la totalité de l'espace.
Un plaidoyer amoureux entre ciel et tranchée
Pour saisir le sublime qui traverse ce drapeau, il faut lire attentivement chaque vers libre de ce poème écrit en langue anglaise. Shilpa Gupta écrit un véritable plaidoyer amoureux, écartelé entre une tranchée et des nuages dans le ciel. "De toutes mes forces, j'ai voulu découper le ciel. En deux morceaux que je partagerais avec mon aimé. Mais le ciel ne cessait de bouger. Quand les nuages du ciel ont franchi mes frontières, j'ai essayé de les repousser. Avec mes deux mains. De plus en plus fermement. Mais le ciel ne cessait pas de bouger. Et mes propres nuages ont pénétré son territoire. J'ai mis un divan au mitan du ciel. Mais les nuages continuaient à flotter au-dessus. J'ai construit un mur de séparation. Mais le ciel l'a traversé. J'ai alors creusé une tranchée. Ensuite il a plu. Et le ciel a rassemblé ses nuages au-dessus du fossé. De toutes mes forces j'ai essayé de couper."
Le poème est laconique, installé dans l'absurdité d'une situation et un surréalisme que ne renieraient pas André Breton ou René Char. Il est aussi un champ métaphorique qui se joue de la fixité des frontières et de leur vanité. Clos sur lui-même et à nouveau ouvert par la strophe finale, le poème instaure aussi une circularité qui implique autant une tentation prométhéenne qu'un irrépressible tonneau des Danaïdes que nul ne pourrait refermer. Shilpa Gupta nous place devant la capacité des nuages à abolir toute frontière et aussi face à l'incapacité à réguler ce mouvement fugace et perpétuel.
Une opinion lovée
dans du ruban adhésif
Ce dilemme n'est pas résolu. A-t-il d'ailleurs une solution ? L'artiste ne l'indique pas et laisse s'installer une suspension du temps, ponctuée par des tentatives peut-être vouées à l'échec, de découper le ciel, entraver le passage des nuages ou délimiter des périmètres de souveraineté étriquée. Par touches successives, la parabole se révèle et éclaire le sens latent de l'installation. "Il n'y a pas de frontière ici" devient alors une exhortation à appréhender l'opinion lovée dans le ruban adhésif. Shilpa Gupta distille ainsi à travers une fable du ciel et des nuages, une mythologie de la frontière, une parabole candide et militante pour un drapeau qui claque au vent de tous les signifiants, seraient-ils visibles ou puisés dans ses fascinants replis.
H.B


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