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« Géographie de l'intime » le pont qui connecte histoires et sensibilités différentes
Publié dans Le Temps le 04 - 02 - 2021

Organisée sous l'intitulé : « Géographie de l'intime », (Seen and Unseen ou « Al Dhaher wal Baten ») », cette belle vitrine de l'art contemporain réunit jusqu'au 07 mars 2021 au B7L9 (Bhar Lazrak, La Marsa), les travaux d'Amina Saoudi Aït Khay (Maroc-Tunisie), Hajra Waheed (Canada), Hanaa Malallah (Iraq), Stéphanie Saadé (Liban), et Shilpa Gupta (Inde) ; cinq femmes artistes de cultures et de pays divers dont les œuvres éveillent en chacun de nous, émotions et espoir, comme une échappatoire à la réalité qui ouvre des chemins vers d'autres univers... Des univers qui peuvent laisser rêveur ou songeur...Entretien avec Béatrice Dunoyer, directrice des projets de la Fondation Kamel Lazaar.
Baignée dans la musique dès son plus jeune âge, Béatrice Dunoyer se tourne plutôt vers le théâtre et la littérature poursuivant un doctorat de littérature comparée tout en enseignant le théâtre au Centre Dramatique National de Nice. En 1992, elle est recrutée par la Direction des Affaires Culturelles de Monaco où elle occupera le poste d'administrateur, puis administrateur principal avant de chapeauter tout le secteur du spectacle vivant. En 2008, elle décide de déménager en Tunisie où elle rencontre Selma et Sofiane Aouissi et intègre « l'Art Rue/ Dream City », où elle travaillera jusqu'en 2019 en tant que Chef de production, puis Directrice des Programmes. En 2020, elle rejoint la Fondation Kamel Lazaar.
Le Temps : comment interpréteriez-vous, cette « manière d'être au monde» que révèle l'expo : «Géographie de l'intime » ?
Béatrice Dunoyer : les sociétés passent par des cycles d'ouverture et de crispation identitaire. Loin du langage politique ou démagogique, cette exposition nous aide à comprendre ces histoires collectives à travers le personnel et l'intime, à travers une certaine manière d'être au monde: ouverte, curieuse, décloisonnée...
Martin Heidegger évoquait la nécessité pour l'individu d'habiter les lieux pour y expérimenter sa dimension ontologique, car « habiter » (bauen) signifie « être sur terre ». Le philosophe proposait la poésie comme acte de mesure de « l'habiter » pour ouvrir la voie à la subjectivité.
Amina Saoudi Aït Khay, Hanaa Malallah, Hajra Waheed, Shilpa Gupta et Stéphanie Saadé, les cinq artistes de cette exposition, habitent pleinement l'espace en poète, opposant aux cartographies officielles, une géographie de l'intime qui sonde les profondeurs de l'humain, et transcende les pays et les appartenances.
Elles invitent à une nouvelle manière d'être au monde, se nourrissant des cultures plurielles de leur parcours de vie pour tisser du commun, et révèlent de nouvelles voies possibles entre apaisement intérieur, et adaptation de son être à des changements choisis ou subis.
*Les œuvres donnent à voir selon les critiques, une échappatoire vers l'imaginaire et la subjectivité, une appropriation sensible de l'espace et du temps, de la lenteur et de la poésie, pour se prémunir de l'hostilité́ du monde extérieur. Comment ?
-Il n'y a pas de manuel, en visitant l'exposition, on comprend. Une exposition n'est pas une table périodique de l'univers dans lequel on vit, mais plutôt une invitation à faire une pause, à regarder le monde sous un prisme différent. Mais cet autrement, ici, reste ancré dans le personnel et à fortiori l'universel. C'est ce pont qui nous intéresse. Le pont qui connecte des histoires et des sensibilités pourtant très différentes.
Il faut se laisser absorber par les œuvres, bannir la volonté de comprendre ou d'analyser au profit du ressenti, écouter les silences, percevoir les traces laissées par les artistes, chacun à sa façon. Vous verrez, vous ressortirez de cette exposition inondés d'empathie, d'espoir et de résilience.
*La notion du temps est partie prenante des œuvres exposées. Comment l'expliqueriez-vous ?
-Toutes les œuvres présentées jouent à leur manière avec le temps, liant passé et présent, dans un temps condensé, intégré, où le passé devient le territoire à partir duquel on peut construire un avenir.
Rencontre de la première et dernière « Particules de Poussière » de Stéphanie Saadé, relie les rideaux de sa chambre d'enfant au présent de l'exposition, éliminant toute trace qui lierait cet objet à un endroit ou à un moment précis pour privilégier le moment de la rencontre avec le spectateur. A l'inverse, « Bâtir une Maison avec du Temps » (2020) de cette même artiste, sculpture constituée de 2832 perles qui symbolisent le nombre exact de jours entre sa date de naissance et la fin de la guerre civile libanaise, matérialise et rend tangible un temps qui n'est plus...et ce, de manière détournée et apaisée.
La notion de temps est intégrée à la matière même des tapisseries d'Amina Saoudi, produites sur de longues périodes, des mois, pour certaines des années. Celles-ci basées sur la mémoire sublimée, où l'enfance marocaine de l'artiste se mêle à sa vie tunisienne, proposent un temps resserré et circulaire rendu perceptible par l'imprévisibilité du geste, le rythme et le chromatisme des œuvres.
Hanaa Malallah a choisi, quant à elle, de relier le passé mythique au présent bouleversé de son pays en guerre, construisant une structure complexe et cohérente à partir de signes dérivés de systèmes historiques de connaissance de l'antiquité mésopotamienne à des traces d'objets du quotidien.
Hajra Waheed matérialise le temps à travers la forme de la spirale, allégorie cosmique et initiatique. Enfin, Shilpa Gupta oppose le temps humain aux forces de la nature qui défient toute tentative de découpage.
*Vous avez fait appel à cinq femmes artistes, cinq identités plurielles et universelles. Comment votre choix d'artistes s'est –il fait ?
-Ces artistes partagent, malgré la multiplicité des médiums, des cultures et des sensibilités diverses, un langage commun. Celui de la poésie, de la pudeur, le pouvoir de puiser dans le personnel pour tisser du commun sans tenter d'imposer une vérité unique et absolue.
*La Fondation Lazaar soutient, comme vous le précisez bien, la production et l'accompagnement des artistes, des initiatives de recherches, etc... pour promouvoir la Tunisie comme plaque tournante de l'art contemporain. Où est la place de l'artiste tunisien dans cette manifestation ?
-Nous souhaitons faire dialoguer les artistes qu'ils soient tunisiens ou d'ailleurs, car le pays se prête à de belles conversations, surtout en ce moment. Qu'on le veuille ou non, depuis la Révolution, la Tunisie est un territoire ouvert où les artistes du monde arabe peuvent se retrouver pour réfléchir ensemble et élaborer une pensée critique. Elle offre le visage d'une Terre multiculturelle emplie de paradoxes et de contradictions nécessaires à la recherche du vrai. Nous souhaitons faire du B7L9 une fabrique du vivre ensemble réunissant jeunes artistes et artistes confirmés de la Méditerranée, du monde Arabe et de l'Afrique.
Nous suivons et soutenons les artistes tunisiens, bien sûr, mais ils ne sont qu'un élément de ce que l'on souhaite articuler au B7L9 : une culture proche et inclusive mais toujours exigeante et pointue. Les artistes tunisiens ont avant tout besoin de se nourrir et d'échanger avec ce qui vient d'ailleurs, de se confronter et de partager avec les autres. Le B7L9 veut être ce lieu de partage, pour créer des ponts et des parallèles entre les différentes écoles et mouvements artistiques qui ne soient plus exclusivement articulés autour de l'histoire de l'art occidental.
* Qu'en est-il de l'exposition « Culture Solidaire » qui a rassemblé l'année écoulée, plusieurs artistes ayant bénéficié de l'appui de la Fondation Kamel Lazaar durant le confinement ?
-Cette exposition a eu un beau succès et a permis d'offrir une visibilité à de jeunes artistes de Tunis mais aussi des régions. Elle aurait dû être accompagnée de manifestations artistiques regroupant tous les lauréats de Culture solidaire, malheureusement impossible compte tenu des consignes sanitaires. Cependant tous les projets ont fait l'objet d'ITW diffusés sur notre chaîne You tube et sur notre site.
*Avez-vous d'autres projets pour l'après -COVID 19 ? Lesquels ?
-Nous avons eu des projets avant, pendant et nous continuerons d'en avoir après la Covid. Cette crise nous a permis de mieux évaluer le temps et les choses qui pressent à être réalisées. Mais elle n'a pas ralenti le rythme de notre activité. Nous sommes en train de préparer les 3 expositions qui se succéderont après « Géographie de l'intime » : deux expositions solo dédiées à Thameur Mejri (mars-avril), et Yasmine Ben Khelil (mai- juillet) et une exposition de groupe pour la rentrée de septembre. Et nous prévoyons une nouvelle initiative « Culture solidaire » pour encourager la création durant cette période troublée.
Propos recueillis par : S.B.Z


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