* Magnifique égalisation de Traoui 9ème minute de jeu. Dans cette CAN où les favoris sont particulièrement pressés et marquent très vite, la Tunisie n'est pas en reste. Après avoir (relativement) pris la dimension d'un adversaire sénégalais pour le moins arrogant ; et connu, même, quelques chaudes alertes surtout au moment où Niang (4') prenait de vitesse l'axe défensif tunisien, les nôtres quadrillaient petit à petit le terrain, n'usant guère de pressing intempestif face aux virtuoses sénégalais, mais engrangeaient les petits espaces sur les côtés et particulièrement sur le côté gauche. Peu être, sans doute, l'option des trois pivots permet-elle une circulation rapide de la balle et en diagonale. Et puis ce " losange " déguisé qu'a mis en place Lemerre était de nature à concéder une franche liberté de manœuvre à Chikhaoui, judicieusement aligné plus près de l'attaque que de la ligne médiane et, de ce fait, le virtuose tunisien aura eu, avant le but de Jemaâ, quelques exercices de bravoure, ce qui prédit à la défense sénégalaise, (axiale à trois), d'avancer d'un cran (pour réduire les espaces devant Chikhaoui) et le tribut en fut une distraction sur les flancs. Surtout le flanc gauche (sénégalais) où une merveilleuse une- deux Bekri - Jemaâ, avec une balle veloutée et libératrice du latéral gauche, permit à l'attaquant de Caen de réussir l'un de ces tirs croisés, dans une position et une coordination des mouvements, typiques. Ce n'était pas mal deviné de la part de Lemerre. Un Jemaâ plus excentré qu'ailier pur, véritable force de perforation à gauche, appuyé par un Bekri méthodique, prudent et linéaire, et qui matérialisait ainsi le système en diagonale par excellence : on attaque sur la gauche, mais on reste très prudent sur le versant opposé. C'est peut-être là qu'une controverse pouvait surgir : peut-on se permettre le luxe de renoncer au latéral droit (Ben Frej) le plus offensif d'Afrique ? Et cela parce que , par " oui dire " Kasperczack comptait concentrer le gros de sa force de frappe du côté de Ben Frej ? Le Real ou le Brésil, renoncent-ils à Roberto Carlos chaque fois que l'adversaire s'annonce dangereux sur la droite ? Une question à soulever et à discuter, malgré tout. Cela dit Felhi fut impérial… Car après le but, et dès lors que les Sénégalais se sont repositionnés sur leur côté droit pour endiguer les incursions de Jemaâ, le jeu s'est concentré au niveau de l'entre -jeu où, attentistes, nos pivots se tiraient à remballer et à contrer le porteur de la balle adversaire, non sans quelques imperfections. Car, une fois sécurisés sur les côtés, les Sénégalais s'en remettaient à l'habilité individuelle des Diouf et, surtout, Niang et Camara. D'autant que derrière l'entente Hagui - Jaïdi, n'était guère parfaite. Et cela fait que sans appui du côté droit, Chikhaoui s'éteignit curieusement après le but tunisien, recherchant des relais qu'il ne trouvait pas, tandis que Santos - en petite condition physique- paraissait pratiquement hors schéma. Et , d'ailleurs, à cinq minutes de la fin, l'empressement de Santos de se libérer d'une balle donnée en profondeur à Jemaâ, obligeait celui-ci à une course de 60 mètres que le tenace Diawara n'avait aucune peine à intercepter. Le même empressement de Santos de se libérer de la balle, alors qu'il n'y avait presque plus rien devant lui mettait Chikhaoui dans la pire condition de pouvoir maîtriser la balle et foncer sur l'axe adverse. La plus classique des contre-attaques s'évaporait ainsi. Et c'est sur le contre, comme il arrive souvent que les Sénégalais égalisaient, par l'entre -mise de M. Sall (dans le temps additionnel) sur une grossière bévue de Jaïdi
Frayeurs Un but encaissé à quelques secondes de la pause a l'effet d'un coup de massue. Et, d'ailleurs, les nôtres parurent après "le repos" plutôt désorientés, recherchant des repères perdus et acculés à une lutte "homme à homme" exactement le genre d'attitudes qu'il ne faut jamais adopter avec les Sénégalais. Les dix premières minutes de jeu de la seconde mi-temps, furent difficiles. Heureusement, que la déferlante sénégalaise était désordonnée et quelque peu codée. Mais qu'avions-nous à y opposer? Une belle passe de Santos pour un Traoui bien lancé mais qui va chercher la simulation écopant, le plus logiquement du monde, d'un avertissement. Mais le paradoxe (parce qu'il y avait un paradoxe) vient de ce côté droit: Lemerre a préféré Felhi à Ben Frej. Or tout le danger sénégalais, en seconde mi-temps venait de là-bas. Et Felhi restait sans appuis. Comme à la 57' quand un débordement sur la gauche mit Niang en position facile de scorer. On a eu de la veine, parce qu'un grand comme Niang ne rate pas un but aussi facile. A partir de la 60', Kasperczak entreprit les changements auxquels on s'attendait et qu'il affectionnait même du temps qu'il était avec nous. Il joue son va-tout lors des dernières trente minutes. Maintenant le Sénégal fait reculer Diouf et joue avec trois attaquants. Kasperczak a compris que la défense tunisienne était frileuse. Au point qu'elle cafouille sur un corner tiré par Diouf, avec Felhi , par terre qui sert Camara sur un plateau (66'). Ce fut alors le deuxième but . Parfaitement prévisible. Inévitable même, compte tenu des pesanteurs d'un match dont Kasperczak faisait une lecture presque parfaite, alors que Lemerre restait impassible, en dehors de l'intégration de Zaïem (avant le deuxième but) à la place d'un Santos, superflu. Chikhaoui ne s'y retrouvait pas, lui non plus, et ce fut la résurgence de ces vieux démons, des avatars d'une sélection pratiquement sans modèle, sans schémas et sans âme. Avec, par surcroît, une condition physique précaire. Etait-ce en dix minutes qu'on pouvait renverser la vapeur avec l'entrée (tardive!) de Ben Dhifallah? N'a-t-on pas mis Chikhaoui dans les pires conditions de s'exprimer, invoquant des balles qui ne lui parvenaient jamais? Mais parfois il suffit d'un rien, quand les mécanismes se grippent, et que les automatismes s'évaporent… il suffit d'un rien, d'une inspiration pour soulever des montagnes… A la 82' Traoui décochait un tir magnifique des 30 mètres, directement dans la lucarne. L'espoir renaissait. Le dépit est quelque peu atténué. Lemerre jette alors Mikari dans la mêlée. Et à la 86', Chikhaoui débordait mais entrait désarticulé dans les 18 mètres adverses. Tout de suite après, Jaïdi effleurait de la tête une balle favorable. Le match aura été peut être moyen – de part et d'autre – sur le plan technico-tactique, mais chargé sur le plan émotionnel. A la décharge de Lemerre, l'absence de doublures et, donc, de solutions de rechange. Mais c'est un nul bon à prendre. Et il faudra s'accrocher… Et y croire. Comme l'a fait Traoui.