Apparemment, l'idée s'est finalement faite que les boys devraient progressivement ficeler leurs paquetages pour rentrer à la maison, leur commandant en chef se serait rendu compte subitement qu'il y avait erreur de logique quelque part et que le mieux était de changer de cap pour que les Américains ne soient pas tentés de changer de capitaine. En attendant, 21 500 soldats supplémentaires vont être envoyés en renfort… Afin d'aider le gouvernement irakien à rétablir la stabilité dans le pays. Les politiciens de tout bord justifient ce genre de volte-face par la rhétorique quelque peu fumeuse du réalisme. Que ce réalisme néglige le million de morts et de personnes handicapées à vie ne dérange pas les consciences. Après tout, la conscience a les vertus élastiques du politiquement correct. Le plus important est que les arguments des faucons soient acceptés par les pigeons, acceptés étant un euphémisme facile pour les couleuvres proposées S.G. (selon grosseur, pour jouer sur le prix à payer dans les restaurants) au commun des gogos. Ainsi, et pour résumer la situation, les Américains ayant essentiellement voté pour des considérations fiscales, de mode de vie et de confort individuel, les armes de destruction massive et autres babioles propres à effrayer l'honnête citoyen auront donc à disparaître du paysage médiatique. Logique, non ? En remplaçant les républicains par les démocrates, la magie de l'isoloir a modifié l'état des arsenaux et les dispositions guerrières des troupes. Non que les uns ou les autres aient une quelconque intention d'alléger le drame des Irakiens. Et de quelques autres peuples pris régulièrement dans le champ de tir et d'exercice de soldats surarmés juste pour prouver que les plus forts restent les plus forts. Le théâtre des nations tiendrait du vaudeville si les victimes n'étaient pas en chair et en os. D'ailleurs plus en os qu'en chair, sous les yeux admiratifs de la foule anonyme qui tire le diable par la queue et avale les couleuvres dans le sens des écailles. On aura même remarqué que Blair, qui n'a pas beaucoup de flair mais assez d'agilité opportune, a déjà commencé à développer les contre-arguments qui ridiculisent le Blair de Grande-Bretagne va-t-en-guerre. Que le lendemain des élections américaines, ses services aient sorti une nouvelle ( ?!) cartographie du terrorisme est un simple fruit du hasard. Il fait comme à l'accoutumée pour les nouveaux stratèges politiques du tiers et quart-monde : on allume un contre-feu quand l'argumentaire précédent vient à faillir, on joue sur la peur pour démobiliser la raison et la conscience. En général, pour finir par gagner la partie, en attendant le retour des faucons et le renouvellement du stock des pigeons. Les autres suivront, avec quelques mouvements du menton pour dire le désaccord de principe. Mais, comme au Liban, les bombardiers repassent pour marquer le territoire de la force contre laquelle on ne peut rien. En toute logique et puisque le réalisme, encore lui, apprend que l'arithmétique des morts n'appartient pas à la même science que l'on soit d'un côté ou de l'autre du Fumeux Conseil de Sécurité à qui les Nations ont confié le soin de dire la logique du droit. Enfin, des droits à tiroirs. Mais comme les dirigeants du bord chair à canon veillent à ne pas laisser sortir les cadavres des placards pleins, les logiques se rejoignent. Le tour de passe-passe consistera à parler en creux de démocratie, de droits de l'homme, de défense de l'environnement, d'états de droits. Après tout, les morts ne peuvent plus revendiquer ces droits. Logique, et rassurant !