Comme à l'acoutumée, au début de chaque année, l'Heritage Foundation publie le classement de 157 pays selon l'indice de liberté économique. L'indice en question trace le degré d'ouverture d'un pays ainsi que les freins à sa libéralisation tous azimuts. Le score global attribué à chaque pays est le fruit d'une agrégation de dix facteurs déterminants de la liberté économique. Il s'agit pour l'essentiel de la liberté d'entreprendre, la liberté commerciale, la liberté monétaire et la liberté d'investissement. La Tunisie a enregistré cette année une amélioration notable en passant d'une économie «peu libérale» à une économie «modérément libérale».
La Tunisie a été classée au 69ème rang mondial sur 157 économies, gagnant une avancée de 30 places par rapport au classement de l'année antérieure. Elle arrive en tête du peloton du Maghreb et occupe la 6ème place sur 17 pays de la région du Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA).
61% de l'économie tunisienne est libre En se référant aux conclusions de l'étude prospective de l'Héritage Foundation, l'économie tunisienne est 61% libre. Le score final approuvé s'est accru de 1,8 points de pourcentage par rapport à l'année écoulée. Dix facteurs ont été retenus pour déterminer le degré d'ouverture global de chaque économie. L'appréciation de la liberté économique varie selon un échelon allant de 0% (économie fermée) à 100% (économie totalement libre). Aucune économie libre n'a été identifiée. La Hong Kong est classée première avec un taux de liberté économique de 89,3% alors que la Corée du Nord vient au bas du classement avec un taux de liberté économique de 3%. En faisant un benchmarking entre les pays du Maghreb et de l'Afrique du Nord, la Tunisie enregistre des taux élevés en termes de liberté des affaires, de liberté fiscale, de liberté de travail et de liberté monétaire. Néanmoins certaines insuffisances persistent entravant l'affermissement du processus de libéralisation de l'économie tunisienne.
Insuffisances réglementaire et administrative Parmi les obstacles, le rapport évoque les taux élevés d'imposition et les restrictions d'ordre réglementaire. En dépit des progrès réalisés, des défis restent à relever en matière de libéralisation du commerce, de liberté d'investissement et de la libéralisation financière. Toujours selon les conclusions de Heritage Foundation : « L'Etat tunisien conserve des règles commerciales complexes et des pratiques bureaucratiques opaques. La politique protectionniste conduite en faveur de certains secteurs limite les opportunités d'investissements étrangers dans le pays ». La fondation reproche également la non-conformité de certaines normes bancaires aux standards internationaux. Chaque facteur déterminant de la liberté économique a fait l'objet d'une petite analyse faisant le point sur les faiblesses à combler.
« Il est plus facile d'arrêter que de démarrer les affaires en Tunisie» La lenteur des procédures administratives et les obstacles bureaucratiques constituent les principales remontrances adressées à la liberté d'entreprendre en Tunisie. La fondation observe qu'il est plus facile de liquider les affaires que d'acquérir une autorisation pour le lancement d'un projet en Tunisie. Par ailleurs, les opérations de démarrage, de faillite, de liquidation et de gestion des affaires sont relativement protégées par l'environnement juridique et réglementaire national. La durée nécessaire pour le démarrage effectif d'une affaire (un business) est située dans la moyenne de 11 jours contre une moyenne mondiale de 48 jours. A ce titre, il ne faut pas renier les efforts déployés par l'Agence de Promotion des Investissements en matière d'allégement des formalités à travers notamment la déclaration en ligne des projets et la constitution juridique des sociétés en ligne.
Persistance des barrières non-tarifaires Avec le démantèlement tarifaire total prévu pour l'année prochaine, il n'a y aura pas d'entraves à la libre circulation des marchandises avec les pays de l'Union Européenne. Le rapport confirme, par ailleurs, la persistance de barrières non tarifaires affectant le score finale attribué à la Tunisie en matière de liberté commerciale. Parmi les entraves observées on notera la complexité de la structure tarifaire, le poids des taxes à l'importation et des prix, le volume des subventions à l'exportation, la durée de dédouanement des marchandises et le coût élevé du commerce. Mais avec une taxe « nulle » on s'attend à une amélioration de la liberté commerciale de la Tunisie tant au niveau mondial que régional et à une impulsion des termes (importations et exportations) de l'éhange commercial de manière à réduire le déficit commercial de la Tunisie.
Stabilité des prix en Tunisie ? En matière fiscale, le rapport déplore le fardeau des taux élevés d'imposition en Tunisie. « Durant ces dernières années, les revenus fiscaux n'ont pas dépassé 20,7% du Produit Intérieur Brut », note la fondation. Ripostant à cette constatation, il y a lieu de préciser que la la loi des Finances pour l'année 2007 et la promulgation de la loi spécifique à l'allégement de la pression fiscale sur les entreprises, prévoient des dispositions portant réduction du taux d'impôt sur les sociétés (pour certains secteurs) à 30%, la suppression de la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) de 29%, l'encouragement de la transmission des entreprises et autres. Concernant la politique monétaire, le rapport considère que le taux d'inflation est faible en Tunisie. L'étude a pris en compte l'évolution des taux d'inflations enregistrés entre 2003 et 2005, situés en moyenne à 2,5% et elle a omis l'accroissement notable du taux d'inflation enregistré durant l'année 2006 pour se situer à 4,6% à la fin du mois de décembre 2006. La fondation constate par ailleurs que la stabilité des prix en Tunisie explique en grande partie l'amélioration de la liberté monétaire. Néanmoins la politique de fixation des prix par l'Etat pour subventionner certains produits, par exemple, limite cette liberté.
Des restrictions en matière de contrôle de changes Du côté des investissements étrangers, la fondation déplore la protection de certains secteurs à l'investissement étranger en général. Elle désapprouve les restrictions en matières de contrôle de changes, de contrôle des opérations sur le capital et de transferts. A ce titre, plusieurs réformes en matière de changes ont été récemment prises dans le cadre du programme exécutif de la convertibilité totale du dinar. Il s'agit pour l'essentiel de donner la possibilité aux non-résidents qui participent à plus de 50% au capital d'entreprises résidentes la liberté de gérer les comptes de ces entreprises, de supprimer l'autorisation de changes au titre de la souscription à la majoration du capital des entreprises établies en Tunisie, de relever dans le cadre de l'encouragement des exportations le taux de l'alimentation des comptes bénéfices-exports de 10 à 15% en 2007 et de relever les plafonds annuels non soumis à autorisation, au titre des investissements à l'étranger. Par ailleurs des efforts restent encore à déployer en matière de libéralisation financière, de droit de la propriété et de liberté de travail.
Commentaire de Yosr GUERFEL
(Voir aussi le dernier rapport du FMI sur l'économie tunisienne : page 12)