Les élèves peuvent enfin s'offrir un temps de soulagement après avoir passé les examens du 2ème trimestre durant toute la semaine bloquée. Mais il reste encore quelques jours qui les séparent des vacances de printemps, pendant lesquels les professeurs corrigent les devoirs et remettent les copies à leurs élèves. C'est alors qu'on assiste à des réactions diverses de la part des élèves envers leurs profs. Les uns expriment leur indignation en s'adressant impoliment à leurs enseignants, les autres manifestent leur mécontentement d'une manière incivile, quitte à déchirer la copie de leur devoir au nez et à la barbe du prof, en signe de protestation... On les entend alors formuler des jugements souvent erronés et sans preuves : « Ce prof est très sévère, celui-ci est indulgent, celui-là est généreux, cet autre est trop exigeant » disent les élèves ayant eu de mauvaises notes. Ou encore : « Ce prof veut nous massacrer par les devoirs difficiles qu'il nous donne ; le prof de l'autre classe est plus compréhensif avec ses élèves. ». Il y a même ceux qui mettent en cause les compétences et les qualifications du prof. Une évaluation à l'envers ! Et cette vague de plaintes et de critiques souvent mal fondées gagne très vite les parents qui, à leur tour, viennent rouspéter auprès de l'administration contestant une note jugée injuste accordée par le prof de la matière en question, note qu'ils considèrent non conforme aux efforts fournis et aux capacités de leur enfant ; il faut voir ces parents qui se mettent parfois dans tous leurs états lors de leur rencontre avec les administrateurs ou avec les enseignants. Ils sont peut-être excusables quand il s'avère qu'ils sont mal informés par leurs propres enfants et qu'ils ignorent tout en matière d'évaluation ! En effet, ce qui compte pour un parent, c'est le résultat. « Mon fils fait des cours particuliers en maths, et il n'a jamais eu la moyenne ! » vous dirait l'un. « Les notes de mon fils sont toujours mauvaises, pourtant, il fait des cours particuliers dans toutes les matières principales ! » vous dirait l'autre. Et l'on entendrait même dire : « Pourquoi cet élève a eu une bonne note alors que celle de mon fils est mauvaise ; l'année dernière, avec M...., il était meilleur ! » il y a même ceux qui arrivent munis de deux copies, portant deux notes différentes, l'une de leur fils ou fille, l'autre d'un(e) camarade de classe et, après avoir confronté les deux copies, ils viennent demander justice !
« Tribunal » Ainsi durant toute la semaine qui précède les vacances, le collège ou le lycée se transforme en tribunal où les profs sont jugés par les élèves et leurs parents : on ne voit que des groupes de parents accompagnés de leurs enfants « victimes » d'une injustice de la part d'un ou de plusieurs profs, envahir les couloirs de l'administration ou s'amasser devant la salle des profs pour corriger une erreur de calcul, discuter une note ou critiquer un barème, ou carrément pour supplier l'un ou l'autre prof d'améliorer un tant soit peu la note de leur enfant en détresse! Et c'est dommage que certaines rencontres avec les profs dégénèrent en propos déplacés et parfois violents de la part d'un parent trop coléreux et souvent mal informé par son propre fils. C'est que pour la plupart des élèves, il est si facile de mettre la faute sur les autres et de se dissocier de toute responsabilité. Les autres sont les profs qu'on n'arrête pas de blâmer chaque fois que les choses ne vont pas bien! En effet, les accusations sont diverses : si l'élève n'est pas motivé en classe, c'est à cause du prof qui ne sait pas retenir son attention; en cas de non-réussite, c'est aussi le prof qui n'est pas compétent; en cas d'indiscipline ou d'irrespect, c'est encore la faute au prof qui manque d'autorité et de charisme et si l'élève passe devant le conseil d'éducation pour fraude ou tentative de fraude, c'est toujours à cause du prof qui ne surveille pas bien... Et pourtant, les profs n'ont rien contre leurs élèves et les visites des parents seront toujours agréées par le corps enseignant quand il s'agit de discuter certaines carences ou faiblesses relatives à la scolarité de leurs enfants dans le but de trouver ensemble la solution adéquate. Le problème réside dans le fait que pas mal d'élèves (et derrière eux leurs parents) ignorent que le prof est guidé dans sa profession par des programmes officiels qu'il est obligé d'appliquer scrupuleusement et qu'il est contrôlé dans sa tâche par un inspecteur qui lui-même doit veiller à la bonne mise en œuvre de ces programmes.
Même matière ; devoirs différents Les devoirs de contrôle et les examens trimestriels répondent également à des critères dûment établis par le ministère. Il n'y a donc pas lieu de contester un devoir, encore moins une note tant que le sujet proposé aux élèves n'est pas hors du programme relatif au niveau de cet élève. Cependant, le prof est appelé dans certains cas d'adopter une méthode plutôt qu'une autre selon la réalité de sa classe ; car il arrive souvent que la classe ne soit pas homogène puisque les élèves faibles peuvent entraver la bonne progression du travail ; d'où la nécessité, lors de l'élaboration du devoir, de prendre en considération le niveau général de la classe, et ce, toujours dans le cadre des programmes officiels. C'est peut-être pour cette raison qu'il arrive que deux ou trois profs enseignant au même niveau la même matière donnent des devoirs différents. Les résultats seront automatiquement différents d'une classe à l'autre, chez ce prof ou l'autre. Cette différence des résultats qui varie d'une classe à une autre donne l'occasion aux élèves de porter des jugements sur leurs profs respectifs ! A leurs yeux, le meilleur prof est celui qui « ravitaille » le mieux ses élèves en bonnes notes ! C'est le seul critère qui compte ! Un enseignant compétent dans son travail mais sévère et autoritaire avec les élèves est pris pour un rétro qui rappelle les maîtres de l'ancienne époque. Il y a d'autres qui sont considérés comme laxistes, d'autres comme trop sérieux, impitoyables ou tout simplement avares. Le prof qui n'est pas sévère dans l'octroi des notes est le plus apprécié des élèves : il est alors « le meilleur prof », « le bienfaiteur », « l'ami des élèves », « le type in » et nous en passons... Cette semaine qui précède les vacances, il faut le dire, est une semaine infernale pour des milliers d'enseignants qui doivent faire face à toutes les surprises que certains élèves leur réservent, soutenus systématiquement par leurs parents. Statistiquement parlant, les actes de violence verbale ou physique, perpétrés contre les enseignants, en cette semaine, atteignent des chiffres alarmants. D'ailleurs, la réaction de ces élèves aux résultats médiocres ne se fait pas attendre. En effet, le prof « incriminé » découvre aussitôt les conséquences de sa « méconduite » sur le tableau ou sur les murs de la salle de classe sous forme de propos injurieux ou de caricatures outrageuses qui portent atteinte à sa personne. D'autres réactions plus odieuses consistent à s'attaquer à la voiture du prof concerné et là, il faut imaginer les dégâts qui lui sont causés. Il est vraiment regrettable que, de nos jours, une mauvaise note octroyée par un prof (croyant sans doute avoir agi pour l'intérêt de son élève) soit à l'origine de telles réactions ! Ce qui est étrange, c'est le statut que l'on donne de nos jours aux enseignants, jadis quasi vénérés, et très respectés pour la noblesse du métier qu'ils exerçaient ; aujourd'hui ils sont abondamment critiqués, et par qui ? Par leurs propres élèves ! Il est indéniable que le droit de juger, de critiquer est fondamental dans une société de liberté et de démocratie, et que la liberté d'expression est l'un des droits essentiels de l'enfant, chose que l'école doit lui inculquer dès les premières années de sa scolarité, mais il y a toujours une certaine limite à ne pas dépasser, car le respect de l'adulte est aussi un principe ancré et sacré dans notre société arabo-musulmane qu'il ne faut jamais enfreindre. De même la bonne relation professeur-élève demeure un facteur essentiel à la marche de l'institution scolaire, aussi faut-il l'effort de tous et le respect mutuel afin qu'enseignant et élève travaillent de concert dans des conditions de confiance et dans une ambiance saine, ayant pour seul souci d'assurer une formation solide aux futurs cadres de notre pays.