"L'information est sacrée, le commentaire est libre". Les maîtres fondateurs des médias , les vrais, en ont fait leur surdose et leur raison d'être. C'est aussi un combat pour une communication saine. L'évolution des médias est époustouflante. Elle est rapide. Trop même. Mais le journaliste n'est plus cet "ouvrier de l'éphémère" tel que le dépeint Jean Daniel. Il doit dénicher l'information, la communiquer, la commenter. Pour y réussir, il doit aussi développer ses sources d'information. Là il devient dérangeant. Suspect. Indésirable même, aux yeux de ceux qu'il sollicite pour qu'ils communiquent, et qui ne communiquent pas en définitive. Samedi dernier, le Premier ministre réunissait les représentants des organes de presse pour un débat ouvert, sans tabous et à bâtons rompus. Un échange de propos édifiant – de part et d'autre, c'est sûr – et qui aura marqué un moment fort de la communication. M. Ghannouchi a tenu à préciser que notre administration est formée de hauts cadres dévoués à leur devoir et absolument performants. Personne n'en disconvient. Mais où en est-on de la communication? Sait-on que ce sont justement les hauts commis de l'Etat qui ne communiquent pas ou qui ne le font qu'à travers un langage codé et à connotations rituelles? Autant que la généralisation de l'Internet, nous vivons paradoxalement un repli de la communication. Et ce qu'il en reste ressemble plutôt à une communication frileuse. Et là, ce que nous entendons par communiquer c'est d'abord informer, base première et pilier de la communication. Pourquoi devrons-nous toujours ressentir de la frustration quand des chaînes satellitaires mal intentionnées nous informent parfois de ce qui se passe chez nous, y allant de leur couperet bien préparé et de leurs commentaires fallacieux? Il y a quelques jours une météorite est tombée près de Kairouan, sans dégâts heureusement. Mais une agence de presse saoudienne en a fait son chou gras, parce que les autorités compétentes de chez nous en ont fait l'impasse. Cela prête à équivoque. Et cultiver le mystère, pour rien et sans qu'il y ait quoi que ce soit d'impérieux à cacher, donne libre cours à toutes formes d'interprétations. Fait anodin dira-t-on. Mais un fait tout de même. La vérité est que les Tunisiens sont naturellement curieux parce que notre pays investit dans le savoir. Ils ont assez de discernement pour séparer le bon grain de l'ivraie. Ils se mobilisent pour le bien de leur pays parce qu'ils sont fiers de ses acquis. Ils ne demandent pas mieux que de se réengager dans la vie publique, la vie politique, à donner leur avis dans le cadre de la citoyenneté responsable. Mais ils sont en droit d'être informés. Sainement informés. Quand notre consœur Assabah a informé la première quant aux événements de Slimane, aussitôt relayée par Le Temps, et quand nous avons informé (et commenté) sur la situation autour du bassin minier, nous avons senti à quel point nos lecteurs ressentaient le besoin de se rendre utiles pour le bien de leur nation. Et d'ailleurs, il n'y a pas de tabous: le Premier ministre en a parlé, samedi dernier, réaffirment la solennité d'une communication saine, imbue des valeurs cardinales de la Nation. Il s'agit tout simplement de dire les choses comme elles sont. Et non plus d'attendre que les sons de cloche de l'étranger nous mettent la mauvaise puce à l'oreille. Et c'est là qu'intervient le rôle des hauts cadres, de ces hauts commis avec leur panoplie d'attachés de presse et qui ne sont pas sans savoir que rien de bon ne se fait sans transparence. C'est-à-dire sans communication.