Le nombre d'enfants handicapés intégrés en milieu scolaire ne cesse d'augmenter. Cette intégration représente une première expérience de socialisation en dehors de la famille. Comment concilier handicap et intégration sociale ? Ces enfants à handicap sont-ils bien intégrés dans nos écoles ? Nos enseignants sont - ils bien formés pour bien encadrer ces enfants à besoin spécifique ?
Considérée comme l'une des missions les plus nobles de la prise en charge des handicapés, l'insertion des handicapés est entamée depuis 1991. Leur nombre est passé en moyenne de 10 à 25 en 1991 par an pour atteindre cette année 75 dans les écoles intégrées et 19 dans les classes préparatoires. L'effectif de cette population ne cesse d'augmenter d'une année à l'autre depuis le démarrage du nouveau programme de l'intégration scolaire 2003-2004. Ces enfants handicapés intégrés dans le milieu scolaire apprennent avec les autres élèves. Une équipe pluridisciplinaire de l'Unité régionale de réhabilitation de Sfax a suivi le parcours d'intégration scolaire de deux enfants âgés de dix et onze ans. « Ces deux enfants, souligne N.Ben Jemaâ, ont chacun un retard mental léger avec des troubles affectifs. Ils sont suivis depuis quatre ans. L'enfant de dix ans est en deuxième année et l'autre en troisième année de l'enseignement primaire. On a remarqué que ces deux enfants sont plus ouverts et communiquent mieux avec leur milieu. Ils ont amélioré aussi leurs capacités langagières et communicatives. A l'école, un des deux enfants a développé ses performances scolaires, verbales, logiques et créatives. Ses résultats dans ces trois secteurs se situent dans la moyenne de sa classe. Le deuxième, par contre, n'a développé que le secteur créatif comme le dessin alors que ses résultats par ailleurs étaient très faibles. Les parents du premier enfant projettent l'avenir de leur enfant dans la poursuite d'une scolarité normale même si cela nécessite beaucoup d'efforts pour tous les intervenants. Par contre, les parents du deuxième enfant s'interrogent sur cette intégration sociale, sur l'avenir de leur enfant et s'informent aujourd'hui sur l'existence de structures intermédiaires entre l'école et les centres d'éducation spécialisés qui permettent d'apprendre à lire et écrire. Les instituteurs partagent les mêmes avis des parents. L'enfant intégré pose des problèmes. Il gène le déroulement des leçons et son intégration même sociale est très difficile, nécessite beaucoup d'efforts et des modalités de prise en charge différents pour la réussir. »
Adapter l'école aux besoins des élèves à handicap
Cette intégration des élèves à handicap dans un contexte scolaire ordinaire implique des changements dans la pratique quotidienne des institutions d'accueil en vue de les adapter aux besoins des élèves qui leur sont confiés. L'équipe médicale de L'URR de Zaghouan souligne que « même si ces institutions scolaires ont été bien aménagées, nous n'arrivons pas encore à briser les tabous engendrés par la présence d'un enfant handicapé dans une famille et encore plus à l'école à côté de l'enfant normal. C'est ainsi que la dynamique intégrative que nous retrouvons dans les textes législatifs se heurte dans la pratique à de nombreux obstacles : refus des parents d'accepter l'handicap de leur progéniture, réticence des parents par peur de ne pas pouvoir assumer les crises, les préjugés des autres familles et le manque d'information dans les écoles. Nous essayons avec le concours de l'éducation nationale et les affaires sociales d'offrir un accompagnement approprié susceptible de garantir la qualité de la vie. Cet accompagnement suppose qu'il faut bien diagnostiquer le type d'handicap d'abord, adapter ce handicap au projet éducatif souhaité, préparer l'institution qui va recevoir cet enfant et surtout un suivi périodique pour pouvoir rectifier la méthode de prise en charge si le besoin s'en ressent. Il ressort de notre enquêté que 31 enfants handicapés ont rejoint l'école en 2004-2005, 9 dans une école inclusive et qui sont passée par la commission de l'intégration et 22 dans une école non inclusive et n'ayant pas fait l'objet d'un projet éducatif. 55% des élèves qui ont été intégrés par la commission ont eu un résultat satisfaisant contre 13,6% qui ne sont pas passés par cette commission »
Pour une bonne formation du corps enseignant
L' enquête d'évaluation des connaissances des instituteurs de la région de Sousse sur le programme national d'intégration des enfants porteurs de handicaps dans les écoles ordinaires réalisée, par la DRSP de Sousse, a révélé que « 67% des instituteurs affirment qu'ils ne sont pas suffisamment informés sur ce programme d'intégration d'handicaps, 88% n'ont pas d'idée sur le nombre d'écoles inclusives dans la région de Sousse, 63% ne connaissent pas les différents types de handicaps concernés par ce programme, 66% n'ont pas bénéficié d'une formation spécialisée leur permettant de prendre en charge des élèves handicapés, 85% des instituteurs n'ont aucune idée sur le programme pédagogique individualisé, 60% ne connaissent pas le type de handicap de leurs élèves et 66% des instituteurs trouvent que les aménagements faits dans leurs établissements sont insuffisants ». Ainsi cette enquête montre l'insuffisance de la formation des enseignants des élèves handicapés. La formation pédagogique du corps enseignant, le renforcement des échanges entre l'équipe médico-scolaire et les instituteurs, l'équipement des écoles par des outils adéquats d'accompagnement et un suivi régulier sont nécessaires afin de soutenir cette intégration et favorise l'épanouissement de ces jeunes à besoin spécifique. Une prise en charge multidisiplinaire pédiatrique, psychologique, psychomotrice, orthophonique peut déceler les troubles associés et favoriser ainsi leur intégration harmonieuse.