Le Temps-Agences - En l'espace de quelques heures, les Etats-Unis et l'Iran ont fait assaut d'inhabituels gestes d'ouverture, tout en les conditionnant, chacun, à un changement d'attitude de l'autre. Lors de sa première conférence de presse en tant que nouveau chef de la Maison blanche, Barack Obama a dit entrevoir lundi soir de possibles "ouvertures diplomatiques" vers la République islamique avec laquelle Washington a rompu ses relations il y a 30 ans. Ces ouvertures, "qui peuvent être créées dès que nous commencerons à nous asseoir face à face à une table", devraient permettre, a dit Obama, "d'engager notre politique dans une nouvelle direction", alors que la présidence de George Bush a été marquée par un bras de fer avec la République islamique. A l'occasion du 30e anniversaire de la Révolution islamique à Téhéran, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a répondu hier en se disant prêt à des discussions directes avec les Etats-Unis sur la base du respect mutuel s'il y a un changement fondamental d'approche de la part de Washington. "Il est très clair que ce changement véritable doit être fondamental et non pas tactique. Il est clair que la nation iranienne accueillerait favorablement de vrais changements", a dit le président iranien, qui devrait briguer un nouveau mandat présidentiel au printemps prochain. Obama s'est dit prêt à "adopter à l'égard de l'Iran une approche qui fait appel à toutes les ressources dont disposent les Etats-Unis", tout en réaffirmant que l'Iran devait renoncer à se doter de l'arme atomique, ce qu'il nie vouloir faire. Obama a en outre engagé l'Iran à cesser de soutenir des organisations, comme le Hezbollah libanais et le Hamas palestinien, et à renoncer à son "discours belliqueux" envers les Etats-Unis et Israël. En janvier, Obama avait déclaré tendre la main de la paix à l'Iran si celui-ci "desserrait le poing". Ahmadinejad avait répondu en réclamant le départ des troupes américaines d'Irak et d'Afghanistan et des excuses pour les "crimes" américains contre l'Iran. "La nation iranienne est prête à des pourparlers, mais à des pourparlers dans un climat de respect et de loyauté réciproques", a dit hier Ahmadinejad, sans faire preuve de son habituelle intransigeance. "De prime abord, cela semble un signal significatif, une ouverture qui encouragera l'administration Obama à penser que les Iraniens sont vraiment prêts à discuter", a estimé Paul Salem, directeur du Carnegie Middle East Center de Beyrouth. Mais il reviendra en dernier ressort à l'ayatollah Ali Khamenei, Guide suprême de la Révolution iranienne, de décider s'il y a lieu de laisser s'amorcer cette réconciliation historique entre les deux pays. Le guide sûprème, qui observe pour le moment un mutisme total sur les ouvertures d'Obama, a l'habitude de rechercher un consensus parmi l'élite politique. Or les relations avec les Etats-Unis sont un sujet sensible parmi la classe politique à l'approche des élections présidentielles de juin, où Ahmadinejad affrontera l'ancien président Mohammad Khatami, un partisan de la détente avec l'Occident. La proximité de ce scrutin n'est peut-être pas étrangère aux propos conciliants d'Ahmadinejad et il est possible qu'en attendant son issue, les Etats-Unis comme l'Iran mesurent chichement leurs gestes de rapprochement.