C'est l'éternelle question demeurant jusque-là sans réponse : bouteille à demi vide ou à demi pleine ? Deux écoles s'affrontent défendant chacune, avec forte argumentation, leurs points de vue diamétralement opposés. Le suicide dénote-t-il de la lâcheté, de la fuite en avant, à affronter les aléas et difficultés du quotidien, un défaitisme en quelque sorte, ou au contraire, s'agit-il d'un signal fort de courage, de témérité lancé en pleine figure à ceux ayant été à l'origine d'une pareille sentence irréversible et ce par leurs intolérance, incompréhension, méchanceté ?
Le suicide se définit comme étant le meurtre de soi. Mais il est d'usage de distinguer le suicide au sens strict, acte réussi sanctionné par la mort ; la tentative de suicide, geste incomplet en raison de la survie du sujet ; la velléité de suicide, une action à peine ébauchée ; et enfin l'idée du suicide, simple représentation de l'acte, sous-tendue par un désir plus ou moins intense de périr. En fait, la velléité ou la tentative d'autolyse, ont souvent la même signification que le suicide si ce n'est un résultat identique. Cependant, faire la part entre suicide sincère et conduite suicidaire « chantage » se révèle de la plus haute complexité, voire une entreprise fort périlleuse, car la gravité ou la bénignité apparente des conséquences de l'acte suicidaire ne reflètent pas exactement les intentions réelles de la personne : la tentative n'est souvent qu'un suicide que l'on a empêché d'aboutir. En parallèle, celui qui use du chantage comme moyen de pression, peut se mélanger les pinceaux sur les risques encourus et passer de vie à trépas sans l'avoir vraiment souhaité.
Circonstances des suicides Si le nombre des tentatives ne cesse de croître, il est heureux de constater que les issues fatales en découlant ne suivent pas la cadence, et demeurent bien en deçà. S'agissant d'un phénomène social répandu dans bien des pays, la diffusion par les médias de l'information relatant complaisamment les tentatives de suicide, favoriserait les réactions d'imitation chez les sujets fragiles, particulièrement les adolescents.
On déplore en moyenne un suicide « réussi » pour huit tentatives ! Dans 75% des cas, le suicide vrai intéresse les hommes dans la deuxième moitié de la vie. On enregistre les tentatives surtout chez les ados et dans la première jeunesse côté femmes. Chez les vieillards, l'acte est généralement fatal. Le niveau intellectuel, les acquisitions scolaires et professionnelles ne semblent pas jouer un rôle déterminant ; pareil pour le célibat et le mariage avec ou sans enfants. Une variante toutefois, chez les étudiants (es), le suicide semble particulièrement fréquent, favorisé par le surmenage, l'abus des drogues excitantes, l'insuffisance de sommeil, et les échecs sentimentaux. Dans l'ensemble, le petit matin et la fin de la journée sont les horaires de prédilection des actes d'autodestruction.
Moyens utilisés Ils sont aussi diversifiés qu'infiniment variés ; mais les intoxications tiennent de loin le haut du pavé comme moyens privilégiés : médicaments à tropisme cardiaque, barbituriques, tranquillisants, sédatifs, analgésiques, etc. Puisés souvent à l'aveuglette dans l'arsenal pharmaceutique familial, mais aussi insecticides, raticides, produits de nettoyage ; section des veines du poignet. La règle classique, « aux femmes le poison, aux hommes la violence : pendaison, défenestration, usage d'armes à feu, immolation par le feu, automutilation, utilisation d'engins broyeurs (train, marteau pilon, étau) se trouve souvent respectée.
Attitude à adopter Toute conduite suicidaire doit faire l'objet d'un examen médical psychiatrique. Quelques règles à suivre par l'entourage : s'abstenir de réactions agressives, coléreuses ; ne pas ridiculiser le candidat ou le provoquer avec sadisme en le traitant de comédien (il récidiverait en se munissant de plus d'atouts !). Lui laisser une porte de sortie honorable lui permettant de sauver la face ; se montrer disponible, attentif à ses problèmes, et prêt à l'aider à les surmonter. Cette attitude de compréhension n'autorise pourtant pas à la capitulation sur tous les points. Il ne faut pas qu'il manie la menace de suicide comme une épée de Damoclès pour terroriser son entourage et le faire plier. Pour conclure, nous dirons ceci : Ne pas dicter sa conduite au suicidant, mais favoriser en lui une sorte de maturation psychologique avec renforcement de ses défenses qui devraient aboutir à une meilleure adaptation à son milieu. Ce qui compte, c'est de bien pénétrer la signification de l'acte, qui doit être appréhendé comme un pathétique et pressant appel à l'aide, donc un besoin urgent de communiquer avec autrui.