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L'implantation anarchique des souks hebdomadaires
Publié dans Le Temps le 18 - 03 - 2009

Des centaines de souks (marchés hebdomadaires) fonctionnent en Tunisie aussi bien en milieu rural qu'aux environs des grandes villes. Ils sont devenus si nombreux que presque chaque commune a son propre souk de façon que l'on peut trouver souvent un souk tous les 5 ou 6 kilomètres.
Pour ne citer qu'un seul exemple, dans le gouvernorat de Ben Arous, les délégations de Megrine, Radès, Ezzahra, Boumhel, Mornag et Hammam-Lif, ont chacune un souk hebdomadaire, alors qu'elles ne sont séparées l'une de l'autre que d'une distance de 3 à 4 kilomètres. Malgré les changements et l'évolution des modes d'achat des Tunisiens, les souks gardent toujours une notoriété intacte et surtout une place bien privilégiée surtout chez les catégories sociales modestes pour l'ambiance qui y règne et surtout pour les bonnes affaires que ces gens peuvent réaliser. C'est dire combien ces souks sont ancrés dans nos traditions au point que le jour du souk est devenu un rendez-vous incontournable pour des clients fidèles qui viennent d'horizons divers et parfois des régions lointaines pour s'approvisionner en produits alimentaires, électroménagers, et autres fournitures diverses. Qu'il pleuve ou qu'il vente, les ménagères habituées à ces souks ne ratent jamais le rendez-vous qu'elles attendent impatiemment pour faire leurs emplettes hebdomadaires. On dirait que c'est un grand centre commercial provisoire où des commerçants, des artisans, des marchands des quatre saisons viennent dresser leurs tentes pendant une journée pour écouler leurs marchandises. Cependant, ces espaces, malgré les services rendus, demeurent mal organisés, mal géré par les responsables à qui incombe de veiller sur le bon fonctionnement de ces souks hebdomadaires.

Un calvaire pour les riverains
Ces souks doivent se tenir généralement sur des terrains vagues ou dans des espaces verts situés aux portes des villes et loin des zones d'habitation. Mais avec l'expansion des villes, certains souks s'implantent au centre de la ville, occupant les trottoirs de ses grandes artères ; même les petites ruelles et les impasses sont conquises par les vendeurs qui étalent leurs marchandises à même le sol. Inutile de parler du calvaire vécu chaque semaine par les centaines de riverains pour sortir ou rentrer à leurs maisons, la circulation des voitures étant bloquée.
Fethi, habitant de Boumhel à l'endroit même où vient s'installer chaque mercredi le souk hebdomadaire : « Chaque semaine, nos enfants vivent un calvaire, ils doivent aller à pied pour accéder au collège ou au lycée situés de l'autre côté de la ville, ni voiture, ni bus ne peut circuler le jour du souk ; les habitants motorisés doivent faire un long contour pour regagner leurs maisons ! Le choix de cet endroit pour en faire un souk est arbitraire ! » Toutefois, le malheur des uns fait le bonheur des autres : l'installation des stands et des étalages devant les maisons ne semble pas gêner certains habitants qui trouvent l'occasion de transformer leurs garages ou une partie de leur jardin en dépôts pour les commerçants de fripes ou de produits d'exportation ou, par la force des choses, ils deviennent à leur tour des commerçants occasionnels exposant sur le seuil de leurs portes. Parfois même, une certaine connivence tacite s'établit entre les riverains et les vendeurs. Comme nous l'a indiqué Adel, un habitant dans un quartier populaire où se tient chaque samedi le souk d'Hammam-Lif : « Il n'y a aucun problème avec les marchands, la plupart des riverains sont coopératifs avec ces vendeurs. Ils sont là pour gagner leur pain, à pourquoi les en empêcher. Et puis, c'est une animation de notre quartier populaire qui n'a aucune autre activité à part ce rassemblement commercial ! » Mais là où le bât blesse, c'est lorsque le brouhaha des foules de gens s'élève, les vendeurs poussent leurs cris hystériques en même temps pour vanter leurs produits et attirer plus de chalands, les disputes se déclenchent entre vendeurs et clients et le son strident des chansons populaires émane des haut-parleurs, tout cela crée certes une ambiance, mais pourrait nuire aux habitants du voisinage parmi lesquels se trouveraient des malades ou des personnes âgées ayant besoin de repos et de tranquillité.
Mourad habite dans un quartier populaire où s'installe le marché hebdomadaire : « Chaque semaine, les trottoirs sont envahis par les marchands qui ne cessent d'interpeller leurs clients à la criée du matin jusqu'à la fin d'après-midi sans compter le son de musique qui vient de tous les côtés ; j'ai des parents malades qui habitent chez moi, ils sont vraiment gênés par ce grand tumulte et mon bébé ne peut pas dormir tant qu'il y a du bruit ! A part cela, il faut voir en quel état les vendeurs laissent les trottoirs ; un amas de déchets, de cartons et de sachets éparpillés ça et là et il faut attendre le lendemain pour que la municipalité vienne nettoyer les lieux ! »

La loi des « Mekkassas »
Selon la réglementation, l'espace réservé au souk hebdomadaire est loué par adjudication que la municipalité attribue chaque année au plus offrant et c'est ce locataire qui se charge de la gérance du souk. Chaque commerçant doit payer les quelques mètres carrés qu'il occupe le jour du marché ; il y a des agents (appelés communément Mekkassas) chargés de percevoir les droits d'étalage. Là encore, c'est le chaos. Le prix des places occupées par les marchands varie selon la superficie, l'emplacement, la nature de la marchandise. Mais ce n'est pas ainsi dans la réalité, car tout dépend de l'humeur de ces « percepteurs » et des relations qu'ils entretiennent avec les vendeurs. De l'avis de la majorité des commerçants interrogés, ce sont des agents sans scrupules, qui n'hésitent pas à malmener, en paroles comme en action, les vendeurs qui veulent discuter le prix ou demander de payer quelques heures plus tard. En général, ils fixent les prix des places à la tête du client. Pour le même périmètre, ils peuvent demander deux prix différents, selon la nature du commerce. Ainsi, un vendeur de produits importés paie plus qu'un vendeur de fripes ou d'épices, par exemple. Rien qu'un simple malentendu entre ces agents et les différents marchands conduit à de vives altercations accompagnées souvent de paroles malsaines sans aucun respect envers les clients formés essentiellement de femmes ménagères, de petits enfants accompagnés de leurs parents et de personnes âgées. Habib, est un vendeur de vieux livres qu'il étale à même le sol nous a informés : « Ces agents font la pluie et le beau temps dans le souk ; ils viennent à trois ou à quatre ensemble en semant la terreur parmi les marchands ! On n'a pas le choix : on paie le prix qu'ils ont fixé ou bien ils vous saisissent l'un de vos produits. Pour peu que vous changiez de place ou que vous amélioriez votre étalage, ils vous augmentent le prix ! Tout le monde s'en plaint ici ! ... » D'ailleurs, tous les vendeurs interrogés ont confirmé les paroles de Habib. Comme cette femme, Jalila, vendeuse de fripes qui garde la même place depuis quatre ans. Elle a affirmé : « Je payais le même prix depuis longtemps, la marchandise étant exposée à même le sol ; mais le jour où j'avais mis la marchandise sur ce piédestal que vous voyez pour éviter la boue en cas de pluie, ils sont venus pour exiger une augmentation du prix de l'étalage, prétextant que mon commerce est devenu florissant ! » A la question : « Est-ce que vous recevez un reçu en contrepartie ? », tous les commerçants ont répondu par la négative. Mais il faut dire que ces « Mekkassas », d'après les témoignages recueillis, préfèrent surtout les Tunisiens émigrés qui viennent revendre leurs marchandises importées, surtout pendant la saison estivale. Ces derniers sont une véritable vache à lait ; ils doivent payer sans discussion avec ces agents malveillants et redoutables !

Absence de sécurité et de commodités
Durant notre promenade dans plusieurs souks, notamment dans la banlieue sud de la capitale, nous avons remarqué l'absence flagrante de deux éléments, pourtant essentiels dans de tels rassemblements commerciaux, à savoir : la sécurité et les commodités (eau et toilettes). Les vendeurs, formés d'hommes et de femmes, sont obligés de frapper à la porte des habitants riverains ou entrer dans un café à proximité pour pouvoir prendre de l'eau ou aller aux toilettes. Sur ce point, Fethi, vendeur d'articles de bricolage au souk d'Hammam-Lif insiste sur la nécessité de doter ce grand souk visité par des milliers de clients d'un poste de police et d'un bloc sanitaire : « C'est répugnant de voir des vendeurs aller pisser sous les murs ou derrière un arbre aux alentours des lieux. Et puis, il faut voir le souk à partir de quatre heures qui s'emplit de clochards et d'ivrognes, alors qu'il n'y a aucun agent de sûreté pour intervenir en cas de disputes qui pourraient se déclencher à tout moment ! Sans parler des vols commis dans les différents stands ! C'est pourquoi, certains commerçants préfèrent plier bagages et rentrer tôt pour éviter les problèmes avec ces énergumènes ! » Une autre anomalie a été remarquée dans tous les souks visités qui a trait à la sécurité sanitaire des aliments et des produits exposés. On y trouve de tout : des vendeurs occasionnels de casse-croutes sous forme de « mlaoui » et de « chapati » et d'autres petits commerces de « gâteaux » home made qui échappent à tout contrôle sanitaire. Farhat, un habitué des souks fait remarquer : « Aucun contrôle sur les produits exposés ; les marchands de produits cosmétiques se permettent de vendre des médicaments importés (pommades et lotions pour beauté) qui, à force d'être exposés au soleil, deviennent nocifs ou, souvent, ils sont tout simplement périmés. Il en est de même pour les articles électroniques ; le client peut en acheter, attiré par le bas prix, mais à ses risques et périls ! Je me demande si les souks, ces grands lieux de commerce, ne font pas partie des prérogatives de l'Organisation de Défense du Consommateur ou de celles de la Santé Publique ! Pourtant des milliers de clients fréquentent les souks dans tout le pays ! Je crois que ce secteur est en proie à un grand chaos ! »
« Chaos ». En effet, c'est le mot ! Du moment que le rôle des municipalités se borne à la location des lieux qui restent à la merci d'une poignée de « Mekkassa » sans scrupules qui n'arrêtent pas de harceler les commerçants pour les obliger à fléchir devant leurs « lois ». Ce sont les autorités locales qui doivent intervenir efficacement pour organiser ce secteur, ô combien vital, pour des milliers de familles modestes qui y vivotent.


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