La paternité se nourrit nécessairement de nos souvenirs d'enfance quand notre propre père régnait en chef de famille à l'autorité inébranlable et facilement acceptée par toute la famille. Elle était pratiquement fondée sur les sentiments plutôt que sur le partage équitable des responsabilités parentales et tâches familiales qui pesaient avec acuité sur la maîtresse de maison. Oui, c'était notre mère qui accusait le coup, s'occupant toute seule des tâches ménagères, et le cas échéant, de ses obligations professionnelles. Elle était le pilier central du foyer conjugal. Tout reposait sur ses frêles épaules. Elle se devait de penser à tout. Mais force est de reconnaître que l'évolution des mentalités commence à primer dans la société arabo-musulmane qui voit à présent le père s'impliquer davantage en participant activement à l'éducation des enfants et avec plus ou moins d'enthousiasme dans certaines tâches domestiques. Il y a comme une prise de conscience et une volonté manifeste de partage des corvées qui étaient naguère l'apanage de la femme. Et, c'est tant mieux pour les jeunes couples non encore gangrenés par les traditions obsolètes qui conféraient de nombreux avantages à l'homme au détriment de la femme. La donne a certainement changé et la balance est devenue plus équilibrée. Néanmoins, faut-il avoir peur de la paternité par les temps qui courent ? La question mérite d'être posée car de plus en plus de jeunes retardent cette échéance naturelle pour moult motifs dont ceux qui ont trait aux finances. Aujourd'hui, des couples aux revenus conjoints modestes sont acculés à faire des choix douloureux en repoussant de quelques années, le mariage, voire la naissance de leur premier enfant. Tout cela au profit de leur confort. L'appartement ou la villa, la voiture, la chambre à coucher et le salon haut de gamme et tout l'électroménager de la cuisine sont devenus la priorité absolue. Convoler en justes noces, procréer passent en second plan. Même ceux qui parviennent à fonder un foyer, réfléchissent longtemps avant de se décider à assurer des responsabilités parentales. Oui, certains ont peur d'être père bien que l'aventure les tente. Ce sont des conséquences de la paternité qu'ils redoutent, d'autant plus que les tracasseries financières que cela engendre les harcèlent. Leur liberté d'action prendra un sérieux coup car il faudra s'occuper de l'enfant, quel que soit son rang. Il limitera bien sûr les sorties du jeune couple, nouvellement marié. « La paternité, ça ne se règle pas en un claquement de doigts. Il faut s'y engager au meilleur de ses capacités. Vous ne perdez rien pour attendre ! », s'est exclamé Ali, un jeune de 26 ans, qui n'a pas caché sa peur d'assumer cette responsabilité parentale dans un proche avenir. Sa jeune épouse, à ses côtés, a acquiescé par un hochement de tête suggestif avant qu'il n'enchaîne. « Soyons clair : devenir père, c'est une décision à la fois toute personnelle et conjointe que l'on doit prendre normalement en toute sérénité à un moment précis ». Les intentions de ce couple sont clairs : se sentir père assez tard comme si la paternité est devenue une tare indispensable.