Cette année, les feuilletons ramadanesques sont sortis de leur carcan habituel et ont apporté de nouveaux thèmes et de nouvelles approches. En effet, les grands absents des dramatiques télévisées sont la campagne et les patelins, les luttes pour un bout de terre, les dialogues datant du siècle dernier et les sujets limités au divorce, à l'opposition campagne/ville et la lutte des classes. Le public a eu droit cette année à un traitement moderne et osé de la société tunisienne et à une intrusion dans deux mondes occultes : " la richesse " sans effronterie et la drogue. Du neuf et du réel, et l'audience accroche enfin. Une réconciliation avec le petit écran? Il faut de tout pour faire un monde. La société tunisienne présente différentes catégories de personnes, des mentalités opposées, des classes sociales séparées et des univers diversifiés. Longtemps, les feuilletons se sont intéressés à deux univers: d'un côté la cité et ses problèmes sociaux de manque de communication, d'ambition, d'esprit arriviste, et de l'autre la campagne et son isolement par rapport au reste de la société tant au niveau des mentalités que de la culture. Le cadre temporel s'est libéré de la nostalgie d'une 'époque révolue, celle du raffinement tunisois et de la médina, flamboyant cœur de la vie tunisoise. La Tunisie contemporaine, n'est plus celle de dix ans en arrière. Les hommes de théâtre et de cinéma le savent puisqu'ils sont les fins observateurs des mutations de la société. En effet, la nouvelle génération de réalisateurs et de scénaristes entre enfin en scène pour donner un souffle nouveau à la fiction dramatique. L'année dernière, "Sayd Errim" , feuilleton réalisé par Ali Mansour (qui n'est pas de la nouvelle génération) et diffusé sur Tunisie 21 a créé l'évènement en s'intéressant à une réalité oubliée : celle du harcèlement sexuel moral et l'exploitation des jeunes filles des usines de confection. Un grand sujet intelligemment traité et des situations bien présentées que le public a bien suivis.
Cette année, Rebelote Cette année, c'est "njoum ellil" qui crée l'évènement et fait parler de lui. Feuilleton réalisé par Medih Belaid et diffusé sur Hannibal TV, "n'joum ellil" a misé sur les jeunes talents et sur un sujet classique : l'opposition de " riches " avides d'argent et de pouvoir et les modestes simples et intègres. La réalité à laquelle s'intéresse ce feuilleton est celle de la corruption dans le domaine du bâtiment, le règne de l'argent sale et l'escroquerie, la drogue chez les jeunes, la misère morale des jeunes ambitieux mais pauvres, la mort des principes et de la morale... des éléments qu'on remarque tous les jours dans notre société mais qui ne sont pas traités sur écran. Le ton et les dialogues sont aussi fidèles à la réalité tunisienne même si on leur reproche une certaine violence. Avec des thèmes et des dialogues bien issus de la vraie vie quotidienne du Tunisien, "n'joum ellil" retient l'attention et se rapproche du téléspectateur bien que la fin soit prévisible : le triomphe du bien sur le mal. Citons aussi "Maktoub" réalisé par Semi Fehri qui revient dans un deuxième volet avec un caractère plus policier. Si lors du premier volet il a osé traité du statut de la fille noire de peau dans la société tunisoise et le statut de la mère célibataire, dans le deuxième il a osé montrer la réalité des jeunes filles qui se font entretenir par les vieux riches, celles qui échappent à la misère par tous les moyens. La drogue aussi est montrée du doigt et la criminalité est bien présente avec les meurtres et le trafic . Dommage que le feuilleton ait viré vers la fiction pure et commence à tomber dans le piège du rallongement des histoires. Avec un souffle nouveau sur les thèmes et la réalisation et la libération des sujets figés, les dramatiques tunisiennes renouent avec le téléspectateur tunisien qui délaissera ainsi les productions égyptiennes et turques qui, ne sont pas meilleurs aux nôtres.