Y avait-il préméditation dans l'agression qui a coûté la vie à un jeune homme d'une trentaine d'années ? D'après l'avocat de la défense il s'agit tout simplement de coups et blessures qui ont entraîné la mort, alors que le procureur de la République était convaincu que l'intention de donner la mort était bel et bien prouvée. Entre cette dernière thèse et la première, la Cour avait donc à trancher. Selon l'enquête préliminaire, un témoin, présent lors des deux phases du drame, a affirmé que le meurtrier et la victime, issus du même quartier, ont eu une première prise de bec au point d'en venir aux mains, mais ils ont été séparés par certaines bonnes âmes qui ont assisté à l'altercation, le meurtrier rentrant manifestement chez lui, tandis que son rival est allé s'attabler au café-maure du coin. On a bien cru dès lors que tout était rentré dans l'ordre, d'autant que le jeune homme du café semblait avoir oublié cet épisode, essentiellement à sa façon de plaisanter avec certains clients. Pas pour le rival, en tout cas, il est en effet revenu chercher son adversaire armé d'un couteau et d'une hache. Ses intentions étaient on ne peut plus claires, des intentions qui se sont matérialisées par un coup de hache, un seul coup, porté apparemment avec une force incroyable. Une fois son forfait accompli, et voyant que son rival saignait abondamment, l'agresseur a alors pris la fuite pour aller chercher refuge quelque part, chez des parents. Pendant ce temps, les témoins ont alerté les auxiliaires de la justice, lesquels sont venus rapidement, en même temps que l'ambulance qui devait transporter la victime à un établissement hospitalier de la place. Malheureusement, cette dernière allait succomber suite à une hémorragie. L'enquête qui a démarré au même moment, allait aboutir à l'arrestation de l'agresseur, lequel a donné une tout autre version des faits. D'après sa déposition, il a participé ce jour-là à une beuverie au cours de l'après-midi pour ne songer à rentrer chez lui qu'une fois la nuit tombée. Or à son arrivée il aurait été accosté par la victime qui l'aurait provoqué au sujet d'une ancienne histoire qu'il a lui-même pourtant enterrée. Il a d'ailleurs fait mine d'ignorer la provocation et de passer sa route, mais son rival, qui était accompagné par son frangin au moment des faits, allait poursuivre la provocation sur un ton qui ne lui a pas du tout plu et l'a fait sortir de sa réserve allant jusqu'à riposter vigoureusement en sautant sur son adversaire. Ce dernier fort de l'appui de son frère allait prendre le dessus et le faire tourner en dérision en présence de plusieurs témoins, lesquels ont fini cependant par les séparer. Mais le mal était déjà fait, pour lui, car il n'a pas accepté la façon dont il a été traité par son adversaire et, surtout, les insinuations qu'il n'a pas manqué de lancer au sujet de sa virilité ! Encore sous le choc, et non moins frustré, puisqu'atteint dans son honneur, il est allé chez lui chercher une arme, déterminé à administrer une belle leçon à son adversaire. Toujours selon l'accusé, jamais, il n'avait songé à tuer son adversaire, mais tout simplement à lui donner une leçon ! C'est, en tout cas, le débat qui s'est engagé à l'audience pour savoir s'il y avait préméditation ou pas, l'avocat de la défense soutenant que son client avait agi sous le coup de la colère et de la frustration, cependant que le procureur affirmait que l'intention de tuer était bel et bien prouvée. La Cour allait finalement trancher en condamnant l'inculpé à la perpétuité...