Ça bêle partout et les excréments des moutons jonchent le sol partout. A l'occasion de l'Aïd, on se permet tout : les marchands s'implantent là ou ils veulent, sur des terrains nus et sur des trottoirs quand ils n'en trouvent pas. En ce moment de tolérance, on aménage des espaces de fortune pour faire fortune, le paysage des villes et des quartiers se transforme complètement, il devient comparable à celui des campagnes, pour le pâturage. Il n'y a pas lieu à s'inquiéter, on en crée par les bottes de foin qui participent à rendre les lieux encore plus malpropres. On patauge dans la gadoue en somme. Lotfi, habitant d'un immeuble, nous fait part de son indignation quant à ce laisser-aller de la part des autorités municipales. " regardez ce marché installé devant chez nous, sur le trottoir d'en face, est-ce logique qu'on laisse ces marchands occuper cet endroit. On ne trouve plus de place ni pour marcher, ni pour garer nos voitures, le quartier devient vraiment inhabitable à cause du bêlement des moutons, des cris des marchands et du va et vient. " Un autre citoyen, Noureddine se plaint d'autre chose non moins gênant. " Croyez-moi, si j'avais une autre résidence, j'aurais quitté ma demeure pendant cette période à cause des escaliers crasseux. Ma femme est astreinte à la corvée au quotidien, puisqu'on on entre avec des chaussures sales, les résidents refusent d'évoluer, de changer de mentalité. Ils ne comprennent toujours pas que quand on habite dans un immeuble, il faut changer d'habitudes.Ils achètent leurs moutons une semaine avant la fête voire plus au lieu que ce soit la veille, la cohabitation avec ces gens-là est difficile. " Dans les quartiers populaires la situation est encore pire. " Mon voisin, nous affirma Ali, a transformé son garage en marché, il nous rend la vie dure." A la rue Zaouia El Bekri, un menuisier a fait pareil, son atelier est entassé de moutons. De même à la rue El Hafir de Bab El Khadra, la petite place utilisée comme un parking a changé de vocation et les voitures sont supplées par les moutons. A la cité Ibn Khaldoun, un manège subit le même sort. A tout cela, il faut ajouter le nombre des aiguiseurs des couteaux qui contribuent largement à ce chaos. " Ce sont des spéculateurs qui profitent de l'occasion en rapprochant la marchandise aux clients pour leur éviter de parcourir de longues distances. Mais en contre partie, ils la leur vendent chèrement, nous dit Moncef. " Les garages ne sont pas utilisés seulement pour la vente des moutons, mais également pour celle du foin. Après l'Aïd, les municipalités seront invitées à redoubler leurs équipes d'éboueurs pour enlever les tonnes d'ordures et remettre les villes à neuf.