L'équipe de Tunisie a terminé le premier tour de la CAN sans connaître la moindre défaite : trois scores de parité en autant de rencontres. Cela ne l'a pas empêchée de terminer à la dernière place du groupe D alors que ses concurrents ont connu chacun une défaite. Le football est ainsi fait, pourtant il nous aurait suffi d'une victoire face à la Zambie ou devant le Gabon pour que notre onze national termine à la première place et poursuivre un parcours à la mesure de nos attentes. Que nos représentants aient réalisé une bonne prestation face aux Camerounais, cela ne nous empêche pas de reconnaître que notre football a failli à sa mission en l'espace de moins de deux mois en accusant deux éliminations en coupe du monde d'abord et en compétition africaine ensuite. A présent, il faut tourner la page et réfléchir sur l'avenir de notre football à l'horizon 2012. C'est là le moyen terme en attendant le long terme à savoir le mondial 2O14 sachant que le chemin menant à la qualification va s'avérer plus difficile qu'il l'a été jusque là. Il appartient aux décideurs de se pencher sur le futur de notre football et quand nous disons décideurs, nous faisons allusion aux techniciens tunisiens qui sont légion chez nous et dont la compétence et la longue expérience leur permettent de repenser la gestion de notre sport numéro un au niveau des clubs comme au niveau de nos sélections représentatives. Rafik BEN ARFA ----------------------------------------- Ridha Akacha: (ex international) : « Des changements, il y'en aura mais avec quel entraîneur? » « Continuer avec ce groupe ou reprendre le travail depuis le début ? Je pense que pour répondre à cette question il faut prendre en considération le but et l'échéance de cette équipe. Je sais que notre prochain rendez-vous officiel sera la coupe d'Afrique des Nations et il faudrait se préparer en conséquence. Sinon, je pense qu'avant toute chose, il faudrait résoudre la question de l'entraîneur et se poser la question concernant la permanence ou le départ de Faouzi Benzarti à la tête de l'équipe nationale. En ce qui concerne ce dernier, je pense qu'il est en train de découvrir cette équipe et je pense qu'il doit être déçu par le comportement de cette formation et surtout de certains joueurs. A vrai dire, il ne connait pas trop bien les joueurs. Il les a vus jouer à deux reprises en aller et retour quand il est sur le banc de l'Espérance, sans plus et je pense que c'est trop peu pour pouvoir porter un jugement définitif sur tel ou tel joueur. Il a eu peu de temps pour composer la liste de joueurs qui ont disputé cette C.A.N, mais je pense que certains éléments, actuellement hors liste, méritent de faire partie de cette équipe. Je pense aux Olympiques qui, depuis trois générations, sont en train de bien faire. J'estime qu'après cette coupe d'Afrique, des changements vont avoir lieu car certains joueurs sont saturés à l'enseigne des Jemâa et Haggui. Le Onze national n'a plus de leader. Face au Gabon, j'ai vu un Ragued prendre en charge au premier poteau le Gabonais Cousin qui le dépasse de plusieurs centimètres. Un capitaine et un leader aurait tenu pleinement son rôle en évitant ce genre de placement, mais apparemment, chacun pense à sa propre personne avant de penser au groupe. Je sens que cette équipe piétine. Est-ce parce qu'il y a eu surcharge de travail au cours des stages ? C'est la question qui me turlupine. J'ai même vu un Mikari traînant la patte et incapable de tenir son rôle de latéral. Sinon, c'est une équipe composée de joueurs qui ne font pas la différence. Je pense surtout aux joueurs sensés encadrer les jeunes qui commencent l'aventure avec l'équipe nationale. Quoi qu'il en soit, des changements, il y'en aura et c'est logique au vu du rendement de certain joueurs mais tout cela se fera avec quel entraîneur ? C'est la question qui revient le plus à mon esprit... Mourad AYARI ----------------------------------------- Taoufik Belghith (Ex international ) : « Refonte est nécessaire » « J'irai droit au but pour vous dire qu'il ne faut pas condamner irrémédiablement cette équipe composée de joueurs qui pourraient un peu plus tard nous valoir quelques satisfactions. Je dirais également qu'il ne faut guère demander l'impossible à cette jeune équipe composée d'éléments qui peuvent s'améliorer. Il ne faut pas tout jeter et recommencer, mais reconstruire autour des M'Sakni, Darragi, Ifa, Souissi, Dhaouadi, Jmal, Chermiti et Mikari. Sinon, il faut qu'on se le dise, notre football est malade depuis un peu plus de dix ans. Beaucoup de facteurs nous ont amené à cette situation. J'en citerais en premier lieu les centres de formation que je qualifierai de fictifs. Que fait-on au sein de ces sites ? Rien d'intéressant. On se contente d'héberger des joueurs de l'Afrique noire que l'on gave à volonté pour les revendre après. Pour le reste, rien de bien particulier et puis il ne faut pas s'attendre à voir ces centres vous fournir des joueurs de qualité puisque les jeunes sont pris en main par des entraîneurs qui ont certes le 3ème degré mais qui n'ont jamais joué au football. Les jeunes ont plutôt besoin d'un ex joueur, enfant du club qui soit un modèle sur tous les plans et qui soit capables de leur inculquer certaines choses qu'un diplômé ne saurait faire. Le vrai geste technique, c'est du ressort d'un ex joueur qui a fait ses preuves et qui a tout démontré... La Tunisie éliminée au 10èr tour de la CAN et pas qualifiée pour la coupe du monde, il ne faut pas s'en étonner. Il faut savoir que les équipes africaines se sont améliorées alors qu'en Tunisie, nous sommes en train de faire du sur place. Ne me traitez pas de passéiste car je sais de quoi je parle. J'étais délégué de l'équipe senior du temps de Scoglio. A l'époque, les joueurs de l'équipe nationale quittaient le lieu de rassemblement après le dîner. J'en avais parlé avec les responsables du football tunisien. Après cela, il y'a eu une réunion à l'issue de laquelle, on m'avait évincé...Habib Mejeri qui était l'adjoint de Scoglio peut vous confirmer mes propos. En somme, je considère que la situation actuelle de notre football est des plus logiques. Les trois qualifications successives à la coupe du monde n'ont fait que cacher le disfonctionnements de nos institutions sportives. La refonte doit être faite en profondeur mais avec les joueurs que je viens de citer car ils ont des qualités et ils sont jeunes. » M. AYARI ----------------------------------------- Mrad Mahjoub (ex-sélectionneur national, entraîneur de la JSK) : « Maintenir Benzarti au poste et lui laisser le temps » « Ce que je trouve positif dans notre participation à cette CAN, c'est la progression des joueurs et du collectif d'un match à l'autre. Il est évident pour tout technicien que des joueurs alignés, pour la première fois ensemble, ne peuvent pas bien se connaître. Les automatismes manquent. Faouzi connait certains joueurs mais pas la totalité pour faire les meilleurs choix possibles. Grâce à un joueur comme Chawki Ben Saâda incorporé en seconde mi-temps, nous avons pu avoir une meilleure maîtrise au milieu alors qu'on perdait le ballon trop rapidement durant la période initiale. Pendant cette CAN, l'équipe a pu trouver un équilibre global sur lequel on peut asseoir un travail sérieux. Je pense qu'il y'a eu trop de mauvaises réactions concernant les joueurs évoluant à l'étranger. Ça nous appauvrit de les éliminer. Il faut au contraire leur faire sentir qu'ils sont importants dans leurs pays parce qu'à mon avis ils peuvent apporter le plus à cette équipe. Faouzi a répondu à l'appel du devoir et pris l'équipe dans de mauvaises conditions. C'est selon moi un cadeau empoisonné. Maintenant, il faut maintenir Faouzi Benzarti au poste, régulariser sa situation, lui faire signer un contrat et lui donner le temps de travailler. Il faut stabiliser le staff technique et lui garantir une meilleure organisation. Le staff n'a pu avoir le temps de connaître ce qui est invisible chez le joueur mais tout autant important que ses qualités techniques ou physiques, son intelligence, son mental pour pouvoir exploiter à bon escient son potentiel. Faouzi a sa philosophie, il lui faut du temps pour en imprégner le groupe et mettre son empreinte. Ça serait vraiment un jeu d'enfant de le changer maintenant après l'avoir entraîné dans cette aventure au mauvais moment et sans qu'il ait eu le temps de travailler et de préparer comme il se doit son groupe !». A.A.A. ----------------------------------------- Abderrazak CHEBBI (ancien international) : "Confiance en cette équipe". « Au risque de surprendre certains, je dirai que l'équipe actuelle n'a pas démérité en Angola. Au vu de la courte période de la préparation menée par le nouvel entraineur Faouzi Benzarti, les résultats ne pouvaient être meilleurs même si nos deux premiers adversaires, la Zambie et le Gabon étaient à notre portée. L'équipe de Tunisie devait avoir au moins trois points sinon quatre pour pouvoir rencontrer le Cameroun dans de meilleures conditions psychologiques. Elle n'y a pas réussi et a quitté la CAN sans avoir subi une défaite. C'est frustrant de voir ces jeunes échouer à un moment où il leur fallait un brin de chance pour entrer de plain pied dans la haute compétition. Je voudrais aussi signaler la nette amélioration de la qualité du jeu de l'équipe depuis sa prise en main par Benzarti qui reste fidèle à ses choix offensifs contrairement à Coelho. Maitenant, il faut se remettre au travail sans attendre et commencer par mettre en place les structures adéquates. Je pense à ce sujet que Faouzi Benzarti devra rester pour un bail de quatre ans pour que la stabilité du cadre technique soit effective. Le choix du staff technique est également important aussi bien celui de l'équipe nationale A que celui de l'équipe nationale olympique. Il est également important de planifier le court et le moyen termes, 2012, c'est demain comme on dit. Pour revenir à la composition de l'équipe actuelle, je pense qu'elle doit être renforcée par des joueurs de grands gabarits capables de rivaliser avec les joueurs africains très puissants et athlétiques. Durant les trois matches de la Tunisie disputés en Angola nous avons bien vu que l'équipe n'a pas su mettre à profit les balles arrêtées car ses joueurs n'ont pu gagner les duels aériens et ils ont dû compenser ce handicap par le jeu court. Enfin, je dirai que pour rebâtir une équipe réellement compétitive à même de redonner au foot tunisien son rayonnement, il est indispensable qu'elle dispose de tous ses talents. Le cas de Fahid Ben Khalfallah est pour le moins intrigant. Il aurait bien pu aider l'équipe dans cette CAN grâce à son expérience consommée. » Mounir EL GAIED ----------------------------------------- Temime Lahzami « Il y a bien des joueurs actuels qui méritent une chance » * Le Temps : A la veille du match face au Cameroun, vous avez été catégorique : nous allons battre le Cameroun. D'accord, nous n'avons pas été battus mais nous avons été éliminés ? - Temime : C'est simple, ce jour-là, j'étais persuadé qu'après deux matches de qualité bien au-dessous de la moyenne, nos joueurs allaient réagir. Et ils ont réagi évitant de commettre les mêmes erreurs que pendant les journées précédentes. Il était de mon devoir d'être optimiste dans la mesure où mon statut d'ex-joueur international me le permettait. * Vous continuez malgré tout à croire que l'équipe de Tunisie avait les moyens de passer aux quarts de finales ? - Je suis persuadé que oui. L'équipe de Tunisie a mené à deux reprises à la marque, elle n'a pu malheureusement garder cet avantage car nos joueurs n'ont pas su gérer comme il se doit et le temps et le résultat. Et puis, il ne leur fallait en aucun cas rester prisonniers des consignes qui leur sont données. Ils sont appelés à mettre leur technique au profit de l'équipe avec ce geste que quelques uns de nos jours peuvent utiliser pour faire basculer le cours d'un match. * D'accord mais, il y avait en face d'eux des joueurs camerounais à l'expérience consommée ? - Le Cameroun n'était pas plus fort que la Zambie, voir le Gabon. Seulement, il faut reconnaître que quelques détails ont fait la différence. Nos joueurs ne savaient pas garder le ballon, ils étaient incapables d'épuiser un adversaire vieillissant comme ils n'ont pas réussi à bien neutraliser Arthur Song le déclencheur de toutes les attaques camerounaises. * Ne croyez-vous pas qu'il aurait fallu battre soit la Zambie, soit le Gabon pour ne pas attendre le match face au Cameroun pour passer au prochain tour ? Je ne suis pas d'accord avec ce raisonnement. Je répète que la Zambie tout comme le Gabon sont supérieurs au Cameroun même si nos joueurs étaient en mesure de gagner les deux matches. Avec une meilleure vision du jeu, une meilleure utilisation de leur valeur et de leurs qualités. Ne pas ressembler à des robots outre une amélioration de leurs placement et replacement. Car, il est anormal de concéder deux buts dans les conditions que nous connaissons. * La participation de Darragi et de Msakni ou de l'un d'eux aurait-elle changé le cours des choses ? - Difficile de répondre à cette question. Je trouve que c'est déjà bien d'avoir marqué deux buts au Cameroun sans la présence de ces deux joueurs dont la valeur est indiscutable. Maintenant, croyez-vous que le Cameroun aurait pu passer en quarts de finales si Mikari a réussi le K.O avec un ballon qui ne demandait qu'à être expédié dans les buts. Alors pourquoi s'en prendre à Faouzi Benzarti qui n'y est pour rien dans cette élimination. * Et maintenant ? - C'est le moment ou jamais de tirer les enseignements de cette participation en commençant par mettre en place un programme de préparation s'étalant sur deux années en prévision de la CAN 2012. Il y a lieu d'injecter un sang nouveau au sein de cette équipe, il y a encore des joueurs qui méritent une chance. Je ne suis pas là pour donner des leçons, ni de critiquer quiconque je ne fais que donner un avis personnel. Propos recueillis par R.B.A ----------------------------------------- Abdelhamid Hergal (ex international) : « Une planification à long terme devient urgente !» « Le discours général du staff technique et des joueurs tend vers la satisfaction ce qui me semble incompréhensible. Si on se réjouit d'être 4ème dans un groupe où il y'a le Gabon et la Zambie et un Cameroun modeste qui s'est fait surprendre par le Gabon et a difficilement arraché la victoire face à la Zambie c'est que le football tunisien est tombé bien bas! Et puis durant cette dernière rencontre, qui a enregistré un léger mieux certes, nous n'avons vu que l'action du but et l'occasion de Mikari. Sinon, nous avons eu des difficultés monstres à conserver le ballon. Je ne pense pas que le foot consiste à courir plusieurs kilomètres pour offrir par la suite la balle à l'adversaire! Nous nous vantons d'avoir un effectif jeune mais les joueurs alignés contre le Cameroun ont tous ou presque tous déjà joué dans des coupes d'Afrique. Nous avons une histoire footballistique glorieuse. N'oublions pas que nous avons été qualifiés à 4 reprises pour la Coupe du monde dont trois fois consécutives durant les dernières éditions. Nous sommes aussi champions d'Afrique. J'ai l'intime conviction que notre football souffre et a besoin d'être revu en profondeur et à la base et reconstruit de fond en comble. Nous avons besoin d'une direction technique des jeunes pour reconsidérer la formation des joueurs. Une planification à long terme devient urgente. L'encadrement est, aussi, à revoir. J'ai accompagné l'équipe nationale dans ses déplacements à plusieurs reprises et je sais qu'un membre fédéral est amené à rencontrer des gens importants; des responsables sportifs, des ambassadeurs, des hauts dignitaires de la FIFA. Il est impératif d'avoir un bon niveau intellectuel outre une véritable connaissance du football. Quant au staff technique, parler de le « tunisifier » est un faux problème. Il ne s'agit pas d'avoir un coach tunisien mais d'opter pour un technicien qualifié et ayant une forte personnalité. Je pense que le Tunisien se laisse immanquablement influencer par l'opinion publique. Il est plus exposé que l'étranger à l'interventionnisme. Il nous faut de bons encadreurs qui savent imposer la discipline et leurs idées. Ils ne doivent aucunement se laisser influencer dans leur choix et leur décision quelle que soit la pression! »
