A l'époque où fut créée la Ligue Tunisienne de Défense des Droits de l'Homme, c'est-à-dire, en 1977, l'ouverture politique n'était pas aussi affirmée qu'elle l'est actuellement. Mais le fait est que le discours fondateur de la Ligue, en 77, se voulait universaliste quant aux valeurs défendues, même si l'élitisme et une certaine distanciation vis-à-vis des besoins démocratiques élémentaires de l'époque, ont fait que la Ligue marquait un territoire, " son " territoire si l'on veut, ce qui ne manquait pas de soulever une interrogation toujours aussi chargée d'énigme et de mystère : "Mouvement ", " Association ", ou " parti politique déguisé " ? N'était-ce pas, déjà, un combat idéologique d'arrière-garde et, surtout, par quel phénomène, trente-trois ans après, les déchirements de la Ligue n'ont guère de soubassements idéologiques, s'éloignent des illusions humanistes, démocratiques, du combat pour les Droits de l'Homme. Ils tiennent à un conflit de personnes, à des blocages inter-structurels et ne s'apparentent pas moins à l'essence institutionnelle, même de la plus ancienne Ligue du monde arabe et d'Afrique. Les retrouvailles de demain, rallumeront-elles la flamme, la bougie éteinte des espérances contrariées et des espoirs déçus ? Bien plus qu'en 77, à l'époque du verrouillage "éclairé" travesti en un semblant d'ouverture démocratique, le contexte actuel invoque et exige même qu'une Ligue dépassionnée, pragmatique et militante reprenne la place qui est sienne dans le tissu associatif et dans le paysage socio-politique. Quelques maximalistes des "droits de l'hommisme ", nos chers opposants des salons feutrés veulent faire accréditer la thèse fallacieuse que le système veut récupérer la Ligue. Rien n'est plus faux: le régime a toujours adopté une neutralité exemplaire vis-à-vis de cette affaire, acceptant même que les " missionnaires " de l'Union Européenne s'en mêlent... Mais il s'agira simplement de dégager le bon grain de l'ivraie. Car, la Ligue n'est pas le cénacle d'une intelligentsia un peu trop bien-pensante pour des idéaux simples : Droits de l'Homme. Ce combat, partout, chez nous, comme ailleurs, ne finit pas. C'est un travail de terrain, terre à terre même, et non pas prétexte à des affrontements et à des gradations idéologiques censés se déployer ailleurs que dans les sphères de la Ligue.