Que représente cette peinture? Est-ce un homme qui tend les bras, les mains ? Est-ce une femme ? Mais oui regarde, on y perçoit un personnage !La peinture de Mongi Maâtoug n'est pas une peinture devant laquelle on peut juste passer. C'est une peinture qui demande du temps, de la réflexion, il faut s'en imprégner, s'en imbiber, s'y plonger. Et plus on la regarde et plus elle nous parle ! Mongi Maatoug nous propose une vision du monde à travers des images qui oscillent entre rêve et réalité comme s'il tentait de remodeler l'humain dans une folle énergie. La création d'hybrides bat son plein. Il attire notre attention sur «la vie intérieure» en créant des motifs composés de fragments, sortes de patchworks tourmentés. S'il renferme les éléments d'un mouvement dont les vibrations peuvent être ressenties dans le monde entier, sa peinture affronte le réel dans une dramaturgie savamment orchestrée entre vision et mémoire, impulsions lyriques et constructions méthodiques. Sur la surface à peindre, Mongi Maâtoug compose un univers chaotique relevé de détails qui peuvent surgir et apparaître parfois comme une évidence. Il peint des abstractions dans lesquelles il nous laisse deviner des êtres, des instants imaginés, baignés d'une lumière rayonnante. Ses tableaux richement construits ont cette matière douce et soyeuse que lui permet l'utilisation maitrisée de la peinture à l'huile, des médiums et des essences combinés. Ses toiles travaillées d'après son imaginaire dégagent une certaine théâtralité. «Emergence», «Fusion», «Songe», ou «Implosion» en sont une belle illustration. Bien que subtilement suggéré dans les peintures, l'humain laisse des traces de son passage, de son histoire stigmatisée par ces visions de mains, de silhouettes ou de visages parfois. Ses constructions de lignes et de volumes ne sont pas limitées au simple espace de la toile mais essayent de répondre à l'objectif de l'interpénétration de l'espace intérieur et extérieur pour rappeler aussi que le passé se conjugue avec le présent. Les couleurs superposées, transparentes ou opaques animent les ombres profondes qui s'opposent aux lumières révélatrices de formes et de lignes. Des couleurs aubergine, des blancs, des gris avec une pointe de violet en contrepoint puis des oranges viennent égailler sa palette. L'utilisation subtile et délicate de ces transparences apporte justement à ses peintures une force mystérieuse. La palette du peintre couvre cependant tout le spectre. Dans ses tableaux, il y a une utilisation des couleurs les plus opposées de l'orange ou du jaune au rose ou au violet qui va cerner la zone de lumière. Chaque plan de lumière et d'ombre est décomposé et reconstruit par l'utilisation simultanée des couleurs complémentaires dans un équilibre constant entre le tracé et la couleur même s'il y a une dilution de la forme. Protéiforme, il cache habilement sa dominance. Il offre de multiples points de vue et organise les variantes polymorphes du même point de vue. Son travail atteint désormais un nouveau stade de maturation dans lequel il semble exprimer une réalité imaginaire. Les différentes strates superposées de sa peinture créent des zones d'ombre et de lumière instaurant un dialogue entre surface et profondeur. Il s'évade dans ses « affleurements », et vogue entre symboles et formes au profit d'une quête de soi et de l'univers à travers le lent tempo de la réflexion. La peinture transcende le regard, vers des profondeurs énigmatiques, au cœur de l'émotion intime. Dans ce voyage vers l'inconnu, il se persuade que de la « synergie » éclot la richesse de la vie. Si l'artiste se donne avec générosité, son approche est individuelle et sensible, ce qui rend l'œuvre riche mais peut-être pas toujours aussi accessible qu'il aimerait qu'elle soit…