Nous pouvons vous recommander ce recueil de contes et de nouvelles d' Ali Abassi pour une lecture d'été sur la plage à l'ombre d'un parasol ou dans votre jardin au petit matin en sirotant un bon café noir. En fait, « Châteaux » se lit mieux, et en toute saison, comme une somme d'expériences existentielles rapportées dans des genres littéraires dits légers alors qu'ils couvent souvent les sagesses humaines les plus profondes et suscitent les méditations les plus spirituelles. Ecrits dans ce bon français classique qui fait tellement plaisir à l'heure où tout le monde se met à tordre le cou à la langue de Molière, les récits qui composent le recueil reviennent sur les questions de toujours, sur des sujets qui ont de tout temps tourmenté les hommes soucieux de comprendre les énigmes du monde qui les entoure et d'en savoir un peu plus sur leur propre condition et sur leur destin. Sagesses Mais de tous les thèmes abordés par Ali Abassi, ce sont ceux de l'amour et de l'humilité qui traversent de bout en bout chacun des contes et chacune des nouvelles réunis dans ce bel ouvrage intelligemment et admirablement illustré par Maya le Meur, artiste-peintre qui vit et travaille parmi nous en Tunisie. En réalité, l'auteur de ces récits part en quête du bonheur, s'interroge chaque fois sur la meilleure manière pour l'humanité de l'atteindre. Dessein de moraliste qu'Abassi dissimule fort habilement sous les intentions modestes d'un simple conteur de légendes et d'aventures féériques. Avec « Châteaux », on retrouve la fonction originelle des contes et des mythes : renfermant une ou des leçons de vie, une ou plusieurs réponses aux innombrables mystères du monde, ces récits brefs n'en suscitent pas moins les plus angoissantes interrogations ni ne manquent de bousculer, chez leurs destinataires, les plus persistantes des certitudes. C'est pour cela justement que la plus humble des sagesses que nous conseille Abassi consiste à garder les yeux ouverts sur tout sans toutefois s'obstiner à tout comprendre. Un peu comme ces fous (inventés par ses soins) qui paraissent indifférents aux remous environnants mais qui sont, intérieurement, plus inquiets que quiconque de l'avenir du monde et du leur ! La part du rêve « Châteaux », c'est certes l'œuvre d'un écrivain désabusé, amer et par moments franchement triste. Mais ces contes et nouvelles, qui s'achèvent le plus souvent par des drames insurmontables et des blessures inguérissables, font néanmoins la part belle au rêve et le propose comme remède aux douleurs de ce monde. Le titre du recueil est à lui seul (même s'il évoque dans une autre lecture bien des illusions perdues) une invitation à l'évasion, au voyage dans le temps et dans l'espace, à la réconciliation avec l'imagination sans bornes des enfants. Les châteaux d'Ali Abassi peuvent évoquer le moyen-âge chrétien et l'antiquité gréco-romaine. Mais la plupart du temps, ils sont habités par des héros et héroïnes bien de chez nous, Tunisiens et Arabes musulmans qui, néanmoins, pérégrinent d'un pays à l'autre et d'une civilisation à l'autre dans des voyages initiatiques dont ils rapportent toujours une nouvelle leçon universelle pour l'appréhension de laquelle il n'est nullement nécessaire d'être un familier des dédales et des labyrinthes du sens ! Badreddine BEN HENDA « Châteaux », contes et récits d'Ali Abassi, Editions Sahar, prix public : 18 dt (20 euros)