De bonne augure ? On y croyait. Car en football la superstitution fait aussi partie du jeu. Chaque fois que Jomaâ inaugure la marque dans un tournoi, la suite se passe bien. Plus encore, lors des dix premières minutes, Jomaâ aura caressé le montant du gardien malawie de l'extérieur du pied gauche avant de marquer son vingtième but en 52 sélections. Il était clair que Marchand donnait l'air d'avoir bien préparé ce match. De surcroît, le retour à Radès après la piètre figure face au Botswana (leader du groupe, mais avec un match en plus par rapport à nous), eh bien, ce retour justement risquait de peser sur le plan psychologique. Surtout que, malgré l'entrée libre, la modicité du prix des billets et la tombola, le public continue de bouder et de manifester une espèce de désaffection vis-à-vis de la sélection. Comment raviver la fibre effective ? Les victoires, rien que cela. Et puis, un peu moins de langue de bois et de slogans idiots réduiraient ce parasitage cacophonique autour de l'Equipe nationale. Mais cette versatilité épidermique et finalement indélicate : un contrôle raté et Jomaâ est sifflé par le public. Mais puisqu'il y a une logique à tout et, surtout, une juste immanente, Jomaâ marquait encore quelques secondes après, au milieu d'un embouteillage dans les filets malawis précédé d'une incursion sur la gauche d'un Dhaouadi, l'un des rares vrais excentrés de notre championnat. Quant au geste de réaction de Jomaâ, après le but, il est peut-être tout aussi épidermique que les sifflements contre lui, mais somme toute compréhensible. Buts et sifflements En alignant un 4-4-1-1, Marchand se met à la mode Mourinho qui n'a pourtant pas inventé la lune. Le sélectionneur national donne l'occasion au tandem Yahia-Hagui de mieux se connaître, même si aucun d'eux n'est vraiment porté sur la relance et encore moins sur le pressing. Et, d'ailleurs, l'on ne saurait trop dire s'il ne fallait pas prendre l'adversaire à la gorge - c'est-à-dire, réduire son champ de 30 mètres - et permettre à Boussaïdi et à Mikari d'appuyer et de soutenir respectivement Ben Khelfallah et Dhaouadi. Seulement, voilà : qui devait et qui pouvait plutôt tisser ces géométries au milieu d'une sélection tunisienne faite de contristes au milieu de terrain, mais dépourvue de radar ? Vivement Darragi donc, et Marchand qui en déplore l'absence aurait pu le ménager au Tchad, là où la poisse a brisé le tibia de Chikhaoui ! Elémentaire, mon cher Marchand… L'adage dit bien : « qui veut voyager loin, ménage sa monture » et aussi ses joueurs, ajouterions-nous. Maladresses et béatitudes En tous les cas, on ne peut pas dire que la première mi-temps ait été parfaite. Jeu trop long, lignes desserrées, automatismes approximatifs et permutations des rôles entre Jomaâ et Allagui plutôt prévisibles et codées… Et comme d'habitude, les coups de veine de la sélection sont parfois sanctionnés par des paradoxes inexplicables. La parfaite illustration en est ce but malawie sur tir décoché de 40 mètres par Chinokopo à peine entré avant l'expulsion d'Eniks. Kasraoui, comme d'habitude, piquait, en l'occurrence, un petit somme… Crispation Quelles consignes auraient données Marchand à ses joueurs ? Resserrer les lignes à priori. Quel module tactique – normalement réversible – surtout face à une équipe qui joue à dix ? Encore un paradoxe : les Malawis bougent d'autant plus aisément que les nôtres sont trop éloignés les uns des autres et que les actions demeurent parcellaires. Or, pour peu que les nôtres accélèrent ou qu'ils actionnent le flanc droit - apathique et statique en première mi-temps – l'adversaire se révèle vulnérable. D'abord, une « une-deux » Khalfallah-Allagui permet à ce dernier de centrer vers Jomaâ qui plonge mais dévie dehors de la tête. Et (re) sifflements ! Quelques minutes après, Allagui, virevoltant, excellent dix et demi, vise la lucarne mais la balle heurte la transversale ou plutôt les 90. Le besoin d'un troisième but se fait sentir. Après des velléités d'attaques frontales, nos deux excentrés accélèrent la cadence. Entre-temps, nos adversaires vont carrément sur les tibias et n'en fallait pas davantage pour irriter… Korbi. Il n'empêche : Marchand constatait que nous manquions de percussion, que les lignes demeuraient distendues (les unes des autres) et que nos attaquants avaient besoin de quelqu'un qui leur servît la dernière passe. A juste titre, Msakni prend sa place dans le dispositif. Et la structure de l'équipe prenait la forme d'un 4-3-1-2. Car il était nécessaire que Jomaâ et Allagui se rapprochent l'un de l'autre et que, derrière nous temperiions nos projections offensives car les Malawis s'amusaient à donner des frayeurs à Kasraoui. Curieux tout de même et amusant à la fois : Jomaâ jouait mieux quand il était sifflé ! Sinon, à mesure que les minutes s'égrenaient, les Malawis imposaient leur jeu... Dans ce cas, il fallait bien procéder sur des contres. Il y en a bien eu un (78') le plus classique du genre sur chevauchée de Khalfallah qui centrait sur Jomaâ : ratage incroyable de la tête… Le genre de ratages justement qui se paient cher. Car, presque sur la remise, le capitaine, l'expérimenté Hagui commettait la plus stupide des agressions dans ses 18 mètres, offrant un penalty transformé sans coup férir par Kaninga (82'). Radès est comme escamoté. Silence de tombe. Rage renfermée face à cette « leçon » d'amateurisme dont viennent de nous gratifier nos professionnels. A ce point de la partie, il n'y avait plus grand'chose à tenter. Idées confuses, reflet des conceptions surannées d'un sélectionneur sur-évalué depuis que l'Etoile de Moëz Driss lui a fait gagner une Coupe d'Afrique et qui ne sait pas optimiser le potentiel dont est capable cette sélection. Nous avons de bons joueurs. D'excellents même. Mais, ce n'est pas avec cette fédération, ce n'est pas avec ce staff technique et ce n'est pas avec la nouvelle direction technique que nous irons loin. Cessons, donc, de palabrer. Cessons de nous leurrer. Finissons en avec les formules pompeuses dont s'affuble un nationalisme intempestif. En d'autres termes dépolitisons l'Equipe nationale et cessons d'en faire un prétexte… sinon un exécutoire ; Malheureux de devoir l'écrire. Mais c'est comme ça. Raouf KHALSI Synopsis •Stade de Radès •Faible assistance du public •Arbitre : Joseph Lampty (Ghana) •Buts : Issam Jomaâ (10', 26') pour la Tunisie Chinokopo (45'), Kanyanda (81' s.p) pour le Malawi. •Avertissements : Hagui, Nafti, Boussaïdi (Tunisie) Kanda, Kanyanda, Chinokopo (Malawi) •Expulsion : Eniks (Malawi) •Formation de l'E.N : Kasraoui, Boussaïdi, Mikari, Hagui, Yahia, Korbi, Nafti, Ben Khalfallah, Dhaouadi (Msakni), Allagui, Jomaâ. ------------------------ Classement 1/ Botswana ......................10 pts (+1) 2/ Tunisie ...........................4 pts 3/ Malawi ...........................3 pts 4/ Togo ...............................2 pts 5/ Tchad ..............................1 pt