Nostalgique, saisissant et alléchant était mardi dernier le concert de l'artiste irakien Mohamed Zaki Derwich et de ses musiciens dans le cadre des nuits de la Médina à Kasserine. Ce concert a offert à l'assistance un vaste brassage de qodoud et maqâmat irakiens et a surtout dévoilé la soif insatiable aux mélodies et aux senteurs musicales bagdadiennes avec leurs particularités et leur charme unique. Zaki Derwich a entamé la soirée par un morceau de santour ; cet instrument à cordes frappées appartenant à la famille des cithares sur table. Ensuite il a interprété quelques chansons éternelles du rossignol de l'Irak du bon vieux temps ; Nadhem Gazali, telles que « taalâa min biit abouha » , « khayef aliiha ».. Les chansons étaient nonobstant ornementées par des morceaux du grand luthiste Ali Imam ; une autre figure de proue de l'académie musicale irakienne, qui a choisi de s'installer dans notre pays et chanter à distance Bagdad où l'histoire de la musique remonte à la Mésopotamie et qui était le centre musical le plus important au Moyen Age. L'artiste a émerveillé par sa voix suave en chantant aussi pour Kadhem Saher, pour Mohamed Abdah et surtout des mawal ensorcelants avec un accent typiquement irakien. La poésie était de la fête, et Zaki Derwich, tout en taquinant son instrument de percussion mélodique à l'aide des deux petits marteaux (dits mezrab) et enchantant l'auditoire par une musique d'une acoustique fort particulière, a improvisé et clamé des vers dédié à l'antique Cillium et à ses monts enrobés de pin d'Alep orgueilleux, ou aussi à la terre natale : « ô Bagdad, je n'aime que toi comme ville, et je n'ai pour mère que la terre d'Irak »… Emus et emballés, les spectateurs ont accueilli les vers de Zaki Derwich par une ovation et ont bien savouré cette balade nostalgique soigneusement conçue par ces artistes dévoués et engagés . « Le soleil de Bagdad ne peut être camouflé par les fumées des Tartares ni par ces corbeaux hybrides …Je suis triste pour ma patrie..mais je crois fort au retour des hirondelles de Babel », nous a déclaré Zaki Derwich touché par le succès de sa soirée en hommage aux quartiers sinistrés de Bagdad. Un beau spectacle qui méritait le déplacement et transcendait le succès de ce jeune festival qui commence à se frayer une bonne place dans le paysage culturel régional et surtout aux cœurs des noctambules de la ville qui ont répondu présents lors de la plupart des spectacles et concerts proposés.