Par Malek SLIM - La conférence de Cancun (Mexique) sur le changement climatique s'est achevée dans une sorte de béate satisfaction. Les résolutions faisant suite aux âpres négociations qui ont eu lieu semblent en effet avoir contenté tous les pays participants (192). L'ambition d'avancer ensemble sur la voie de la lutte contre le réchauffement climatique a été haut et fort rappelée au cours des débats. Elle ne fait l'objet d'aucun désaccord. Mais les moyens d'y parvenir sont différemment appréciés par les principaux acteurs économiques dont le souci premier demeure la sortie de la crise. Il était donc difficile aux négociateurs de se mettre d'accord sur une ligne de conduite pour réparer un tant soit peu les dégâts consécutifs à l'échec du sommet de Copenhague de décembre 2009. Un nouveau revers aurait sans doute sonné la fin de la coopération sur un problème qui concerne le futur de la planète et l'avenir de ses occupants. Conscients des conséquences désastreuses d'une telle issue, les diplomates présents à Cancun et à leur tête les ministres de l'Environnement n'avaient dès lors ménagé aucun effort pour sortir les négociations de l'impasse. Un accord au minima valait mieux qu'un échec total. La parade a été vite trouvée avec les engagements pris par tous les participants de souscrire aux efforts de lutte contre le réchauffement. Mais des engagements non contraignants, encore faut-il le préciser ! De fait les principaux pays émetteurs de CO2 (principal agent humain de pollution) ne sont plus dans l'obligation de réaliser les objectifs chiffrés fixés par le protocole de Kyoto dont l'unanimité sur sa reconduction n'est pas acquise. A Cancun c'était plutôt la voie du compromis qui a été prospectée et finalement adoptée, d'autant que tout le monde y trouve son compte, notamment les Etats-Unis, principal pays pollueur après la Chine. Sachant que les Etats-Unis ont été exceptés du traité de Kyoto qui contraint quarante pays à réduire de 5,2% leurs émissions de carbone d'ici 2012. Encore une fois c'est la logique de l'intérêt national qui l'emporte en dépit du danger qui est planétaire. L'attitude de Washington par trop unilatéraliste rend presque impossible la mise en place de mécanismes susceptibles de favoriser une politique commune de lutte contre le changement climatique. La tâche devient encore plus compliquée quand des pays comme la Chine ou l'Inde font prévaloir les mêmes arguments pour défendre leurs intérêts économiques. La recherche du consensus implique par conséquent l'obligation de faire des concessions pour éviter de compromettre l'avenir de la coopération dans ce domaine. Ainsi fut sauvée la conférence de Cancun, en attendant de remettre tout sur la table à Durban en Afrique du Sud l'an prochain. Toutefois et en dépit de la partie très limitée des accords sur la réduction des émissions des gaz à effet de serre, la communauté internationale a tout de même fait un pas sur la bonne direction en décidant la création d'un « fonds vert » destiné à aider les pays les plus pauvres à partir de 2020. Doté de 100 milliards de dollars annuels ce fonds aidera à la transformation industrielle dans ces pays pour se mettre au diapason des nouvelles normes moins polluantes. C'est le principal acquis de la conférence de Cancun, en attendant bien sûr sa mise en application à Durban, qui sera aussi l'occasion d'approfondir le débat pour éventuellement trouver des solutions aux questions restées sans réponse au Mexique où l'esprit consensuel l'a emporté sur la rigidité des positions d'avant conférence. Cette dernière aux résultats mitigés constitue tout de même un tout petit pas sur la voie d'une réelle coopération pour une vraie gouvernance mondiale du climat. Cancun a ouvert la brèche en évitant de faire des mécontents, mais c'est trop peu au vu du grand défi climatique que l'humanité se doit de relever.