Il est communément admis qu'être dans l'opposition est plus facile, d'un point de vue politique, que de gouverner. Critiquer et faire de la surenchère devient aisé, par rapport au fait de gérer un pays et de veiller à l'ordre public et au bien être de la population. Un parti de gouvernement est tenu à faire l'équilibre entre le souhaitable et le possible. D'ailleurs, la politique est l'art du possible. Donc, la donne change radicalement lorsqu'un parti de l'opposition réussit un jour à accéder au pouvoir. Qu'en est-il dans ce cadre pour le Hamas qui célèbre cette semaine le 23ème anniversaire de sa création et qui est devenu depuis 2007, seul maître dans la bande de Gaza par un coup de force contre le Fatah créant ainsi une situation inédite : un pays sous occupation avec deux gouvernements l'un à Ramallah, l'autre à Gaza ? Le Hamas, créé en 1987, a été depuis, très actif dans la lutte contre l'occupation israélienne et notamment lors de la deuxième Intifadha, qu'il a, d'ailleurs, pu mettre à profit pour étendre sa base populaire. Sa branche armée « Les Brigades Ezzeddine Al Qassam », ont infligé de lourdes pertes à Israël. Depuis son accession au pouvoir et surtout après l'agression israélienne contre Gaza, la lutte armée du Hamas va baisser d'intensité. Le mouvement est, aujourd'hui, pour une trêve indéterminée avec Israël. Il essaye, aussi, d'empêcher les groupuscules salafistes, tels que « l'armée de l'Islam », « Les partisans de la Sunna »… d'arrêter les tirs de roquettes en direction d'Israël. Ça rappelle le temps où Mahmoud Abbas condamnait le tir des roquettes du Hamas. Le souci du Hamas pour maîtriser la situation à Gaza, devenu une priorité politique depuis 2007, ne l'a-t-il pas poussé en août 2009 à lancer un assaut sanglant contre les partisans du groupuscule salafiste « L'Emirat islamique de Gaza » qui s'est soldé par 24 morts ? Quant à ses relations avec le Fatah, et la réconciliation inter-palestinienne, le Hamas se montre peu flexible et les négociations parrainées par l'Egypte achoppent notamment sur le dossier sécuritaire interne ce qui a laissé dire à plusieurs analystes que le mouvement s'accroche à son pouvoir à Gaza. Le bilan du Hamas sur le plan interne n'est pas non plus brillant. Si Gaza subit toujours le blocus inhumain, il n'en reste pas moins que sur le plan des libertés publiques, le gouvernement du Hamas a une politique restrictive. Bien que ce mouvement multiplie les démonstrations de force à travers les meetings populaires, sa popularité à Gaza baisse. Des sondages le donnent en perte de vitesse. Pour y parer, le mouvement a organisé durant l'automne une campagne de porte-à-porte baptisée « Amitié et communication » afin de redorer son blason auprès des Gazaouis. Autant d'exemples qui démontrent que 23 ans après, le Hamas est revenu à la Réalpolitik et que les slogans des années 90 et les promesses, au demeurant populistes, sont aujourd'hui de vœux pieux. Il était temps. Mais, fallait-il rappeler que le Hamas, parti qui se réclame du mouvement des « Frères musulmans », n'a fait qu'appliquer la tactique de cette confrérie, à savoir, le double langage ? Il s'agit de promettre à souhait quand on est dans l'opposition, appliquer autre chose une fois au pouvoir. Classique. Et rien de révolutionnaire !