Le flux impressionnant de ressortissants égyptiens continue à déferler massivement sur les deux points de passage frontalier de Dhiba et particulièrement de Ras Jdir. Ils sont pris en charge dès leur arrivée sur le sol tunisien par un personnel nombreux imbu de sens du bénévolat et du volontariat relevant de plusieurs ONGs, agissant bien évidemment en parfaite symbiose et en concertation continue avec l'armée déployée remarquablement à cet effet et avec les services de police et de douane en place. Ils sont ensuite acheminés vers l'île de Djerba, sans trop attendre, grâce à une mobilisation sans précédent de moyens de transport relevant tant du secteur public, à savoir la SNTRI, la SRTG de Médenine et d'autres gouvernorats, que du secteur privé, taxis, louages, voitures particulières, la FTAV ( Fédération Tunisienne des Agences de Voyages du sud-est). A Djerba, une cellule de gestion et d'encadrement de ce flux humain, constituée de scouts et de citoyens bénévoles, est en place pour prendre en charge l'accueil, l'hébergement et le transfert vers l'aéroport international de Djerba-Zarzis, en agissant de concert avec le même personnel de Ben Guerdène. A l'instar des moyens de transport mobilisés, tous les espaces répondant aux critères d'accueil et d'hébergement sont exploités : les maisons de la culture et des jeunes de Houmt-Souk, de Midoun, d'El May, de Guellala, les dortoirs des lycées, les auberges et certains hôtels, des maisons inhabitées de particuliers, etc...Tous les efforts sont réunis, chacun de son côté, pour apporter sa contribution et son soutien à la cause : des dons en argent et en denrées alimentaires affluent de tous bords ; des plats cuisinés dans les maisons sont apportés aux nombreux centres d'hébergement à travers toute l'île pour être servis chaque midi et soir ; des femmes proposent leurs services pour aider à encadrer les arrivants accompagnés de leurs familles, dont des bébés. La solidarité est vécue comme une vérité concrète et palpable, perçue dans sa dimension la plus noble, dépassant le cadre du discours creux, fallacieux et stéréotypé tenu hypocritement vingt-trois ans durant. Aéroport saturé D'autre part, l'aéroport international de Djerba-Zarzis ne désemplit pas ; un pont aérien semble avoir été établi entre Djerba et certaines villes d'Egypte, Le Caire, Alexandrie ou Marsa Matrouh. Le hall de la salle d'embarquement est noir de monde, du matin au soir, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, se mouvant dans un brouhaha indescriptible. Le personnel dépêché par l'ambassade d'Egypte à Tunis, au nombre de six, est submergé par les demandes pressantes de leurs concitoyens d'être embarqués. Entre mercredi 23 février et samedi 26, vingt trois vols ont été organisés parvenant à rapatrier quelques six mille Egyptiens. Mais depuis lors, le nombre d'arrivants à Ras Jdir est en nette croissance, dépassant de très loin la moyenne enregistrée pendant les trois ou quatre premiers jours, ce qui a pris au dépourvu tout le personnel chargé de l'organisation et toute la logistique mobilisée depuis le début de la crise. Pendant les dernières quarante-huit heures, plusieurs vols ont été organisés, dont treize dimanche et vingt six prévus lundi, permettant de rapatrier quelques treize mille passagers. Le reste du contingent, qui sera renforcé sans doute dans les heures qui viennent par d'autres milliers de postulants au rapatriement, est réparti sur les différents centres d'hébergement à Ben Guerdane, à Zarzis et à Djerba dans l'attente d'être évacué. L'exode massif des travailleurs égyptiens fuyant la Libye a dépassé toutes les prévisions et a atteint des proportions alarmantes qui risquent d'aboutir à une véritable crise humanitaire, si les instances et les organisations internationales ne se mobilisent pas en faveur d'une intervention à grande échelle susceptible d'apporter l'aide nécessaire pour atténuer l'ampleur de la crise ; or jusqu'à ce jour, un seul avion émirati chargé de 120 tonnes de munitions a atterri samedi à l'aéroport de Djerba-Zarzis.