De Ahmed Touili - Les rois poètes de Kairouan : tout un programme. Il paraît même que l'enjeu en vaut largement la chandelle. Aussi bien pour les néophytes, lesquels auront, par ce biais, l'occasion de découvrir un monde, enchanteur même si atypique, puisqu'il consiste en une sorte d'immersion dans des époques révolues, qu'ils n'ont donc pas connues, et au cœur même d'une poésie antique qui a ses codes et ses clefs de séduction dont il faut pouvoir appréhender le pouls secret pour en apprécier le charme suranné, mais aussi pour les spécialistes, et aficionados du genre, qui n'auraient pas eu l'opportunité peut-être, de visiter ces perles rares, confinées dans de vieux livres de littérature et d'Histoire qui traitent de cette période-là. Ahmed Touili à qui nous devons cette dernière parution, à savoir : « Moulouk Al Kairaouan Achouâra », a opéré à une sorte de tour d'horizon de cette poésie, dont il faut savoir goûter la truculence, et entraîné le lecteur, dans son sillage, tout au long des 111 pages qui composent ce présent ouvrage, parvenant à restituer, à travers anecdotes, et force détails historiques, la quintessence de ce culte voué à la poésie, à travers une balade généreuse dont on retiendra notamment, que les rois et princes Aghlabides, Fatimides, ou encore Sanhajites, avaient cette tradition d'accueillir dans leurs murs, des artistes, écrivains, penseurs et poètes, qu'ils plaçaient sous leur protection, attendant en retour que ces derniers traduisent leur reconnaissance et leur infinie gratitude, en poésies flamboyantes, vantant leurs mérites et leurs munificences, tout en leur inspirant à leur tour, des vers, tournés avec élégance, humour, grandiloquence ou un réel raffinement, c'est selon car tous n'étaient pas forcément doués et à parts égales, dont on retrouve les traces, même de manière quelque peu éparse, dans certaines publications. Ici en l'occurrence, Ahmed Touili nous évite l'écueil des recherches fastidieuses et hasardeuses, pour nous proposer ce florilège de quelques poésies et extraits de poème, où il est, tour à tour, question de la femme aimée, -épouse ou amante-, d'onirisme, de quête soufie et autres sujets d'inspiration, tels que la nostalgie du temps qui passe, et les brûlures de l'éloignement et des séparations au forceps. Cela étant, il convient de souligner que tout l'intérêt de ce livre, réside aussi par ailleurs, dans la manière dont son auteur aura accompagné la présentation des poésies, bien souvent difficiles d'accès, en décrivant minutieusement, et surtout patiemment, en en vulgarisant le message essentiel et la teneur, ces univers complexes et riches, dont il s'avère qu'il n'est pas du tout déplaisant d'en arpenter les dédales, y compris les plus obscurs. Car au bout, il y a toujours une petite lumière qui vous fait signe…