Dans le sillage du soutien et d' échange culturel consacrés aux arts visuels, la Municipalité de Tunis, l' Institut français de coopération et Magnum Photos se sont proposés de présenter, en collaboration avec le Musée de la Ville de Tunis, Palais Kheireddine, une exposition photographique qui se tient du 28 avril jusqu' au 26 mai 2011. Le jour inaugural de cette exposition fut une véritable rencontre conviviale entre un large public et les jeunes photographes tunisiens assoiffés de liberté. Fidèles à cette ligne de conduite militante de l' art, les jeunes photographes ont sillonné les rues de la Tunisie, mettant leur vie en péril, car résolus à transmettre un message clair: témoigner d' un moment historique de la Tunisie. Puisés dans différents registres usuels, les objets photographiés tels que les barricades, les voitures incendiées, les pancartes et les chars revêtent un caractère fétichiste gravant à jamais la mémoire collective. De même, qu'ils ratifient le lien entre le réel et l' artistique d' une part et expriment le besoin de cristalliser les péripéties du parcours contestataire d' autre part, en se focalisant particulièrement, sur la spontanéité et la fougue des révolutionnaires. Comme l' a dit Amine Landoulsi, l' un des jeunes photographes, "l' art photographique est non seulement une passion mais une sorte de thérapie. C' est le mouvement de la foule révolutionnaire fomentée par le sentiment patriotique qui m' a stimulé à aller de l' avant dans ce domaine photographique". Par ailleurs, Hanane Aissi, jeune photographe tunisienne résidant en France, n'a pas manqué dans une série de photos, de mettre à l' envers la photo du président déchu dans l' intention de ridiculiser cette étrange et mauvaise habitude d' accrocher le portrait du président partout, « d' ailleurs c'est une pratique propre aux pays arabes,"dit-elle. Après avoir présenté les oeuvres relatives à la Révolution tunisienne, l' heure est venue pour celles du grand photographe tchèque, Josef Koudelka dont la rencontre avec le public présent était très instructive. Prises lors de l' invasion soviétique de Prague en 1968, les photos de Koudelka s' inscrivent dans une optique de témoignage et de remémoration d' un passé . Elles offrent à voir des scènes violentes en noir et blanc ressuscitant des slogans sur les murs, des citoyens assis par terre, des bouquets de fleurs, des montres, des poucettes de bébés près des chars ainsi que des visages perplexes et ahuris. Le tout inclus dans un scénario photographique qui entend dénoncer l' agressivité et permettant entre autres, d' établir le parallèle avec la Révolution tunisienne quoique qu' il ne s' agit pas d' invasion militaire comme celle de Prague mais d' une révolution populaire contre l' injustice et l' oppression. "Il y a 40 ans que je voyage d' un pays à l' autre en quête d' une image qui pourrait évoquer toute une histoire aux yeux de ceux qui la regardaient. Chacun pourrait d' une manière ou d' une autre se retrouver en cette image. C'est ce qui donne à mes expositions, un caractère universel,"dit-il . La force et la vivacité de ses scènes-photos ne pourraient laisser quiconque indifférent et réussissent à faire réfléchir quant à l' avenir de l'art photographique lié au monopole du visuel en cette ère de mondialisation.