• L'économiste Azzam Mahjoub parle de la situation difficile, mais appelle aussi à ne pas dramatiser Elle veut faire entendre la voix des femmes. Mériem Hedoussa professeur a créé l'association « la voix de femme », une association pour accroître la visibilité des femmes dans la société et donner la parole à des expertes, des spécialistes en toutes sortes de domaines. Des femmes qui, à l'image de Mériem, se sont fait une place dans les milieux traditionnellement masculins que sont l'entreprise, l'économie ou encore la politique. Cette association a invité dimanche après-midi Azzam Mahjoub, économiste tunisien spécialiste du Maghreb et des relations euro-méditerranéennes pour nous parler de la situation économique en Tunisie durant cette période de transition démocratique au centre culturel Néapolis. M.Azzam, président de l'association AR2D, a brossé un tableau réel de l'économie tunisienne en se basant sur des arguments solides et fiables. Cet économiste a estimé que la Tunisie passe par une période difficile mais non catastrophique. C'est le prix de notre liberté et notre révolution qui s'est élevée pour dire non à la dictature et à la corruption qui ont gangrené notre pays. Certes notre activité économique est incontestablement en baisse, a fait remarquer M.Azzam. Mais notre économie demeure capable de résister à condition que la situation ne se complique pas davantage. Cette conjoncture difficile s'est répercutée sur la production et l'exportation outre les pertes subies du fait des pillages et des actes de destruction orchestrés et organisés. Notre économie a été touchée par ces sit-in et ces grèves. Cette tension sociale et cette incertitude ont pesé lourd sur notre économie. La baisse a particulièrement concerné la production industrielle, les intentions d'investissement dans l'industrie, les importations des équipements outre la réduction des réserves de change de deux milliards de dinars durant les trois premiers mois de 2011. Nous avons vécu des périodes difficiles et la situation actuelle exige un compromis pour rétablir la confiance et la sécurité » Comment reconstruire notre économie ? L'économie tunisienne minée par une corruption systémique, a besoin, à moyen terme, de revoir sur la base d'un compromis national, son modèle de développement, de manière à atteindre la convergence et éliminer les disparités. La stabilité du pouvoir est très importante car elle aura certes un impact positif sur la situation économique. Cette stabilité est de nature à assurer les investisseurs. Mais faut-il plus de transparence dans nos rapports avec les opérateurs étrangers dans les domaines institutionnel et économique. La reconstruction de la Tunisie est possible surtout que certains indicateurs sont encourageants. Les exportations ont réalisé une hausse de 11% durant les quatre premiers mois et ceci malgré la crise de la Libye. Le bâtiment connaît une évolution rapide et quand le bâtiment va, tout va. L'inflation n'est pas élevée. Il ne faut pas donc dramatiser. La croissance de la Tunisie pourra passer de 1 à 3%. La saison agricole s'annonce bonne. Toutefois les transferts d'argent effectués par les Tunisiens, résidant à l'étranger en régression actuellement, doivent aider le pays à sortir de cette crise et faire face à ce stress financier surtout que l'activité touristique a accusé une baisse de 50%. L'aide financière de l'Europe demeure dérisoire. Mais nous devrons compter sur nous-mêmes. La Tunisie est capable dans les années à venir d'avoir des croissances à deux chiffres si la période de transition est bien gérée. La réussite du processus politique dépend également de l'évolution de la situation économique. La reconstruction de la Tunisie est possible, si nous adoptons des objectifs réalisables à savoir mettre fin à l'analphabétisme des adultes, surtout en milieu rural, réduire les disparités régionales, remédier aux insuffisances notoires en matière d'infrastructure et d'encadrement social, éducationnel et médical. Ceci sans oublier d'accorder un grand intérêt aux industries à forte valeur ajoutée, revoir l'investissement étranger. Tout ce diagnostic doit être partagé si nous voulons assurer un avenir radieux à notre pays. Le développement économique et durable ne peut se fonder que sur la fructification des diverses ressources de la Tunisie selon un plan général attentif aux spécificités et richesses de chaque région.