La Haute Instance indépendante pour les Elections a proposé, dimanche, le report des élections de la Constituante pour le 16 octobre prochain, a annoncé M.Kamel Jendoubi, lors d'un point de presse à Tunis. M. Kamel Jendoubi, président de l'instance a indiqué que cette proposition du report des élections s'explique par l'absence de conditions adéquates pour l'organisation des élections le 24 juillet comme prévu. Il a indiqué que l'instance a proposé le report des élections de la constituante pour le 16 octobre après s'être assurée de la difficulté de réunir les conditions nécessaires pour la réalisation du processus électoral garantissant l'organisation d'élections démocratiques, crédibles et transparentes avant le 24 juillet prochain. Il a énuméré, à cet égard, un ensemble d'opérations techniques qui devraient être accomplies afin d'assurer la bonne préparation de ce rendez-vous électoral telles la mise en place d'un comité central de l'instance, un dispositif administratif, financier et technique ainsi que des sections régionales de l'instance. Il s'agit aussi, a-t-il indiqué, d'identifier et d'aménager les centres d'inscription et la préparation de programmes de formation destinés aux cadres qui seront chargés de la supervision de l'opération électorale outre l'élaboration et la mise en œuvre des campagnes d'information et de sensibilisation pour le démarrage de l'opération électorale. Ces différentes opérations, a-t-il fait remarquer, nécessitent beaucoup de temps et que l'instance après de multiples concertations et consultations d'experts tunisiens et étrangers ainsi que l'examen des expériences de plusieurs pays dans ce domaine, a conclu que la date du 24 juillet, pour l'élection des membres de l'assemblée constituante, ne pouvait garantir l'organisation d'élections crédibles et démocratiques, conformément aux normes et règles fixées dans les décrets-lois N°27 et 35 de l'année 2011. M. Kamel Jendoubi a insisté sur l'indépendance et la neutralité de l'instance supérieure indépendante des élections ainsi que son souci à ce que l'opération électorale se déroule dans la transparence et dans un climat démocratique. Il a, par ailleurs, indiqué que la coordination avec l'administration est chose possible et qu'une réflexion est, actuellement, engagée en vue de la mise en place d'une cellule à cet effet. (Tap)
Réactions Mustapha Ben Jaafar (Secrétaire général du FDTL) : «Nous regrettons ce report» La Direction du Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés (FDTL) privilégiait jusque là, la date du 24 juillet, date retenue pour les élections de la Constituante afin d'accélérer la situation de transition qui prévaut et passer à la légitimisation des instances politiques. Dimanche, nous avons appris, lors de la tenue de notre Conseil National, la décision prise par la Haute Instance indépendante pour les élections. Nous regrettons certes ce report mais les arguments présentés sont convaincants et je tiens à faire part de notre entière confiance dans la probité et l'intégrité des membres composant cette commission. Ce report va nous permettre, à nous (FDTL) de mieux nous préparer à ce nouveau rendez-vous. Maintenant, nous appelons toutes les forces politiques, sociales et syndicales à œuvrer pour assurer la sécurité et la stabilité dans le pays dans les mois à venir. Le gouvernement est appelé, de son côté, à donner des signes forts en accélérant le processus de poursuite contre les symboles du régime déchu. Seul moyen de regagner la confiance de l'opinion publique, actuellement, mise à rude épreuve. Rafik BEN ARFA
Rached Ghannouchi (président du Mouvement Ennahdha) : « Nous sommes surpris… et nous procéderons à des consultations avec les autres partis pour le maintien de la date du 24 juillet » En tournée au Sud-Est, Rached Ghannouchi a défendu l'image d'Ennahdha (cf Assabah de ce jour), affirmant que son mouvement n'est pas le « légataire, ni le détenteur de la vérité de l'Islam ». Dans les différents forums et répondant aux questions des participants, Rached Ghannouchi a particulièrement, insisté sur la nécessité d'un gouvernement de transition regroupant toutes les sensibilités autour des valeurs de la Révolution et de la future République, et a surtout manifesté son étonnement de l'annonce de la proposition de report de la date de l'élection de la Constituante, affirmant, de ce fait, que son mouvement entreprendra de larges consultations avec les autres partis. (D'après Assabah)
Adel Chaouch, Mouvement Ettajdid : «Il ne faut pas refaire les mêmes fautes» «Personnellement je m'attendais à ce que la Haute Instance Indépendante pour les Elections propose le report de la date des élections. Cela s'explique notamment, par le retard enregistré au niveau de la promulgation du Code électoral prévue pour le 31 mars. En fait, le décret loi régissant cette opération n'a été publié que le 10 mai. Il est dès lors, quasiment impossible que les élections de la constituante se déroulent le 24 juillet tout en respectant les normes internationales régissant cette opération. La haute instance a fait le constat par rapport à la logistique et les préparatifs de cette échéance. Il faut mettre au minimum 20 semaines pour bien préparer ce rendez-vous d'où l'impossibilité d'effectuer les élections le 24 juillet. Politiquement, la transition ne se réalise que par un consensus général. Toutes les parties doivent se mettre d'accord sur une date fixe suite à une concertation générale. Il ne faut pas en fait, refaire les mêmes fautes. Rappelons que le report de la date des élections reste une proposition ».
Maya Jribi, Parti démocrate progressiste (PDP) : «Contre le report des élections» La secrétaire générale du Parti démocrate progressiste (PDP) Maya Jribi s'est opposée à la proposition de l'Instance supérieure indépendante pour les élections de reporter la date des élections de l'Assemblée nationale constituante au 16 octobre. Lors d'une conférence de presse tenue lundi à Tunis, Mme Jribi a indiqué que «le rendez-vous du 24 juillet était une date consensuelle entre les différentes parties politiques tunisiennes… Elle était attendue par tous les citoyens», a-t-elle soutenu. La secrétaire générale du PDP a fait valoir que la proposition du report ne «s'appuie pas sur des consultations avec des partis politiques ou avec le gouvernement intérimaire». Elle a insisté sur l'importance de tenir compte des échéances nationales urgentes telles que «la situation sécuritaire fragilisée et le ralentissement économique». Selon la secrétaire générale du PDP, les empêchements techniques et logistiques invoqués par l'Instance ne peuvent nullement entraver le déroulement des élections de la Constituante à la date fixée au 24 juillet. Chokri Bel Aïd, Le Mouvement des Patriotes Démocrates (Al Watad) : «Il n'y a pas d'inconvénient à ce qu'elles soient reportées» « Nous tenions bien à ce que les élections de la constituante se déroulent le 24 juillet. Toutefois, et face à la proposition de la haute Instance indépendante pour les élections il n'y a pas d'inconvénient à ce qu'elles soient reportées. Je tiens toutefois à insister sur l'importance de faire un consensus national entre les acteurs politiques et le gouvernement pour que les élections aient lieu le 16 octobre sans problèmes ».
Hamma Hammami, Parti communiste des ouvriers de Tunisie (PCOT) : «Nous étions dès le début pour le report des élections» « Nous étions dès le début pour le report des élections pour le mois d'octobre. Cette proposition annoncée par la Haute Instance indépendante pour les élections vient nous conforter, parce qu'elle montre que notre décision n'était pas dictée par des intérêts partisans, mais par une analyse objective de la situation. Nous appelons toutes les forces politiques à prendre en considération la proposition de la haute instance et à mettre en avant les intérêts des Tunisiens. Les élections ne sont pas en soi un objectif, mais l'essentiel c'est de les organiser dans un climat de liberté pour qu'elles puissent nous amener à une véritable démocratie. Si cette proposition est retenue par le gouvernement, il faudrait ainsi que toutes les forces politiques se mettent d'accord sur un agenda concret d'ici le mois d'octobre ».
Abdelwahab El Hani, parti Al Majd : «Pour le maintien de la date des élections» «Nous sommes pour le maintien de la date des élections pour établir la légitimité constitutionnelle. Nous ne pouvons pas prolonger l'état d'illégitimité du gouvernement et donc d'instabilité car elle représente une occasion pour ceux qui sont contre la Révolution. En effet, les gouvernements ont fait perdre 5 mois très précieux à la nation par des débats idéologiques qui ne concernent pas le mode de scrutin alors qu'on aurait pu commencer la phase des préparatifs logistiques depuis des mois, notamment l'actualisation des données des cartes d'identité nationales. Nous nous retrouvons aujourd'hui avec une attitude délibérée du gouvernement pour prolonger la date afin de se maintenir au pouvoir. Ce gouvernement doit appeler à une conférence nationale regroupant tous les partis politiques et les associations concernées par les élections pour se mettre d'accord sur le calendrier et fixer une date définitive des élections pour établir la légitimité autour d'un consensus national. D'ailleurs Al Majd demande d'organiser des présidentielles le 24 juillet et les élections de la Constituante dans un délai de 6 mois ». Abderrazak Hammami, Le Parti du Travail nationaliste et démocratique : «Il ne faut pas se précipiter» « Nous avons proposé dès le début une date raisonnable pour organiser des élections démocratiques dans un cadre transparent. Malheureusement, la légitimité était le souci des différents acteurs alors qu'il a été prouvé qu'il est presque impossible de respecter cette date. Il ne faut pas se précipiter mais œuvrer à assurer la transition démocratique tout en fixant une date définitive. L'intérêt du pays doit primer d'abord ». Mohamed Goumani, Parti de la Réforme et du Développement : «Nous sommes compréhensifs» « Nous sommes compréhensifs par rapport aux déclarations annoncées par la Haute Instance indépendante pour les élections quant à l'éventuelle possibilité du report des élections et ce parce que ça nous intéresse qu'elles se déroulent convenablement. Toutefois, la date du 24 juillet prévue engage le gouvernement provisoire et le président par intérim. En effet, toute révision de cette échéance nécessite un nouveau consensus politique. Nous nous inquiétons par ailleurs par rapport aux risques du report des élections car cela pourraient créer de nouvelles difficultés. Il importe par conséquent de lancer un débat politique élargi à propos du rendez-vous des élections et des mécanismes de sa concrétisation. D'ailleurs, je suis étonné du silence du gouvernement quant à cette proposition. Je considère même que c'est un silence dangereux. Nous attendons sa position ». Propos recueillis par Sana FARHAT