‘'Les rapports culturels, littéraires et linguistiques entre les Arabes et les Syriaques jusqu'au quatrième siècle de l'hégire'', tel est l'intitulé d'une thèse de doctorat ès lettres, soutenue par le chercheur Ridha Bannani, à la Faculté des lettres et sciences humaines 9 avril 1938 de Tunis, à la date du 7 avril 2011, en pleine effervescence post révolutionnaire. Ridha Bannani a été admis au grade de docteur ès lettres et civilisations arabes, avec mention ‘'très honorable''. Qualifié, par son auteur, du premier du genre à l'Université de Tunis, le travail a été réalisé sous la direction du Dr Habib Aouadi, professeur de littérature ancienne à l'Université tunisienne et le Dr Ahmed Rahim Hibbou, professeur de langues sémitiques et de l'histoire de l'Orient ancien à l'Université d'Alep, en Syrie, appelée ainsi, en rapport avec les syriaques. Comme la langue arabe, la langue syriaque est une langue sémitique dérivée de l'araméen et elle est restée jusqu'à présent, comme langue littéraire et liturgique de nombreuses communautés chrétiennes au Moyen Orient (en Syrie et en Irak, notamment). L'écriture syriaque est, encore, en vigueur chez ces mêmes communautés. Les chaînes de télévision qui leur sont propres utilisent indifféremment les langues et les écritures arabes et syriaques. En Inde, la tradition syriaque compte, encore, quelque 9 millions de personnes. Mais les syriaques sont connus dans l'histoire et la civilisation arabes et islamiques, pour avoir traduit en langue syriaque les œuvres des anciens auteurs grecs, notamment celles des anciens philosophes et savants grecs, conservés dans les monastères, puis, les ont passé au monde arabe, en en faisant des versions et des traductions arabes, aux premiers siècles de l'Islam, sous l'impulsion des gouvernements arabes de l'époque, spécialement à Bagdad, en Irak. D'ailleurs, dans sa thèse, Ridha Bannani a pris soin de donner un aperçu de la langue et de la littérature syriaques, avant d'analyser plus profondément les relations entre la langue arabe et la langue syriaque, le but étant de contribuer au développement des connaissances scientifiques relatives à la lexicographie et la grammaire arabes, outre les études d'étymologie appelée ‘'Ichtiqaq'' (dérivation) en arabe. ‘'L'étude des rapports entre l'arabe et le syriaque est nécessaire pour mieux comprendre les origines et les racines de la langue arabe et du patrimoine culturel et littéraire arabe, nous a-t-il dit, car les bibliothèques universitaires en Tunisie regorgent d'ouvrages et d'études sur la lexicographie et la grammaire de la langue arabe, mais présentent un manque flagrant en matière de recherches sur les origines et les fondements. La mise à contribution des langues sémitiques sœurs de la langue arabe aide énormément à suivre, sous un meilleur éclairage, la formation et le cheminement de la langue arabe, a-t-il souligné . A cet égard, il est utile de noter, à propos du manque signalé, que les anciens lexicographes arabes n'ont pas négligé cet aspect du problème. La question de la dérivation des mots du vocabulaire et du lexique arabes, ‘'échtiqaq'', a retenu l'attention de plusieurs grands lexicographes arabes de l'âge classique, à l'instar du grand linguiste Ibn Dourayed (9ème et 10ème siècles de l'ère chrétienne), ou encore le grand lexicographe Al Jawaliqui (11ème et 12ème siècles de l'ère chrétienne) qui a écrit un ouvrage intitulé ‘'Al mouarreb'', c'est-à-dire les mots empruntés par la langue arabe aux autres langues , qu'elles soient sémitiques ou appartenant à d'autres groupes de langues. Il n'y avait pas, alors, de division des langues en groupes et sous- groupe distincts, sémitique, indo-européen et autres. Ainsi, d'après les anciens lexicographes arabes, le mot ‘'kamanja'' qui désigne encore, dans les pays arabes, l'instrument de musique à cordes appelé ‘'violon'' dérive du mot ‘'kamanjar'' qui signifie ‘'archer'' dans l'ancienne langue sémitique nabatéenne parlée par les nabatéens et serait composé du mot ‘'kaman'' (arc) et du mot ‘'jar'' (fabricant). Le mot ‘'maiza'' qui désigne la chèvre, en arabe, serait d'origine syriaque et composé du mot ‘'ma'' (cri de l'animal) et du mot ‘'iza'' qui signifie ‘'chèvre'' en syriaque. Quelques auteurs contemporains ont composé des ouvrages dans ce même sens, dont certains portent sur les mots arabes d'origine persane, à l'instar d'un livre composé à ce sujet par un homme religieux syriaque chaldéen Addi Achir. Le domaine est vaste et reste à explorer, mais d'une façon vraiment scientifique, car il y a beaucoup à dire sur les écrits anciens et modernes dans ce champ de recherches, de sorte qu'il ne faut pas, surtout, prendre leurs explications pour de la vérité , car les origines demeurent difficiles à établir, à défaut de principes clairs et vérifiables.