Auront-ils lieu, n'auront-ils pas lieu ? C'est la question que tous se posaient avant le démarrage des festivals d'été. L'impératif sécuritaire s'est posé avec acuité. Le public sera-t-il au rendez-vous ? In fine, l'organisateur, qui n'est autre que le ministère de la culture, des deux plus grands festivals du pays, Carthage et Hammamet, a décidé de maintenir la session mais en comprimant les dépenses et par conséquent d'offrir aux artistes tunisiens les moins privilégiés l'opportunité de rencontrer le public. Mais ont-ils réussi à l'attirer ? Pour ne pas interrompre la tradition festivalière, le ministère de la culture a pris tout de même quelques mesures pour le bon déroulement des soirées. Pour Carthage, il a supprimé l'amphithéâtre, cette année, invoquant des travaux et opté pour des espaces plus éclatés et moins grands donc plus sécurisants et contrôlables en cas de dépassements de la part de certains casseurs. Al Abdellia, le Musée de Carthage, Ennejma Ezzahra et le Théâtre Municipal sont plus adéquats au genre de programmation proposée mais moins populaires. A mi-festivals, qu'en est-il de la fréquentation ? Le public déserte la majorité des concerts. Aucun artiste à ce jour n'a réellement créé l'événement. Et les espaces choisis, s'ils ne présentent pas de danger sur le plan sécuritaire, ils ne semblent pas attirer un grand public. Les concerts les plus courus sont rares. Hormis la Libanaise Oumaima El Khalil, la Nigérienne Ayo, les Tunisiens Fawzi Ben Gamra et Saber Rebai dont les concerts ont connu une affluence, les autres artistes, qu'ils soient à Carthage ou à Hammamet, n'ont pas fait le plein. Il est par conséquent clair que l'impact des troubles ayant accompagné la révolution du 14 janvier n'a pas eu un effet dévastateur. Le Tunisien continue à sortir, à fréquenter les terrasses des cafés qui sont en cette période caniculaire archi -pleins et les soirées de mariage très fréquentes en ce mois de juillet qui précède le mois de ramadan. Alors qu'est-ce qui cloche réellement ? Pourquoi une telle désertion ? La programmation est mise en cause. L'envergure des artistes semble entamée puisque 75% des spectacles sont assurés par des artistes nationaux. Révolution ou pas, certains artistes doivent se rendre à l'évidence et admettre une bonne fois pour toute que les prestations dans les festivals face à une audience limitée ne peuvent que nuire à leur carrière. Comme de tout temps, ces artistes mettent en cause les médias notamment les télévisions et les radios qui ne diffusent pas suffisamment leurs chansons. Mais ce n'est que balivernes. La principale raison de l'absence de popularité de ces artistes est qu'ils ne travaillent pas assez leur musique, leurs concerts et leurs performances. Ils se contentent de ressasser un répertoire mince ainsi que les succès de chanteurs orientaux. La question du talent est la plus cruciale. Quel que soit le degré de flirt avec le régime déchu, un talent reste un talent et le public tient compte davantage de la compétence de l'artiste que de ses convictions politiques. L'artiste, le vrai est amené à se placer au-dessus de tous les jeux politiques, et rendre compte de son art. Car, c'est son art que le public sollicite et c'est lui seul qui lui fera gagner des galons et le respect des fans.