Par Khaled GUEZMIR – La place « Ettahrir » au Caire, serait-elle devenue la place de la vérité où l'islamisme « démocratique » se fait submerger par l'islamisme « radical ». La peur de l'islamisme serait liée selon les observateurs les plus pessimistes surtout les Occidentaux à son essence même. On vous dira que depuis ses origines l'Islam porte les germes de l'extension pour ne pas dire l'hégémonie expansionniste. Une démonstration de force de plus de deux millions de « frères » dont la plupart ont troqué le drapeau égyptien « civil » pour le fameux drapeau noir des groupes extrémistes appelant à l'application de la « Chariaâ » comme constitution ! Du coup, les révolutionnaires « occidentalisés » du genre mouvement « Kifaya » (assez) qui ont toujours rêvé d'une Egypte démocratique et libérale à l'occidentale, ont bien vite déchanté et revu leurs ambitions à la baisse. Ils voient leur rêve démocratique et leur « révolution » prendre le large non pas vers l'inconnu mais vers le « connu » et prouvé : l'Iran ou tout au moins le Soudan ! Cette évolution prévisible pour les uns, inimaginable pour les autres, naïfs de tous les temps et abusés de tous les systèmes totalitaires, se projette dans la conscience des Tunisiennes et des Tunisiens à l'heure de vérité qui approche car le 23 octobre c'est demain. On cite, bien sûr, l'exemple turc et sa prospérité et sa stabilité. D'ailleurs, les hôteliers turcs se frottent les mains puisqu'ils affichent complet et à des prix prohibitifs, les touristes comme les oiseaux migrateurs cherchant la paix, ont fui cette année les « tracasseries » et les « risques » post-révolutionnaires de la Tunisie et de l'Egypte, pour bronzer au Bosphore ! Certes, rassurant, mais encore, faut-il arriver au stade de l'évolution de la Turquie institutionnelle et politique, qui vit depuis Kamel Attaturk un système politique démocratique avec la séparation de la religion et de l'Etat. Même le parti d'Erdogan respecte cette orientation et le portrait de Mustapha Kamel est encore le symbole de la République turque. Je l'ai bien dit auparavant et je le répète à toutes fins utiles, le système démocratique turc avec un parti islamiste modéré au gouvernement n'a pas « dé-kémalisé » la Turquie. Bien au contraire, et pourtant, Attaturk a bien fait de la répression anti-islamiste et anti-califale au moment où il bâtissait la nouvelle Turquie. L'héritage kémaliste malgré ce qu'on peut lui reprocher, reste un atout de premier plan pour la Turquie qui attire vers elle une bonne partie de l'Europe chrétienne rien que parce qu'il partage avec elle certaines valeurs fondamentales et notamment la séparation de la religion et de l'Etat et la démocratie. Le mouvement islamiste tunisien se garde pour le moment de nous dire s'il veut faire de nous « une Turquie » ou s'il veut aller plus loin, en remettant en cause les acquis de la modernisation. Cette modernisation depuis Kheïreddine et ses élites a été une bonne synthèse entre l'Islam modéré tunisien rayonnant et avant-gardiste, et les valeurs occidentales universalistes et libérales. Il serait catastrophique aujourd'hui, de vouloir la déraciner pour bâtir un système médiévalisé et rejeté aussi bien par l'environnement sociétal que par l'environnement international dominé qu'on le veuille ou pas par l'Occident. Les jeunes tunisiens qui ont fait la révolution et qui « brûlent » en bateau vers l'Europe (et là citez moi une seule embarcation qui a ramé vers l'Orient musulman !) ont fait un rêve : faire de la Tunisie un pays de liberté, de justice et de dignité comme l'Occident. Une démocratie pluraliste, parlementaire et à visage humain. Ils voient malheureusement à l'horizon, comme leurs frères égyptiens des partis « tsunamiques » qui risquent de leur voler leur rêve. Du coup, ils boycottent, à leur manière, les élections et refusent de s'inscrire sur les listes électorales. Ont-ils raison ! Ont-ils tort ! Il faut sonder un peu leur subconscient pour trouver une réponse : Ils se sentent spoliés par des partis arrogants de puissance qui annoncent des lendemains totalitaires et ils n'ont qu'une seule arme pour se défendre « la grève de vote »… qui sera suivie bien sûr, d'une seule thérapie « dégage » ! C'est bien triste, n'est-ce pas ! Les jeunes ne sont pas bêtes ! Ils ont tout compris !