La comparution de Moubarek, le président destitué, ses fils, l'ex-ministre de l'Intérieur et six de leurs complices était un événement historique qui restera gravé dans la mémoire des Egyptiens et du monde entier. C'est la première fois qu'un chef d'Etat arabe descend de sa tour d'ivoire, qu'il redevient humain et subit le même traitement que ses concitoyens. Des simulacres de procès Pendant que le peuple égyptien juge ses hauts responsables, nous en Tunisie, nous continuons d'assister à ces comédies de très mauvais goût qu'on appelle procès. Pour préserver la belle image de notre Révolution, on a tenu à en soigner la mise en scène et le décor. Imed Tarabelsi est apparu lors de la première séance en costume de cérémonie, pas comme Moubarek et les autres accusés qui, eux, portaient les uniformes des prisonniers. En ce qui concerne les griefs d'accusation, on a évité de commencer par les plus accablants, aller crescendo permet de maintenir le suspense et d'assurer un épilogue spectaculaire. Voilà pourquoi pour le moment nos interpellés sont jugés seulement pour la consommation de stupéfiants. On mise aussi sur la suggestion, il se peut que l'on soit tentés par ces hallucinogènes vu la peine douce appliquée, dans ce cas, il n'y aurait personne pour réclamer des jugements. On serait partis sous d'autres cieux pour nous soulager et oublier notre monde plein de tragédies. Des assignations formelles Dans le procès de Ben Ali, sa femme, ses gendres et tous les fuyards, là il n'y a pas de problème, les jugements ne sont pas compromettants, puisqu'ils sont sans effet aucun. Ils sont mis en liberté, et de temps en temps, on les assigne juste pour faire des dépositions après quoi ils rentrent chez eux tranquillement. Ce sont des formalités qu'il faut accomplir pour donner l'impression qu'on veille au grain. L'un d'entre eux est l'ex bras droit de Leïla Trabelsi, il a été relâché par le juge d'instruction bien que les preuves de sa culpabilité ne manquent pas. L'un des chefs d'accusation c'est la corruption, il a soudoyé un agent de police par la somme de 50 mile dinars. Une justice transitionnelle D'autres personnages notoires n'ont jamais été convoqués par les tribunaux, c'est le cas de Saïda Agrebi dont les crimes très nombreux ne sont pas à prouver. Elle a profité de cette indulgence et a quitté le pays en plein jour, ce qui veut dire qu'elle ne s'est pas enfuie. C'est ce que d'ailleurs a affirmé le Ministère de l'Intérieur dans un communiqué : on ne pouvait pas l'empêcher de voyager, car il n'y a pas de mandat d'arrêt prononcé à son encontre. Des gens pareils devraient être derrière les barreaux depuis longtemps. Il est clair que les lois actuelles et l'appareil judiciaire en place leur profitent largement. Pour qu'aucun d'eux n'échappe à la justice, pour châtier tous les coupables, il est impératif d'instaurer une justice transitionnelle, ainsi, ces criminels ne trouveraient plus de brèches par où passer pour jouir de l'impunité. Il faut faire très vite pour détendre l'atmosphère en cette période extrêmement critique, rassurer les gens et ne pas les laisser emprunter la voie des Egyptiens qui ont recouru au sit-in pour exercer une pression sur leur gouvernement et l'obliger à organiser le procès. Faouzi KSIBI sihem [email protected] boussa [email protected]