Encore une fois et malgré le Ramadan et la soif et la faim qu'il procure aux pratiquants, l'avenue Habib Bourguiba s'emplit de monde. Ainsi, la voix ne se casse point ni ne se perd en Tunisie et aujourd'hui, la rue gronde de nouveau. La rupture entre le peuple et le gouvernement se fait plus évidente et la méfiance entre le peuple et le système judiciaire en Tunisie se transforme en crise de confiance et en une colère manifeste. Ceux qui sont dans la rue aujourd'hui, ont l'impression d'avoir été abusés… Plusieurs slogans ont été scandés, tels «Un système judiciaire indépendant», «la condamnation des symboles de la corruption», mais encore une fois, un slogan revient en force et qui a été levé le 14 janvier et lors des sit-in Kasbah 1 et 2 «Le peuple veut la chute du système». Ceux qui se sont rassemblés, indépendants ou partisans de quelques partis comme «Taliâa», «Union des Jeunes Communistes» et le «Mouvement des nationalistes démocrates», ont levé des slogans différents les uns des autres. Selon les témoignages recueillis, quelques groupes ont les mêmes revendications, et d'autres sont venus seuls, ayant une revendication précise. Encore une fois la Tunisie vit une crise, et encore une fois, le gouvernement, la rue et la société civile devraient savoir comment la traverser. Il est peut-être grand temps de passer à des actions précises qui rétabliront la confiance et le gouvernement ainsi que le système judiciaire ont aujourd'hui un grand rôle à jouer…
Témoignages
Chedly, 22 ans, indépendant
Je suis aujourd'hui ici pour manifester contre la fuite des anciens responsables et symboles de la corruption, alors que des personnes sont emprisonnées pour avoir pratiqué la liberté d'expression. Les corrompus sont libres, alors que des personnes comme Samir Feriani croupit en prison. Je considère cela comme de la provocation envers le peuple. Ils sont tous libres… D'ailleurs, la déclaration de l'état d'urgence au début du mois de Ramadan ne m'a pas laissé indifférent, cela donne un pouvoir illimité au ministre de l'Intérieur. Ainsi, la fuite des corrompus et la libération des anciens responsables du régime de Ben Ali sont la goutte qui a fait déborder le vase dans mon cas. Aujourd'hui je suis ici pour appeler à un système judiciaire indépendant et transparent.
Wassim, 24 ans, indépendant
J'appelle à un système judiciaire indépendant que je juge aujourd'hui placé «sur un chemin d'égarement». D'ailleurs, on ne peut assurer des élections honnêtes et transparentes avec un système pareil. Cette manifestation est le troisième mouvement dans lequel je participe et si l'ambiance n'est pas altérée de répression pour le moment, quatre bus nous barrent le passage au Ministère de l'Intérieur, ce que je considère comme atteinte à la liberté d'expression. Ce barrage est aussi symbolique; on ne nous permet plus de nous rassembler devant le ministère en question.
Afef, 27 ans, indépendante
Ce qui m'amène ici est une seule revendication : l'indépendance du système judiciaire que je considère comme corrompu et en lequel je n'ai pas confiance. On ne demande pas des comptes à rendre aux corrompus et ils sont libres de toutes condamnations. Pis encore, des symboles de corruption et des anciens responsables encore en poste et d'autres ont eu des autorisations pour lancer des partis. Les choses devraient changer…