Le mouvement des sit-in et revendications social, a le vent toujours en poupe. Que ce soit dans le secteur public comme dans le privé la contestation a la peau dure et n'est pas prête de s'essouffler. Et à quelques jours de la date butoir des élections de la Constituante, les tensions sociales trouvent en cela un stimulant pour faire monter les enchères à leur paroxysme. Hier, c'est autour des agents de la CNSS (Caisse Nationale de la Sécurité Sociale), épine dorsale du système de redistribution de la richesse nationale et des services sociaux, de hausser le ton. Les agents de la CNSS ont organisé hier un sit-in devant la direction générale. La protestation est générale et a touché plusieurs directions régionales notamment celles de Nabeul, Ben Arous, Hammam Sousse, le Kram, Msaken… Devant les locaux de la direction générale de la CNSS, nous avons interrogé quelques agents sur les raisons de cette revendication salariale et de cette action informelle. Voici leurs principales réclamations. Les agents de la CNSS affirment que cette action intervient suite au refus de l'administration et du syndicat de base à satisfaire leurs demandes légitimes, se résumant en 17 points dont principalement la dissolution du syndicat de base qui selon le personnel de la CNSS a fait la sourde oreille et ignoré leurs propres droits et intérêts. Ils demandent par ailleurs une révision du statut juridique de la Caisse de manière à l'aligner sur celui des banques. « Contrairement à ce que pense l'opinion publique nous ne sommes pas financièrement gâtés, nous sommes une organisation publique à vocation financière, pourquoi donc ne pas bénéficier des mêmes avantages en nature et en numéraires que ceux accordés aux institutions financières bancaires et non bancaires et aux institutions publiques dont la STEG, la SONEDE et Tunisie Telecom, alors qu'on réalise des milliards et des milliards de dinars sont brassés par an », proteste une fonctionnaire. «C'est la moindre des choses que nous demandons à l'administration : à savoir prendre en charge les cotisations sociales des agents de la CNSS, comme c'était le cas auparavant », renchérit un autre employé. Autre point crucial et de discorde, les agents de la CNSS appellent à l'unanimité à ouvrir les dossiers de corruption et de malversation au sein de l'administration de la CNSS. Une interpellation qui concerne en réalité l'opinion publique et tout cotisant en général. On a toujours parlé et dénoncé la faillite affirmée des caisses sociales en Tunisie. Une faillite qui n'a pas raison d'être et ce à plus d'un titre, étant donné le volume gigantesque et bien étoffé des ressources et le grand afflux des recettes réalisées par les caisses concernées (CNSS ou CNRPS). Outre les raisons formelles, la mauvaise gestion, la corruption et les pratiques de malversations ont été toujours avancées en tant qu'arguments implicites et non officiels pour expliquer ce creux entre les recettes et la rentabilité des caisses sociales notamment en matière de sa contribution à la mobilisation de l'épargne à long terme. Les agents de la CNSS, demandent aujourd'hui des règlements de compte auprès des anciens directeurs et autres responsables de la CNSS, notamment ceux qui ont comploté avec l'ancien régime pour faire tarir les caisses de l'Etat. « Où sont passés ces contrevenants », réclament les uns. « La CNSS, a versé de l'argent fou pour financer les campagnes du RCD, et servir l'intérêt de l'ancien régime…La CNSS a même payé une voiture à Ben Ali Junior », nous affirme un agent. Trop d'abus de par le passé, mais qui ont l'air de se poursuivre même après la Révolution. « Et au lieu de rectifier le tir et rendre justice aux salariés et aux employés de la CNSS dans cette nouvelle ère de liberté, l'administration a pris la peine de renouveler le parc automobile des hauts cadres de la CNSS en leur offrant le luxe d'acquérir des voitures, à un prix unitaire de 48 millions de dinars. », ajoute un autre contestataire. Et interrogés sur le timing des protestations et du sit-in qu'ils déclarent « continuer jusqu'à ce que justice soit rendue », la foule affirme qu'ils ont attendu longtemps et qu'ils ont déjà différé à maints reprises leur mouvement de revendication. Seulement ils ont choisi cette fois d'emboîter le pas à Tunisie Telecom et autres organismes qui ont finalement gain de cause contre l'administration après une série de protestations. Et quels que soient l'argument ou le bienfondé de la revendication des agents de la CNSS, il va sans dire que l'arrêt de travail d'un corps de métiers si sensible et si délicat peut porter préjudice aux intérêts des citoyens et notamment des retraités et empiéter sur le système de couverture sociale dans le pays. Yosr GUERFEL AKKARI