• Le montant annuel desdites prestations accordées par la Cnss s'élève annuellement à 71 millions de dinars. • La valeur des prestations sociales, qui représentait le 1/3 du salaire minimum garanti, devenu «dérisoire», n'a jamais été un instrument de transfert social. La sécurité sociale constitue incontestablement l'un des acquis de la Tunisie depuis l'Indépendance, qui a des impacts matériels positifs pour les employés de l'administration, des entreprises et pour les personnes travaillant à leur propre compte. Au cours des dernières années, la couverture sociale s'est élargie pour toucher un grand nombre de personnes actives, qui ont le droit de bénéficier de plusieurs avantages sociaux dont les prestations médicales, la pension familiale —dont la valeur est inchangée depuis des années—, la rente de la retraite… Les responsables commencent, cependant, à réfléchir sur les résultats des caisses à long terme. Ces dernières doivent, en effet, avoir les ressources nécessaires pour poursuivre leurs activités et fournir les prestations avec la même efficience, voire améliorer leurs interventions pour satisfaire les exigences de leurs clients. Le système de sécurité sociale est divisé en deux organismes, à savoir la Caisse nationale de retraite et de prévoyance sociale (Cnrps) pour les entreprises publiques et la Caisse nationale de sécurité sociale (Cnss) pour les entreprises privées. La réflexion est déjà engagée au sujet des équilibres financiers de ces caisses pour le long terme. Comme l'a si bien affirmé M. Hafedh Laamouri, président-directeur général de la Cnss, lors d'un séminaire international sur la justice sociale, organisé récemment, «une réforme de la politique sociale, en général, et de la sécurité sociale, en particulier, ne peut être conçue en dehors de son cadre naturel : la démocratie». Instruments d'intégration sociale La démocratie ne doit donc pas favoriser l'exclusion sociale, mais intégrer toutes les catégories qui ont le droit de bénéficier des prestations médicales et des avantages quel que soit le secteur dans lequel ils travaillent. Personne ne doit être laissé de côté sous prétexte qu'il ne dispose pas des moyens nécessaires pour se prendre en charge. D'ailleurs, la réforme de la sécurité sociale entre aussi dans le cadre de la lutte contre la pauvreté qui touche encore aujourd'hui de nombreuses familles tunisiennes —dont un grand nombre ont un revenu médiocre— à l'intérieur du pays, mais aussi dans le Grand-Tunis. Les prestations familiales (les allocations, l'indemnité du salaire unique), les pensions, les exonérations des cotisations-contributions et la promotion d'accès à la couverture sociale ne semblent plus jouer leur rôle d'instruments d'intégration sociale. D'où la nécessité d'assurer leur réforme en profondeur sur la base d'une nouvelle conception des systèmes de sécurité sociale. Même la valeur des prestations sociales —qui représentait le 1/3 du salaire minimum garanti, devenu «dérisoire»— n'a jamais été un instrument de transfert social. Une nouvelle conception des prestations familiales profiterait à tout le monde, dans la mesure où, celles-ci pourraient être un moyen de solidarité sociale, à condition, cependant, de limiter leur attribution aux catégories socio-professionnelles les plus démunies, selon ce responsable de l'Etat. Il s'agit aussi d'améliorer la valeur de ces prestations familiales pour qu'elles jouent pleinement leur rôle envers les catégories ciblées. Actuellement, le montant annuel desdites prestations accordées par la Cnss s'élève annuellement à 71 millions de dinars. Une éventuelle augmentation —même d'un dinar seulement —coûterait 9 millions de dinars annuellement. C'est dire l'importance des ressources financières à mobiliser pour entamer toute réforme en profondeur et préserver les équilibres budgétaires. On peut donc parler de vraies contraintes financières auxquelles il faudrait faire face, quitte à opter, par exemple, pour la fiscalisation pour financer et généraliser les prestations familiales, par exemple. Le déséquilibre financier et structurel de la sécurité sociale est dû également aux régimes de pensions, même si leur montant est inférieur au salaire minimum légal. D'où l'impératif de réformer ces régimes sans pour autant renoncer à l'amélioration de la valeur des montants desdites pensions ni à la préservation de l'équilibre financier de ces régimes qui demeure, malgré tout, sérieusement menacé. La valeur salaires étant limitée surtout pour certaines catégories professionnelles, il n'est pas recommandé de revoir à la hausse la valeur des cotisations. L'option du prolongement de l'âge de la retraite a été évoquée, mais l'on craint que cela porte atteinte au marché du travail qui connaît déjà un taux important de chômeurs. Si chaque retraité s'accroche à son poste quelques années en plus, cela empêche la relève pour quelque temps encore. Parmi les idées formulées, notons celles concernant l'institution de taxes parafiscales ou d'une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sociale. La promotion de l'accès à la couverture sociale constitue aussi un autre défi à relever au cours de la prochaine période. D'autant plus que les conditions actuelles d'accès sont incompatibles avec le tissu économique composé, dans une grande partie, du secteur dit informel et de petites exploitations agricoles.