Que le secteur de l'oléiculture continue à se ressentir des répercussions de la crise de la saison écoulée, est en somme prévisible. Mais la surprise vient de son acuité car l'on s'attendait à ce que les banques se montrent plus solidaires , que l'ONH joue pleinement son rôle de régulateur et que les oléifacteurs respectent leurs engagements quant aux horaires convenus en début saison d'ouverture du marché de Gremda, véritable baromètre du secteur. Dans ce climat caractérisé par une chute inquiétante des cours des Olives qui s'accompagne d'une dégringolade non moins alarmante des cours de l'huile à l'exportation, une réunion vient de regrouper des oléifacteurs de Sfax, au siège de l'UTICA régionale.
Malaise Déjà , premier signe de malaise dans le secteur, seule une vingtaine d'oléifacteurs ont répondu à l'appel de la chambre professionnelle des oléiculteurs. Pourtant, sur les 372 huileries de la région on compte environ 200 unités ouvertes dont 140 dans le Grand Sfax. Ces absences « sont à interpréter comme une forme de protestation contre le manque de soutien au secteur » selon le commentaire d'un participant. Quant aux débats, ils ont tourné autour de trois axes principaux :
Prix plancher Les présents s'accordent à trouver inadmissible l'attitude de l'ONH qui se refuse à fixer un plancher pour les prix à l'exportation , attitude jugée d'autant plus fâcheuse que l'occlusion des exportations à un certain moment de la saison dernière est attribuée à son intervention en la matière. La fixation d'un seuil minimum de 2,3 à 2,5 Euros protégerait le secteur, selon les intervenants, des turbulences des marchés extérieurs , des manipulations insidieuses et des abus des acheteurs italiens ou autres. En l'absence de plancher estime-ton, le secteur est menacé d'écroulement à cause des dérives que cela peut engendrer . Comme exemple de ces dérives, l'un des assistants cite l'exemple d'un exportateur qui a déjà conclu un contrat fixant le prix de l'huile à trois dinars le kilogramme !!!
Prix de référence Deuxième revendication : la détermination d'un prix de référence. Là aussi l'on est intrigué par l'absence d'initiative de la part de l'ONH dont on souhaite vivement une intervention rapide sans laquelle le secteur restera plongé dans le flou et l'incertitude. Les oléifacteurs, dit-on, travaillent sans repères, sans planning et surtout dans la « psychose » d'éventuels effondrements des prix et donc d'une faillite potentielle.
Organisation du secteur Le troisième point récurrent au cours des débats est d'ordre organisationnel. A ce propos, M. Mounir Makhloufi, président de la Chambre Régionale des Oléifacteurs de Sfax reproche à ses homologues d'avoir failli aux engagements, pris par l'ensemble des acteurs de la profession, de respecter les horaires d'ouverture de « Souk Ezzitoun » de Gremda : « Au début de la nouvelle campagne de cueillette, les participants à une réunion regroupant le Conseil Régional, la municipalité, les représentants de différents ministères et la Chambre Régionale des Oléifacteurs, l'heure d'ouverture du dit marché a été fixée d'un commun accord à 07 heures du matin. C'est ainsi que durant la première quinzaine les cours des olives s'étaient stabilisés dans les limites d'une fourchette située entre 300 et 450 millimes le kilo. Malheureusement, certains oléifacteurs ont par la suite manqué à cette obligation en se pointant au marché à 04 heures du matin afin de rafler la totalité des quantités proposées sur le marché. Il s'en est suivi une concurrence serrée qui a fait grimper le prix du kilo à plus de 800 millimes entraînant du même coup une augmentation des prix de revient de l'extraction de l'huile : d'une fourchette allant de 2,500 dinars à 3,000 dinars, ils ont oscillé entre 3,500 et 4,500 dinars le kilo, ce qui est nettement au-delà des offres des exportateurs. »
Concernant le prix de référence et le plancher à l'exportation, M. Makhloufi estime que sa détermination ne fait plus partie des prérogatives de l'ONH, dont le statut a été modifié à la suite de l'opération de restructuration dont il avait fait l'objet et qui lui a fait acquérir le statut d'institution à caractère purement commercial.
La solution pour mettre le secteur de l'oléiculture à l'abri des risques ? La plus indiquée selon le président de la Chambre Régionale des Oléiculteurs est que ces derniers se conforment aux décisions prises en commun accord et qu'ils respectent scrupuleusement les règles du jeu de l'offre et de la demande : « C'est à nous seuls qu'il appartient de maîtriser les cours par un comportement responsable », rappelle-t-il à l'adresse des participants.
Maîtriser les cours revient cependant à dire qu'on ne tient pas compte de l'intérêt des principaux maillons de la chaîne, en l'occurrence l'agriculteur et l'ouvrier agricole qui, faut-il le dire , sont les maillons les plus faibles et dont il faut absolument assurer la protection contre toute tentative d'entente qui lui porterait préjudice.