Les caravanes documentaires présentent un portrait de la réalisatrice attitrée du 3° Reich qui mit son art au service de la propagande Nazie et qui prétendit, lorsque le régime national socialiste s'effondra, qu'elle en était en quelque sorte la victime puisqu'elle n'avait accepté de jouer le jeu de l'allégeance que pour pouvoir ensuite réaliser les projets personnels qui lui tenaient à cœur. Ironie du sort ! Celle qui tourna avec beaucoup de lyrisme Les Dieux du Stade, à l'occasion des jeux Olympiques de 1936, ne put à cause même des jalousies que suscita son succès international tourner un film sur la vie de Vincent Van Gogh. Leni Riefenstahl s'attira la haine de Gobbels, ministre de la propagande qui avait la haute main sur le cinéma et la culture et fut couverte d'infamie après 1945, à la chute d'Hitler dont elle était proche. N'ayant jamais réellement fait son autocritique bien qu'ayant publié des mémoires pour se justifier, elle fut éloignée de la profession et tourna au Soudan des films ethnographiques qu'elle ne termina pas. C'est alors qu'elle s'intéressa à la photographie. Prise de passion pour la plongée sous marine qu'elle apprit à l'âge de 72 ans, elle se dédia pendant de longues années à la réalisation d'un documentaire intitulé Impressions Sous Marines qu'elle présenta en 2002, juste une année avant sa mort, à l'âge de 101 ans... A l'occasion de la sortie de ce film, ressurgit une nouvelle polémique à un procès qui déboucha sur un non lieu. Leni Riefensthal avait affirmé quelques années auparavant que les Tziganes qu'elle avait employés dans son film Tiefland en 1942, avaient survécu aux camps de concentration. Or, l'histoire a prouvé que ces gitans étaient bien retournés dans les camps après le tournage, que Leni Riefenstahl n'avait rien fait pour empêcher cela et que bon nombre d'entre eux y sont morts. La projection de ce soir, à 18 heures, au Ciné Amilcar, n'est donc pas un hommage à cette femme au destin extraordinaire qui traversa les tumultes du 20ème siècle avec une soif effrénée d'absolu et de gloire, c'est plutôt une occasion de méditer sur les paradoxes de l'art quand il est soumis à la pression du pouvoir politique ainsi que sur la responsabilité de l'artiste quand il est confronté à l'éthique. Les caravanes documentaires invitent donc les cinéastes, les cinéphiles et les hommes de média à se poser des questions importantes pour envisager les formes que pourrait prendre la propagande audiovisuelle sous nos cieux en cette période de changement.