Les Journées du documentaire qui se tiendront les 9, 10 et 11 avril au CinémAfricArt sont une occasion pour redynamiser l'animation cinématographique qui a souffert des contrecoups des derniers évènements. Au menu, cinq films : tout d'abord, Zelal le dernier opus de Mustapha Hasnaoui, décédé le 15 janvier 2011, en France. Ce film, coréalisé avec l'Egyptienne Marianne Khoury, ouvrira la manifestation pour rendre hommage à ce documentariste tunisien qui a fait carrière dans l'Hexagone après avoir purgé une peine de prison à l'époque de Bourguiba. Le documentaire aura été, pour ce militant politique, le cadre d'expression le plus approprié pour rester cohérent avec son engagement qu'il a converti à travers ses films en un sens aigu de l'analyse sociale et en une vision progressiste qui se conjugue à une dimension pédagogique soutenue par une exigeante recherche formelle. Venue spécialement de Paris, sa fille Hind Hasnaoui assistera à cette projection de Zelal qui a été tourné dans des hôpitaux psychiatriques du Caire et qui a été présenté en première mondiale en septembre dernier à la 67e Mostra de Venise. Les imams vont à l'école de Kaouther Ben Hnia constitue sans doute le clou de ces journées. Ce documentaire s'intéresse à des apprentis imams à la Grande Mosquée de Paris qui sont désormais tenus de se former à la laïcité, conformément à la politique mise en œuvre par les pouvoirs publics en France. Une leçon d'histoire du Libanais Hady Zaccak s'étonne quant à lui que l'histoire d'un même pays puisse être enseignée de différentes manières d'un lycée à l'autre alors que les programmes de l'enseignement de l'Histoire ont été établis par décret depuis 1970. Production canadienne, Taqwacore de Omar Majeed est un road-movie qui suit un groupe de punks américains dans leurs pérégrinations en quête de spiritualité musulmane. Le voyage nous mène jusqu'au Pakistan (pays d'origine du réalisateur) à la recherche de sonorités et d'absolu. En attendant Abou Zayd de Mohammed Ali Atassi est un film qui a été tourné pendant six ans au cours desquels le réalisateur syrien a filmé inlassablement le théologien égyptien de réputation internationale Nasr Hamed Abou Zayd dont les exégèses du Coran lui ont valu d'être condamné pour apostasie. Ces films sont donc autant de prétextes pour susciter un débat indispensable dans la société tunisienne d'aujourd'hui. Le dogme religieux est dans chacun des documentaires mis face aux enjeux de la démocratie, toujours avec une pertinence et une acuité qui interpellent la conscience. Un autre objectif et non des moindres de ces journées, consiste, selon les instigateurs, à lancer devant un parterre de professionnels et de cinéphiles l'idée d'un nouveau festival consacré à la promotion du documentaire dans différentes régions de Tunisie. Il s'agit en réalité d'une concertation qui cherche à recueillir des suggestions à tester la pertinence de ce concept basé sur l'itinérance et la décentralisation. En effet, les caravanes documentaires, c'est ainsi que s'appellera ce nouveau festival, se proposent de sillonner le pays afin de porter dans les régions tunisiennes une culture audiovisuelle, mettant en évidence, à travers la captation du réel, les valeurs de la citoyenneté. Des observateurs de l'Arab Fund For Arts and Culture assisteront à ces journées et présenteront le 11 avril (à l'issue de la projection de Une leçon d'histoire), le cadre qu'offre AFAC pour soutenir la création documentaire dans les pays arabes. Ainsi, ces journées du documentaire qui font d'une pierre plusieurs coups s'affirment véritablement comme une alternative dans le paysage audiovisuel et citoyen.