• Il est désormais contré par ses alliés pour ses visées hégémoniques • Vers un éclatement chromosomiques au sein de la Troïka ? La première réunion de la Constituante le 22 novembre a été qualifiée à juste titre d'historique. Deux commissions ont été mises sur pied, une pour l'élaboration d'un règlement intérieur pour le déroulement des travaux de l'Assemblée nationale constituante, l'autre pour l'organisation des pouvoirs en cette nouvelle période transitoire. Les indiscrétions qui filtrent des travaux de ces deux commissions alimentent l'inquiétude publique. Il apparaît clairement, surtout pour le projet d'organisation des pouvoirs, que le parti Ennahdha cherche à être le plus grand gagnant, en un mot à rafler la mise. Le texte proposé accorde presque la totalité des pouvoirs au gouvernement formé et dirigé par Ennahdha qui a obtenu le plus grand nombre de sièges 89 sur 217. La fonction de président promise à Moncef Marzouki, chef du parti le Congrès Pour la République (CPR) devient dans ce cas pratiquement honorifique. Les prérogatives du gouvernement et de son chef, candidat au poste Hamadi Jébali, sont largement étendues. Il a un pouvoir réglementaire absolu. Il contrôle l'administration, les entreprises publiques, les forces de l'ordre, nomme les hauts fonctionnaires et les cadres de l'armée, tout en ayant sous sa tutelle les collectivités territoriales. Les observateurs laissent apparaître une crainte légitime quant à l'indépendance du pouvoir judiciaire suite à l'attribution fort probable du portefeuille de la Justice à un haut cadre d'Ennahdha. Comment peut-on concevoir l'indépendance de la Justice si l'autorité qui le dirige n'est pas élue. Qu'on l'appelle Conseil Supérieur de la Magistrature ou autre, importe peu. Une autre source d'appréhension et de peur est observée. Le prochain gouvernement, pour être fonctionnel, devra gagner le soutien de la majorité simple des représentants du peuple. Toutefois, pour le démettre, il faudra une motion de censure à approuver par la majorité des 2/3. Comme Ennahdha dispose de 42% des sièges, cette éventualité est tout simplement impossible à réaliser. Même sous la dictature noire de Ben Ali, la motion de censure pour être recevable, n'avait besoin que de la majorité simple. Par ailleurs, le pouvoir législatif, appartient à l'ssemblée Constituante et en partie au Chef du gouvernement. Les lois organiques sont votées à la majorité simple des membres de l'Assemblée, les lois ordinaires à la majorité des membres présents, les articles de la constitution à la majorité simple. Le texte complet du projet de constitution sera ratifié par une majorité qualifiée des 2/3, dans sa première lecture. Un mois après, dans une seconde lecture la nouvelle constitution sera adoptée à la majorité simple. Pour une constitution qui va organiser la vie politique du pays pour cinquante, peut être même cent ans, c'est trop peu pour être réconfortante. Avec ses 89 députés Ennahdha n'aurait besoin que de 20 voix pour pouvoir décider de tout dans le pays. Il peut les trouver chez les indépendants d'El Aridha Chaabia ou ailleurs. Les cris de cœur Khémaïs Ksila d'Ettakatol, ou du Doyen Fadhel Moussa, du Pôle Démocratique Moderniste (PDM) sur les chaînes de télévision et les ondes radio devraient donner à réfléchir aux démocrates. Le risque du diktat d'un seul parti est bien là. Ennahdha, est certes le premier parti, mais il n'a obtenu que 19,8% des voix de l'ensemble du corps électoral, chose qui devrait inciter à un peu de modestie. Le CPR a obtenu 4,5% et Ettakatol 3,2%. La Troïka a eu au total 27,5% des voix des 7569000 Tunisiens qui ont le droit de voter. Nous vivons bien une transition. C'est aussi l'occasion de faire l'apprentissage de la Démocratie et de privilégier le consensus en cette nouvelle période transitoire. L'acceptation de l'Autre est une question de comportement et d'actes, plus que de paroles. Aux dernières nouvelles, au sein de la commission chargée de l'organisation des pouvoirs, les votes pour les articles 5 et 8 de la loi d'organisation provisoire des pouvoirs ont dévoilé, hier matin, un camouflet pour Ennahdha. En effet, concernant l'article 5 relatif à l'organisation provisoire des pouvoirs et qui concerne le texte proposé quant à la majorité nécessaire pour adopter la constitution, 9 ont voté pour tandis que 13 se sont prononcés contre. Pour l'article 8, relatif à l'organisation provisoire des pouvoirs et qui touche la question des pouvoirs législatifs du Premier ministre, 9 ont voté pour, 12 contre et 1 abstention. Les pourparlers au sein de la commission se sont poursuivis, au sein de la commission, hier après-midi, à partir de 15 heures. Les alliances vont-elles changer ?