Par Ahmed NEMLAGHI - Dans l'affaire de vol de pièces archéologiques dont le principal protagoniste est Skher El Materi, gendre du président déchu, la Justice a tranché, en lui infligeant 5 ans de prison ainsi qu'à une amende de 300 mille dinars,tandis que ses complices, Ben Mami et Hamza ont écopé respectivement de 4 et 2 ans de prison. Les avocats de Materi ont affirmé que leur client aurait été incapable de commettre un tel délit n'était-ce le concours de ses complices qui lui ont facilité le transport de certaines pièces archéologiques jusqu'à son domicile, entendant par là que Sakher El Matéri n'avait aucune intention délictuelle, et qu'aucun acte n'a été commis personnellement. Mais ces pièces archéologiques, qui font partie du patrimoine national, devraient se trouver dans un des musées tunisiens. Que faisaient-elles alors chez lui ? Les complices quant à eux ont soutenu mordicus qu'ils n'avaient fait qu'obéir aux ordres de leurs supérieurs, dont notamment ceux du président déchu, également impliqué dans cette affaire. L'ordre de l'autorité légitime Juridiquement la personne qui accomplit un acte commandé par une autorité légitime, n'est pas pénalement responsable. Il faut cependant que cet acte ne soit pas manifestement illégal. C'est la théorie de l'obéissance passive ou « baïonnette obéissante » Qu'entend-on par acte manifestement illégal ? C'est tout acte qui crée un préjudice certain à autrui, ou à la collectivité. Si l'ordre d'un supérieur consiste à voler par exemple, les biens faisant partie du patrimoine national, le subordonné peut ne pas obéir. « La baïonnette intelligente » C'est par cette métaphore qu'on désigne tout subordonné qui refuse l'ordre de commettre un acte manifestement illégal. Toutefois les complices susmentionnés pouvaient-ils se soustraire aux ordres qui leur ont été donnés ? Tout le problème est là. Certes le risque est gros car ils auraient pu, dans ce cas avoir le pire des châtiments, par des moyens détournés, en leur collant par exemple des délits qu'ils n'ont pas commis. C'est ce qu'ont d'ailleurs soutenu leurs avocats devant le tribunal, pour les disculper. Toutefois, leur complicité n'a pas consisté seulement à fournir des moyens mais à occulter ces faits même après la Révolution. Les dénoncer illico, aurait été une preuve de leur bonne foi. En tout état de cause, il est de jurisprudence constante que le fait d'obéir à l'ordre d'un supérieur, n'est pas considéré comme un fait justificatif de nature à disculper l'accusé. Dans une affaire où le supérieur d'une usine avait donné l'ordre de rejeter les déchets dans une rivière, la cour de cassation française a décidé que les auteurs d'un acte illégal « ne peuvent pas se soustraire à leur responsabilité en raison de l'ordre qui leur a été donné » Des responsables « irresponsables » En fait, le fin mot de l'histoire c'est la responsabilité. N'est pas responsable qui veut. La plupart des responsables à l'époque de Ben Ali, n'avaient d'autres soucis que d'occuper le fauteuil du directeur ou du maire et de bénéficier des avantages y afférents. Le reste, ils ne s'en souciaient pas outre mesure. C'est le reproche qui leur est fait dans l'acte d'accusation. Beaucoup d'entre eux, cherchaient à rendre service à leurs supérieurs, pour servir par là même leurs propres intérêts au lieu de servir l'intérêt national.