La Jordanie était présente en cette 15è édition des Journées Théâtrales de Carthage avec la pièce «Juste la fin du monde», présentée mardi 10 janvier au 4è Art devant un public nombreux. Le texte, traduit en arabe, est celui du dramaturge français Jean-Luc Lagarce. La mise en scène revient à Nabil Al Khatib. Quant aux rôles, ils sont joués par quatre acteurs, deux hommes et deux femmes, évoluant dans un décor intérieur composé de meubles sans confort avec une porte donnant sur l'extérieur et un escalier menant au premier étage. L'histoire tourne autour des difficultés de communiquer des problèmes intimes dans le cadre familial suite à la dislocation de la famille moderne et l'emprise de la matière sur les relations humaines, même au sein de la même famille. Toute l'histoire se déroule en une seule journée ou presque : elle commence avec l'arrivée de Louis chez les siens et finit par son départ. Louis, 34 ans, rend visite à sa famille, la première fois depuis dix ans. Pendant les années précédentes, il ne leur a envoyé que quelques cartes postales, sans dire grand-chose de sa vie. Mais quel est le but de sa visite après ces longues années d'absence ? Il veut leur annoncer qu'il va mourir bientôt et passer le reste de ses jours auprès de sa petite sœur Suzanne, son frère Antoine et Catherine, l'épouse de ce dernier. Hélas ! Ce retour ne se passe pas vraiment comme prévu : durant tout le temps qu'il passe en famille, il n'arrive pas à annoncer ce qu'il a envie de dire. A peine commence-t-il de raconter son histoire que l'un des siens prend la parole pour lui raconter ce qu'il a fait pendant son absence. Chacun, à tour de rôle, l'interrompt pour raconter des souvenirs, proférer des insultes, adresser des reproches, parler de tout et de rien. D'anciennes querelles et de vieilles scènes de famille sont alors ranimées ! Enfin, Louis sent avec beaucoup d'amertume qu'il n'arrivera jamais à leur annoncer la terrible nouvelle, car ceux qu'il croit ses proches ne sont pas prêts à lui prêter l'oreille, ayant d'autres chats à fouetter. Déçu, Louis est obligé de repartir sans avoir annoncé sa mort prochaine, emportant à jamais son secret, comme si le silence était la seule issue pour lui ! La pièce repose essentiellement sur les échanges maladroits entre ces quatre personnages de caractères différents et qui ont l'air d'être des inconnus l'un pour l'autre malgré le lien familial qui les unit. Louis est débonnaire. Son frère Antoine est un type malveillant et rancunier, sa femme Catherine est plutôt discrète. Quant à la sœur Suzanne, elle se montre plus compréhensive. L'incompatibilité de caractères de ces quatre protagonistes est l'image même de la famille moderne où règnent indifférence, égoïsme et je-m'en-foutisme ! Serait-ce donc « juste la fin du monde » ? Rappelons que Jean-Luc Lagarce. (1957-1995) a écrit cette histoire de famille en 1990 alors qu'il savait que sa fin était proche, étant atteint du Sida. Il est l'auteur contemporain le plus joué en France. Metteur en scène de textes classiques aussi bien que de ses propres pièces, c'est en tant que tel qu'il accède à la notoriété. Depuis sa disparition, son œuvre littéraire (vingt-cinq pièces de théâtre, trois récits, un livret d'opéra…) connaît un succès public et critique grandissant et elle est traduite en vingt-cinq langues.